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Rétro 2014: ces Français qui révolutionnent la médecine

25 ans de recherches ont été nécessaires pour mettre au point le cœur artificiel.

25 ans de recherches ont été nécessaires pour mettre au point le cœur artificiel. - Franck Fife - AFP

INFOGRAPHIE - La prouesse technologique réalisée cette année par Carmat avec son cœur artificiel montre que "réparer" l’homme ne sera bientôt plus une utopie. La France excelle dans les technologies médicales de pointe destinées à remplacer certains de nos organes. Tour d’horizon des avancées accomplies en 2014.

La révolution est en marche dans le monde médical: il est désormais possible de rendre la vue à ceux qui l’ont perdue et de détecter un cancer invisible à l’imagerie. Ces exploits médicaux ont tous été réalisés en 2014 par des entreprises françaises. Souvent à la frontière entre médecine et robotique, la plupart ont fait le choix d’entrer en bourse pour financer des années de recherche et rester dans la course à l’innovation mondiale. Persévérance, goût du risque et esprit d’entreprendre rassemblent ces entreprises pionnières dans leur domaine, qui inventent la médecine du futur. 

> Le coeur artificiel bat toujours

C’est une prouesse unique au monde et elle a été réalisée au CHU de Nantes. Depuis bientôt 4 mois, un homme vit presque normalement avec un cœur artificiel conçu par Carmat. Les équipes médicales, qui ont réalisé d’importants progrès après le décès du premier patient greffé en décembre 2013, ont prévu de recruter 2 nouveaux malades souffrant d’insuffisance cardiaque. Si les greffes se passent bien, 20 nouvelles implantations seront programmées dans l’espoir d’une commercialisation en 2016.

Ce cœur artificiel est une véritable prouesse.
Ce cœur artificiel est une véritable prouesse. © Franck Fife - AFP

Pour les patients, qui ont épuisé tous les recours médicaux, cette transplantation représente la seule solution technologique définitive. La bioprothèse leur assure une vie quotidienne quasi normale. Un exploit rendu possible par les 25 ans de recherches acharnées menées par Alain Carpentier. Pour inventer ce bijou d’à peine 1 kilo, le professeur s’est associé dès les années 90 à l’expertise d’EADS pour créer les moteurs miniatures qui font tourner la prothèse. Des ingénieurs aéronautiques, aux équipes médicales, en passant par les industriels et les investisseurs en bourse, plus de 100 personnes ont participé pendant 10 ans à l'aventure de ce cœur artificiel. La rencontre entre la chirurgie, l’aéronautique et la finance a permis de créer le plus vital des organes.

> Une rétine artificielle pour les déficients visuels

Qui aurait pu imaginer qu’il serait un jour possible de redonner la vue à ceux qui l’ont perdue? En 2014, cinq patients ont partiellement recouvré la vision grâce à la technologie inventée par Pixium Vision. La start up a mis au point un implant qui se fixe à la surface de la rétine et stimule le nerf optique grâce à une soixante d’électrodes. La prothèse Iris reçoit en temps réel les images captées par une caméra qui fonctionne comme un œil humain. Résultat, le patient perçoit d'abord des formes grossières puis son cerveau réapprend à voir progressivement. "Notre puce ne permet pas de redonner une vue parfaite mais elle a le mérite d’amener les non-voyants vers un retour à la vie sociale", admet Bernard Gilly le PDG de Pixium Vision.

La start up a mis au point un implant qui se fixe à la surface de la rétine et stimule le nerf optique.
La start up a mis au point un implant qui se fixe à la surface de la rétine et stimule le nerf optique. © Pixium Vision

Actuellement en phase d’essais cliniques, cette technologie révolutionnaire devrait être commercialisée en 2015 en Europe puis en 2018 aux Etats-Unis. Les 34,5 millions d’euros levés en Bourse devraient aider le spécialiste des implants rétiniens à poursuivre ses recherches. A terme, le défi est immense: il s’agit de redonner la vue aux aveugles de naissance. 

> Le test sanguin qui détecte le cancer du poumon

Pour la première fois au monde, une équipe médicale a réussi à prédire un cancer du poumon avant même qu’il ne soit visible. Cette découverte considérable dans la lutte contre le cancer a été faite par l’équipe du professeur Hofman au CHU de Nice. Le suivi pendant 5 ans d’un groupe de 245 sujets fumeurs leur a permis de déceler dans le sang de 5 patients des cellules cancéreuses, qui étaient invisibles sur un scanner. Opérés immédiatement, aucun des patients n’a été victime de récidive. C’est bien la preuve que plus le cancer est détecté tôt, plus la prise en charge est efficace et plus les chances de survie augmente. 

