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Safran face au défi industriel du plus grand télescope du monde

Le groupe, via sa filiale Safran Reosc, a inauguré l'usine dédiée à la fabrication des segments du futur télescope européen ELT. Un chantier qui permettra, dès 2025, de faire un pas de géant dans la recherche d'exoplanètes et d'une éventuelle vie extraterrestre. Pour Safran, c'est avant tout un challenge industriel avec une cadence effrénée pour tenir les délais.

Voilà plus de 20 ans que l'Observatoire européen austral (ESO), un consortium de pays européens, attendait ce moment. Mardi, Safran Reosc (Electronics & Defense), filiale du géant français, a inauguré mardi son usine de Poitiers, dédiée à la fabrication des segments du futur télescope européen ELT, pour Extremely Large Telescope.

Imaginée en 1998 par l'ESO, la construction de ce "monstre" de 85 mètres de diamètre a longtemps été reportée, faute de moyens. Installé sur la terre ferme et non dans l'espace, l'ELT a finalement vu sa première pierre posée en 2017, sur un sommet de 3.000 mètres d'altitude au Chili, là où le ciel dégagé offre les meilleures perspectives pour les télescopes terrestres.

Observer les exoplanètes

Concrètement, la mise en service de l'usine de Safran est le véritable début du chantier puisque le groupe français sera chargé de concevoir l'outil central du télescope, un miroir de 39 mètres de diamètre, composé de 798 segments hexagonaux d'1,5 mètre de long. À titre de comparaison, les miroirs des plus grands télescopes actuels ne dépassent pas les 10 mètres de diamètre.

Ce fameux miroir va capter la moindre lumière, invisible à l'œil nu, dégagée par les étoiles et les planètes lointaines. En utilisant la spectrométrie, il pourra même déterminer la composition des atmosphères lointaines et éventuellement en déduire la présence potentielle de vie extraterrestre.

Un travail au nanomètre

Un projet pharaonique permis par les progrès industriels en matière de miroirs segmentés. Mais aussi un vrai défi puisque chaque segment doit être aligné à l'échelle du nanomètre (0,000001 mm) pour fonctionner parfaitement. Pour rendre compte de la précision, le groupe aime indiquer que les éventuels défauts auront la taille d'une coccinelle… si le miroir avait la taille de la France.

Pour y parvenir, l'usine de 5.000 m² est dotée "de plusieurs robots et cellules de fabrication automatisées et interconnectées permettant de réaliser avec rapidité, précision et fiabilité l'ensemble des opérations de polissage" indique Safran dans un communiqué.

Un travail d'orfèvre à une cadence effrénée. Alors que ce type de segment est généralement fabriqué en plusieurs semaines, Safran aura la lourde tâche d'en produire un quotidiennement pour tenir les délais. La "première lumière" de ce joyau à un milliard d'euros est attendue pour 2025.

Thomas Leroy avec Jean-Baptiste Huet