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Quand la NBA s'invite dans la guerre commerciale sino-américaine

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Un tweet de soutien à Hong Kong d'un manager des Houston Rockets a mis le feu aux poudres en Chine, un des principaux marchés pour le basketball américain.

Il a fallu une petite étincelle pour mettre le feu aux poudres. Cette étincelle, c'est le tweet de Daryl Morey, manager de l'équipe des Houston Rockets, une des principales franchises de la NBA, la célèbre ligue nord-américaine de basketball. Ce weekend, il a donc déclenché une véritable tempête de feu en publiant, sur Twitter, une image de soutien aux manifestants hongkongais.

La Chinese Basketball Association, présidée par Yao Ming -un ancien joueur des Rockets- a aussitôt suspendu sa coopération avec le club texan en guise de protestation. Le lendemain, la star James Harden, un des visages les plus connus de la NBA, a présenté ses excuses face aux réactions indignées en Chine. A son tour, Daryl Morey a tenté de déminer la situation: "je n’avais pas l’intention d’offenser les fans des Rockets ni mes amis en Chine avec mon tweet" a-t-il déclaré. "J’ai simplement exprimé une pensée, basée sur une interprétation d’une situation compliquée. J’ai eu beaucoup d’occasions depuis ce tweet d’entendre d’autres points de vue".

Malgré ces piteuses explications, la CCTV, principale chaîne publique chinoise, a ainsi annoncé qu'elle ne retransmettrait plus les matches du club de Houston tandis que des sponsors locaux ont commencé à envisager des ruptures de contrats.

En retour, le grand patron de la NBA, Adam Silver, a au contraire soutenu la "liberté d'expression" de Daryl Morey. Nouveau tour de vis de la CCTV: toutes les diffusions de la NBA en Chine sont suspendues. "Nous estimons que tout propos qui remet en cause la souveraineté nationale et la stabilité sociale n'entre pas dans le champ de la liberté d'expression", a-t-elle indiqué. Dernier épisode en date, une nouvelle sortie d'Adam Silver qui a rappelé que la ligue ne présentera pas d'excuses pour le tweet originel.

La Chine, un marché colossal

C'est tout de même un coup dur pour le business de la NBA. Le marché chinois est énorme: près de 300 millions de joueurs, bien plus qu'aux Etats-Unis. La ligue nord-américaine jouit d'une popularité extraordinaire dans le pays et la NBA y est pour beaucoup, ayant financé la construction de terrains, en cédant les droits de diffusion des matchs, mais aussi en organisant des tournées de pré-saison des meilleurs joueurs dans l'empire du milieu. Dans les années 1980 et 1990, l'ancien patron de la NBA, David Stern, a ainsi largement contribué à exposer ce sport américain en Chine.

Et les résultats sont là. La saison dernière, 500 millions de Chinois ont regardé des matchs de la NBA sur les plateformes de Tencent et les droits de diffusion sont devenus payants: 1,5 milliard de dollars pour 5 ans. Le double du précédent contrat.

Casse-tête chinois

Mais depuis David Stern, les temps ont changé. La deuxième économie mondiale, dirigée par Xi Jinping, ne prend plus le même chemin tandis que la NBA se présente comme la ligue sportive la plus progressiste d’Amérique du Nord. Difficile de faire coïncider les deux…

C'est toute le paradoxe de la NBA qui aura du mal à sortit indemne de cette situation. Certains magasins comme les chaînes Taobao et JD.com ont d'ores et déjà retiré les produits des Rockets de leurs rayons et le patriotisme exacerbé des Chinois pourrait faire d'autres victimes. "Si vous allez à l'encontre de l'opinion du public chinois, vous ne réussirez pas", a résumé un porte-parole du ministère chinois des Affaires étrangères.

Reste à savoir si l'amour des Chinois pour le basketball pourra adoucir les tensions géopolitiques, au sein d'une guerre commerciale redoutable entre la Chine et les Etats-Unis.

Le principal acteur du conflit, Donald Trump, n'a d'ailleurs pas encore réagi. Jeudi, les négociations devraient reprendre entre les deux pays. Inutile de mettre de l'huile sur le feu. Mais le sujet reviendra probablement sur son fil twitter, en temps et en heure.

Thomas Leroy