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Radio: les grands groupes vont pouvoir acheter d'autres stations

Le CSA est chargé d'appliquer les règles anti-concentration

Le CSA est chargé d'appliquer les règles anti-concentration - Thomas Samson AFP

Le CSA estimait que les grands groupes de radio étaient loin du plafond maximal d'auditeurs fixé par la loi. Le Conseil d'État vient de lui donner raison.

Les grands groupes de radio (NRJ, Lagardère, RTL) vont pouvoir racheter des stations supplémentaires. Telle est la conséquence de la décision récemment rendue par le Conseil d'État.

En jeu: les règles anti-concentration dans la radio. Depuis 1994, ces règles interdisent à un même groupe de desservir, avec ses différentes stations, plus de 150 millions d'habitants. Simple sur le papier, la règle est compliquée à appliquer. En effet, il faut calculer la population couverte par chaque station. En pratique, c'est le CSA (Conseil supérieur de l'audiovisuel) qui est chargé de ce calcul ardu.

Skyrock et les indés furieux

En décembre 2013, le gendarme de l'audiovisuel a notamment adopté une nouvelle méthode de calcul. Cette nouvelle méthode accorde plus de marge aux grands groupes. Ainsi, elle chiffre à 117 millions d'habitants la population couverte par NRJ avec ses quatre réseaux (NRJ, Nostalgie, Chérie, Rires et Chansons) permettant donc à NRJ de racheter un réseau national supplémentaire. Au contraire, la méthode précédente du CSA estimait que NRJ couvrait 149 millions de personnes, et donc avait atteint la limite légale. La nouvelle méthode fait passer Lagardère (Europe 1, RFM, Virgin) de 135 à 113 millions; et RTL (RTL, RTL 2, Fun) de 133 à 110 millions.

La nouvelle méthode du CSA a rendu furieux Skyrock et le syndicat des radios indépendantes, le Sirti. Ceux-ci l'ont donc contestée devant le Conseil d'État, qui les a récemment déboutés. Pour les juges du Palais Royal, "il ne ressort pas que le CSA ait commis une erreur manifeste d'appréciation. Le CSA n'a méconnu ni les principes de pluralisme et de diversité des opérateurs, ni l'obligation légale qui lui incombe d'éviter les abus de position dominante, ainsi que les pratiques restreignant la concurrence".

À noter que la haute juridiction n'a pas suivi l'avis de son rapporteur public, Laurence Marion, qui avait recommandé le 22 juin de casser la décision du CSA. Une recommandation dont s'était "félicité" le Sirti.

"Redoutable technicité"

Si la haute juridiction a mis deux ans et demi avant de rendre son verdict, c'est que le sujet est d'une "redoutable technicité", comme l'admettait le rapporteur public. Si complexe que le Conseil d'État a demandé l'aide d'un expert, Bernard Denis-Laroque, dont l'impartialité a ensuite été contestée par Skyrock, mais en vain. 

En pratique, le gendarme de l'audiovisuel juge impossible de mesurer la couverture exacte d'une radio, et recourt donc à une modélisation. Précisément, il a repris le modèle de propagation des ondes radio préconisé par l'UIT (Union internationale des télécommunications). Enfin, la méthode du CSA "vise à déterminer les secteurs certainement desservis, et conduit à ne pas prendre en considération des secteurs où il n'est pas exclu que la radio soit reçue dans des conditions acceptables, sans que cela soit certain", relève l'expert. 

Cette méthode a été validée en tous points par le Conseil d'État. D'abord, les textes imposent de ne prendre en compte que les zones où le service est reçu dans des conditions satisfaisantes, rappelle la haute juridiction. Ensuite, faire des mesures systématiques sur le terrain "n'est pas raisonnablement envisageable". Enfin, le CSA a fait au mieux avec ses moyens et les outils techniques disponibles.

Jamal Henni