BFM Business
Services

Quand le patron d'Alcatel tente de justifier ses primes de départ

Michel Combes va toucher 13,7 millions d'euros.

Michel Combes va toucher 13,7 millions d'euros. - Jacques Demarthon - AFP

Michel Combes doit quitter la direction d'Alcatel-Lucent avec un pactole de 13,7 millions d'euros. Un chiffre qui a suscité une avalanche de critiques. Elles ne l'ont pourtant pas découragé.

Michel Combes persiste. Il quittera son poste mardi, pour prendre la présidence du conseil d'administration de l'opérateur Numericable-SFR, et va recevoir comme l'a révélé le Journal du Dimanche 4,5 millions d'actions d'Alcatel-Lucent sur trois ans, soit l'équivalent de 13,7 millions d'euros au cours actuel.

Il a défendu, dans un entretien aux Echos, ses primes et son bilan à la veille de son départ de l'équipementier en télécoms. Justifiant sa rémunération, il s'est dit "fier du travail accompli" à la tête de l'équipementier, dont il a mené à bien le redressement ces deux dernières années au prix d'une lourde restructuration, et dont il a préparé le rachat par le groupe finlandais Nokia, censé mieux l'armer face aux concurrents asiatiques.

"Comme le cours de bourse de l'entreprise s'est apprécié, on atteint un montant significatif, je le reconnais. Mais cela signifie que j'ai réussi à créer de la valeur et que l'entreprise est sauvée, alors que je l'ai rejoint(e) en quasi faillite et que les candidats pour la diriger n'étaient pas nombreux", a-t-il déclaré. "Je ne touche pas d'indemnité de départ. J'avais des actions valorisées comme celles d'autres collaborateurs en bénéficient. Le conseil d'administration m'a, en plus, imposé une clause de non concurrence, j'ai demandé à ce que cette clause soit payée en actions, pas en cash", a expliqué le dirigeant.

Vives réactions

Le chiffre de 13,7 millions d'euros a suscité de vives réactions. "A un moment donné, il faut un peu de bon sens, un peu de mesure, un peu de retenue. Et là, en l'occurrence Michel Combes n'en a pas eu", a ainsi asséné sur France Info le ministre des Finances, Michel Sapin, appelant le dirigeant à "prendre les bonnes décisions".

Dans l'opposition, Florian Philippot, l'un des vice-présidents du Front national, a réclamé à Michel Combes de "renoncer" à son "extravagante" rémunération.

Même au Medef on prenait ses distances avec le directeur général de l'équipementier en télécoms, le vice-président de l'organisation patronale, Thibault Lanxade estimant sur RTL que les sommes attribuées "sont d'autant plus choquantes que les résultats n'étaient pas, on va dire, au rendez-vous".

"Cela doit nous poser une question à nous tous: quel est notre rapport à l'argent, personnellement, mais aussi collectivement parce que tout cela s'est fait en totale transparence, on ne peut pas le nier, un conseil d'administration a décidé d'une telle rémunération, cet argent lui est dû contractuellement", a pour sa part estimé sur LCI François Asselin, président de la Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME).

Les syndicats dénoncent la situation

De leur côté, les syndicats ont dénoncé dès dimanche la situation. Le coordinateur CGT d'Alcatel-Lucent, Stéphane Dubled, a ainsi ironisé sur l'image de "chevalier blanc" qu'avait pu se donner Michel Combes lorsqu'en avril dernier, il avait annoncé avoir renoncé à un parachute doré de 2,4 millions d'euros, une indemnité de départ qu'il aurait pu toucher après avoir mené le plan d'économie ainsi que la fusion avec Nokia. Pour le syndicaliste, il a plutôt agi en "fossoyeur avec la fermeture de sites, la vente de filiales, l'externalisation de personnel, la suppression de 10.000 emplois et au final la vente du groupe".

"Les salariés qui ont vu les chiffres annoncés ce week-end on dû l'avoir mauvaise, c'est proprement indécent compte tenue de la casse sociale ces dernières années. Il y a certes une amélioration des comptes mais ce n'est pas non plus spectaculaire", a pour sa part déclaré lundi à l'AFP Hervé Lassalle, délégué syndical CFDT, syndicat majoritaire chez Alcatel-Lucent. "Les sommes dont on parle sont surréalistes. (...) J'aimerais croire que Michel Combes va renoncer à tout ou partie (des actions, ndlr) mais j'en doute", a-t-il conclu.

D. L. avec AFP