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Rillettes, saucisses et pâtés n'ont plus la cote chez les Français

Depuis trois ans, les Français mangent moins de charcuterie. Ils délaissent notamment les premiers prix et les produits les plus gras, pour des charcuteries plus qualitatives.

Les Français abandonnent peu à peu les charcuteries. En 2017 - et pour la troisième année consécutive - le volume de jambon, saucisses, andouilles...consommé par les Français a diminué de 0,7 %, selon des données de la Fict, la fédération professionnelle représentative des industries charcutières.

Principales victimes de ce désamour des Français, les andouilles et andouillettes, qui enregistrent une baisse de -7.8% en 2017, les rillettes (-3,6%), les pâtés (-5,5%), le boudin (-2.8%) et les saucisses (-2,6%). Même les ventes du classique jambon cuit, qui représente 21% des volumes de charcuterie, baissent de 2%. 

Ce sont surtout les marques premiers prix qui cumulent perte de clientèle et d'achat. Elle ne représentent plus que 14,3% des ventes contre 15,1% l'an dernier. Les marques nationales restent leader, avec 54% des ventes comme en 2016. 

Des entreprises en difficultés

Pour les industriels, la production plafonne à 1,2 million de tonnes (-0,1%) et le chiffre d’affaires du secteur recule de 0,5% pour s'établir à 6,7 milliards d’euros. Seul point positif, l’exportation qui a progressé de 2,8%. Mais les gains sont infimes. Les ventes à l’étranger ne représentent que 166.000 tonnes, dont 70% dans l’Union européenne.

Conséquence: une entreprise sur cinq est en difficulté, soit 62 entreprises sur 310 établissements qui emploient 37.000 personnes. Une a déjà jeté l’éponge. Il s’agit de Jean Caby, cette entreprise du Nord presque centenaire dont la liquidation judiciaire a entraîné le licenciement de 232 salariés.

Pour la Fict, il est temps de faire quelque chose pour renverser la tendance avant que les choses ne s’aggravent. Comment ? En "réenchantant les charcuteries françaises". En 2015, une étude d’OpinionWay pour la Fict indiquait que pour 65% des Français, la charcuterie étaient synonyme du savoir-faire des régions et près de 9 français sur 10 "seraient affectés par la disparition des charcuteries". C'était il y a seulement 3 ans.

La fédération vient de dévoiler une stratégie ambitieuse à la fois pour rassurer les consommateurs, s’adapter à de nouvelles exigences alimentaires et leur redonner le plaisir des bonnes choses. Elle désire faire évoluer le "Code des Usages de la Charcuterie pour répondre aux attentes sociétales en termes de nutrition, santé, environnement, qualité des produits".

Rompre avec les nitrites

Tout d’abord, la filière a l’intention de réduire l’utilisation de sel et de nitrites d'ici la fin 2019. Actuellement le taux est de 120 mg/kg. Il devrait baisser à 80 mg/kg en seulement un an. Parallèlement, la Fict lance avec l'Inra (Institut national de la recherche agronomique) et l'Institut technique du porc (IFIP) un programme de recherche de 2,5 millions d’euros pour éliminer les risques de cancers liés aux nitrites.

Il était temps. En 2015, un rapport du Centre international de recherche sur le cancer (Circ) affirmait que les risques de cancer colorectal augmentent de 18% en ne consommant que 50 grammes de charcuterie par jour. En cause, la toxicité du sel nitrité que les industriels ajoutent dans leurs produits. En 2017, le livre de Guillaume Coudray a ébranlé les consommateurs avec un titre choc : "Cochonneries, comment la charcuterie est-elle devenue un poison". A cela s’est ajouté les scandales dans les abattoirs, les maladies cardio-vasculaires et l’envie des Français de manger mieux et surtout de réduire leur consommation de viandes.

Reste aussi à redonner aux clients le goûts des bonnes choses préparées dans les règles de l’art en s’adaptant aux nouvelles habitudes alimentaires. "Le plaisir n’est aujourd’hui plus le seul facteur entrant en compte dans le processus d’achat", reconnait la Fict. "L’augmentation des repas hors domicile (30% des repas) est une aubaine pour les produits charcutiers qui peuvent se consommer partout (sandwicheries, restaurants, cafés et bistrots, cantines …). Par ailleurs, de nouveaux circuits de consommation, plus courts et plus connectés, émergent et séduisent de nombreux consommateurs, notamment les jeunes". 

Enfin, la Fict veut inciter les professionnels à développer les produits de qualité. "Il est essentiel de valoriser les produits, via la mise en avant de produits labellisés (Bio, Label Rouge, IGP, …)", signale la fédération dans un communiqué en précisant qu’actuellement, ils ne représentent que 15% des ventes mais gagnent des parts de marché. Les filières "qualité" comme le bio, ou les marques de distributeurs "terroirs" sont en croissance de 14,6% en 2017. 

Pascal Samama
https://twitter.com/PascalSamama Pascal Samama Journaliste BFM Éco