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Transports

Rachat du ferroviaire de Bombardier: l'Europe osera-t-elle (encore) s'opposer à Alstom?

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La Commission européenne avait mis son véto, l'année dernière, à une fusion entre Alstom et Siemens provoquant de sérieux remous politiques. Mais les choses ont désormais bien changé et le constructeur français se veut confiant.

Jusqu'ici, tout va bien… Sur l'antenne de BFM Business, ce mardi, le PDG d'Alstom Henri Poupart-Lafarge s'est félicité de l'accord de principe obtenu par son groupe pour le rachat du ferroviaire de Bombardier.

"Nous avons besoin de croître pour pouvoir plus innover" a-t-il expliqué. "L'objectif premier de cette opération, c’est de permettre d'élargir notre capacité d'investissement et notre capacité d'innovation."

Mais le contrat à 6 milliards d'euros doit encore passer à travers les fourches caudines de la Commission européenne, très tatillonne sur les questions de troubles à la concurrence. En février 2019, la redoutable Commissaire à la Concurrence, la Danoise Margrethe Vestager avait rejeté la fusion proposée entre Alstom, déjà, et l'allemand Siemens. Cette alliance semblait légitime face à l'ogre chinois CRRC, numéro un mondial du ferroviaire, bien décidé à s'implanter durablement en Europe.

"Nous ne sommes pas du tout dans ce cas-là"

Mais pour Bruxelles, elle était parfaitement contraire au principe fondateur de l’Union européenne: la concurrence libre et non faussée, inscrite dans le Traité de Rome. "Dès le début de mon mandat, j’ai annoncé qu’il n’y aurait pas de compromis politique dans mes décisions" se justifiait en mai dernier Margrethe Vestager sur BFM Business. "Il fallait que la même loi s’applique à tous. Pour moi, il s’agissait de faire mon travail et de prendre la bonne décision."

Alors l'Europe va-t-elle encore mettre des bâtons dans les roues d'Alstom? En réalité, c'est peu probable. "La dernière fois, l'opération a buté sur le problème de la signalisation" assure aujourd'hui Henri Poupart-Lafarge. "Bruxelles a considéré qu'il y avait trois grands acteurs de la signalisation – Alstom, Siemens et Thalès – et qu'elle ne voulait pas voir deux d'entre eux fusionner. Nous ne sommes pas du tout dans ce cas-là, Bombardier est beaucoup plus petit en signalisation."

"Réexaminer les outils que nous utilisons"

Surtout, "Bruxelles connait beaucoup mieux le dossier également puisqu'elle a eu l'occasion d'étudier le marché ferroviaire pendant de longs mois et donc nous sommes dans une zone beaucoup plus certaine" souligne le patron. D'autant qu'il reste évidemment Siemens au cœur du marché européen.

Ensuite, le véto de Vestager a entraîné un changement de stratégie politique au sein des 28 (devenus 27 depuis le 31 janvier dernier). "C'est un échec européen de ne pas avoir été capable de créer des champions dans le secteur industriel et plus particulièrement dans le numérique", avait tancé Bruno Le Maire en avril.

Depuis, une nouvelle commission européenne a été mise sur pied. Et si Margrethe Vestager a gardé son poste, le discours n'est plus le même, poussé notamment par la France. La Danoise a dû ouvrir la porte:

"Les défis auxquels nous sommes confrontés au début de cette nouvelle décennie nous obligent à réexaminer les outils que nous utilisons pour faire respecter les règles de concurrence" a-t-elle expliqué en décembre.

Un message clair qui devrait donc empêcher tout veto européen sur le rachat de Bombardier Transport.

Thomas Leroy