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Transports

Safran toujours pas rassuré par Zodiac

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- - ERIC PIERMONT / AFP

Le groupe aéronautique va prendre plus de temps que prévu pour étudier les comptes de Zodiac. L’ambiance reste très tendue entre les deux groupes.

Safran prend son temps. Le groupe aéronautique n’a pas encore été rassuré par la santé financière de Zodiac, qu’il a proposé de racheter en janvier dernier pour près de 10 milliards d’euros. Mi-mars, le fabricant de sièges pour avions a publié, à la surprise des marchés et de ses actionnaires familiaux, un dixième avertissement sur ses résultats. Des retards de livraisons qui feront plonger les marges de 10% en 2017 alors que Zodiac les attendait en hausse de 10%. Une nouvelle qui a sérieusement plombé les discussions en cours avec Safran.

Depuis, le directeur général de Safran, Philippe Petitcolin, a mandaté le cabinet Deloitte pour mener un audit financier indépendant. Ces dernières semaines, il a entrepris de nombreuses visites d’usines de Zodiac. Et selon nos informations, ces inspections prennent plus de temps que prévu. Pour le moment, la direction de Safran n'estime pas avoir assez d’informations pour prendre une décision finale, que ce soit une nouvelle offre ou un abandon du projet de rachat.

Il y a un mois, le groupe ambitionnait de formuler une nouvelle proposition, revue à la baisse compte tenu des marges en recul, à l'occasion des résultats semestriels de Zodiac qui devaient être publiés jeudi 20 avril. Leur report d'une semaine, au vendredi 28 avril, illustre ce besoin, pour les deux groupes, de prendre leur temps pour clarifier sa situation. Zodiac n'a, cette fois, plus le droit à l'erreur.

Décision espérée d'ici mi-mai

Les analyses se poursuivent et une décision pourrait intervenir entre fin avril, à l'occasion des résultats de Zodiac, et la mi-mai. Un délai supplémentaire que d’aucuns interprètent comme une extrême prudence de Safran. Voire un possible pas en arrière si la décision intervenait après les élections présidentielles. Quoi qu'il en soit, le groupe aéronautique n'a toujours digéré le dernier avertissement sur résultats de sa proie.

En janvier dernier, les retards de livraisons étaient déjà connus puisque Zodiac avait passé neuf alertes sur ses résultats depuis deux ans. Mais à l’époque, Zodiac avait assuré avoir fait toute la lumière. Safran considérait qu’il s’agissait surtout d’un problème d’organisation et d’industrialisation lié à la succession de PME rachetées par l’équipementier depuis plusieurs années. Un obstacle que le groupe dirigé par Philippe Petitcolin pensait surmonter grâce à ses processus industriels bien rôdés.

Les grands clients grognent

Sauf qu’entre-temps, d’autres mauvaises nouvelles se sont accumulées. L’avertissement sur résultats de mars dernier a cristallisé les problèmes de gouvernance et de remontée de l’information au sein de Zodiac. Même les familles fondatrices, détenant 24% du capital, pensaient que les comptes avaient été purgés depuis les résultats annuels 2016 annoncés en novembre dernier. Preuve de l’ambiance extrêmement tendue dans les deux camps, beaucoup se demandent si les derniers retards ont été dissimulés par la direction de Zodiac. Et si l’entreprise ne risque pas d’afficher un nouvel avertissement sur résultats.

Cette fois, les résultats semestriels publiés fin avril devront être d'une totale transparence si Zodiac espère un mariage avec Safran. L’entreprise rencontre aussi une salve de déconvenues de la part de grands clients. Airbus a retiré les sièges de Zodiac de ses catalogues pour certains avions quand Boeing a introduit ceux de concurrents. Et la compagnie aérienne américaine United Airlines a, dès le lendemain de l’avertissement sur résultats de mi-mars, exprimé son mécontentement sur son fournisseur. Des arguments que le fonds d’investissement TCI, actionnaire de Safran et opposé au rachat de Zodiac, n’a pas manqué de reprendre pour convaincre les autres actionnaires de suivre sa démarche.

Matthieu Pechberty