Des médecins ont réussi à prédire un cancer du poumon avant même qu’il ne soit visible.
Des médecins ont réussi à prédire un cancer du poumon avant même qu’il ne soit visible. © Boris Horvat - AFP

Derrière cette avancée médicale, il y a aussi Patrizia Paterlini-Bréchot, la chercheuse qui conçoit et commercialise les tests de dépistage du cancer du poumon. Consciente qu’il faut du temps et de l’argent pour faire avancer la science, elle a fondé Rarecells Diagnostics. Ce partenariat public privé entre l'Inserm, l'université Paris-Descartes et l'AP-HP lui permet de garder la main sur les recherches tout en cherchant des financements. Prochaine étape: l’étude clinique qui doit permettre de vérifier l’efficacité du test de dépistage auprès de 5.000 patients. Et les espoirs sont énormes: à l’avenir ce test sera capable de diagnostiquer tout type de cancer. 

> La piqûre qui ne fait pas mal 

L’innovation est un travail de longue haleine, qui peut coûter très cher. Pour trouver une alternative à la seringue, Patrick Alexandre, le PDG de Crossject a englouti, en 12 ans de recherche, 60 millions d’euros d’investissements et frôlé plusieurs fois le dépôt de bilan. Son obstination, couplée au soutien sans faille du fonds d’investissement Gemmes Venture, a fini par payer. Il a mis au point Zeneo, le premier dispositif d'administration sans aiguille, qui propulse le médicament à travers les orifices de la peau en moins d'un dixième de seconde. Ça ne fait pas plus mal qu’un petit pincement. Cette technologie miniaturisée est protégée par 400 brevets et vendue clé en main à l'industrie pharmaceutique. 

Ça ne fait pas plus mal qu’un petit pincement.
Ça ne fait pas plus mal qu’un petit pincement. © Crossject

Plutôt que de travailler sur les affections de masse comme la grippe, la PME dijonnaise cible les maladies chroniques de longues durée ou les chocs allergiques: piqûres de guêpes, allergie aux cacahuètes. Finies les erreurs de dosage, l’utilisateur peut se traiter lui-même facilement grâce à ce système à usage unique et pré-rempli. C’est très prometteur quand on sait que 7 à 22% de la population souffre de phobie complète devant une aiguille. Les essais cliniques sont en cours, le système d’injection sera disponible en pharmacie dès 2015, pour quelques dizaines d’euros. Des ventes devraient permettre à Crossject de dégager des bénéfices d’ici à la fin 2016. 

> Le bras qui opère le cerveau et la colonne vertébrale

Sacré il y a 2 ans, le 4ème entrepreneur le plus innovant de la planète, Bertin Nahum, le PDG de Medtech, poursuit sa conquête du monde. Après l’Europe et les Etats-Unis, son robot spécialiste du cerveau, sera bientôt commercialisé en Chine. Pour les opérations invasives du cerveau, les neurochirurgiens pourront s’appuyer sur Rosa Brain, le bras armé à la précision millimétrique. Cette année, la société montpelliéraine a également décidé de s’attaquer au "mal du siècle", le dos. Rosa Spine, son dernier né, permet d’opérer en toute sécurité les chirurgies de la colonne vertébrale. 

Pour les opérations invasives du cerveau, les neurochirurgiens pourront s’appuyer sur Rosa Brain.
Pour les opérations invasives du cerveau, les neurochirurgiens pourront s’appuyer sur Rosa Brain. © Boris Horvat - AFP

A 300 000 € l’unité, le robot devrait représenter plus de la moitié des ventes de la biotech. Il faut dire que le marché est énorme: le rachis concerne 700.000 opérations dans le monde chaque année dont 50.000 en France. A la fois ingénieur et entrepreneur, Bertin Nahum fait face à un double défi: rester à l’affût des évolutions technologiques en matière médicale tout en cherchant les capitaux nécessaires pour rester dans la course à l’innovation. L’entrée en bourse a déjà permis à Medtech de lever 20 millions d'euros l’an passé. 

Des jambes pour les myopathes

Redonner la mobilité aux 30.000 paraplégiques français, telle est l’ambition de Wandercraft. La start-up, fondée par trois anciens élèves de Polytechnique, a développé une structure motorisée qui se fixe sur les jambes des invalides. Pas besoin de béquilles ou de manettes de contrôle, c’est l’utilisateur lui-même qui enclenche la marche en penchant son buste. L’exosquelette se contrôle de manière intuitive grâce à des capteurs de mouvement. Les personnes souffrant de problèmes de mobilités (myopathes, âgées) retrouvent ainsi la sensation de se déplacer presque normalement, de se lever, s’asseoir, tenir debout, sans assistance et sans fauteuil roulant. 

L’exosquelette se contrôle avec le buste grâce à des capteurs de mouvement.
L’exosquelette se contrôle avec le buste grâce à des capteurs de mouvement. © Wandercraft

Pour l’instant, seules des personnes valides ont testé l’exosquelette. Reste à passer du prototype à la réalité, un processus long et très gourmand en capitaux. Xavier Niel a investi en novembre dernier près de 300 000 euros dans la jeune pousse qui réunit des profils complémentaires (mécaniciens, informaticiens et programmateurs) mais un nouveau tour de table sera nécessaire pour financer les essais cliniques prévus mi-2015. Ce n'est qu'en 2016 que l'innovation sera mise à la disposition des centres de soin puis des particuliers.

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"L'homme qui vivra mille ans existe déjà" "En 2030, le cancer sera devenu une maladie chronique"

Charlyne Legris