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Quelle est la meilleure façon de taxer Google?

Les ministres du numérique successives Axelle Lemaire et Fleur Pellerin (entourant ici le sénateur David Assouline) ont évoqué moult taxes Google, mais sans les mettre en place

Les ministres du numérique successives Axelle Lemaire et Fleur Pellerin (entourant ici le sénateur David Assouline) ont évoqué moult taxes Google, mais sans les mettre en place - Jean-Pierre Muller AFP

Un rapport, commandé par le gouvernement à 10 économistes, évalue l'efficacité des différentes taxes applicables aux géants de l'Internet.

Tout le monde (ou presque) est d'accord sur un point: les géants de l'internet payent quasiment zéro impôts hors des Etats-Unis, ce qui crée un important manque à gagner.

En revanche, personne n'est d'accord sur la "taxe Google" à instaurer pour régler ce problème: taxe sur la publicité en ligne, comme proposée par le sénateur Philippe Marini? Taxe sur les données personnelles, inventée par le rapport Colin et Collin? Taxe sur le trafic internet, pour laquelle milite la ministre de la Culture Fleur Pellerin?

Un impôt vidé de sa substance

"Ces propositions n'ont pu être appliquées du fait de la complexité du sujet, mais aussi par manque d'études sur leur incidence", explique France Stratégie. Ce commissariat rattaché à Matignon a donc demandé d'évaluer ces pistes à dix économistes de trois écoles: l'école d'économie de Paris, celle de Toulouse, ainsi que Télécoms Paris. 

Leur conclusion, publiée ce lundi 9 mars, est qu'il faudrait d'abord essayer de refaire fonctionner l'impôt sur les bénéfices. Certes, celui-ci est vidé de sa substance en raison de "règles obsolètes". En effet, le chiffre d'affaires (et donc les bénéfices) généré par les géants du net dans un pays sont désormais déclarés dans un autre pays (Irlande, Luxembourg...). D'où la solution proposée par le rapport: l'impôt sur les bénéfices des géants du net devrait être réparti entre chaque pays en fonction du nombre d'utilisateurs dans ce pays.

Les "effets distorsifs" de la taxe sur les données personnelles

Si cela n'est pas possible, le rapport propose un impôt basé sur le chiffre d'affaires généré dans le pays. En effet, celui-ci est assez proche du bénéfice "étant donné que les coûts variables sont négligeables".

Si rien de cela n'est possible, le rapport recommande alors "en dernier recours" de se baser sur une autre mesure de l'activité dans le pays: "nombre d'utilisateurs, flux de données, nombre d'annonceurs..." Toutefois, Cette dernière taxe devrait être "calibrée à un niveau très faible", car elle aurait "des effets distorsifs". 

Parallèlement, le rapport propose d'appliquer un taux d'imposition plus élevé aux revenus provenant de l'exploitation des données personnelles, afin de diminuer cette exploitation.

Mise à jour: à l'occasion de la remise du rapport lundi 9 mars, la secrétaire d'Etat au numérique Axelle Lemaire a déclaré: "on peut taxer au cas par cas, la bande passante, la publicité, mais je crois qu'il faut surtout développer une méthode qui consiste à prélever l'impôt là où la valeur est créée", c'est-à-dire "là où les utilisateurs donnent leurs données". La taxation sur la bande passante "est un peu un serpent de mer. Un tel impôt serait très difficile à mettre en place au niveau national, et pourrait aboutir à des stratégies de contournements techniques qui seraient contreproductives. Il vaut mieux avoir une approche harmonisée a minima au niveau européen et je crois qu'il y a moyen d'avancer rapidement".

Jamal Henni