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Sans communauté, la fin des marques ?

Les rencontres de l'Udecam ont réuni jeudi 6 septembre les professionnels des médias Salle Pleyel à Paris.

Les rencontres de l'Udecam ont réuni jeudi 6 septembre les professionnels des médias Salle Pleyel à Paris. - Aurélie Planeix

Le monde de la pub et des annonceurs est en pleine révolution, contraint de s'adapter à marche forcée à l'avènement du digital qui bouleverse tous les modes de communication habituels. Mais le digital laisse bien sûr place à des opportunités nouvelles aussi formidables qu' impitoyables, avec au centre un nouvel acteur stratégique : la communauté.

En plaçant les nouvelles communautés au coeur de ses 12ème rencontres, ce jeudi, à Paris, l'Union des entreprises et conseils en achat média (Udecam) voulait sans doute lancer un avertissement : il va falloir s'adapter, et vite, sous peine de disparaître. Un sentiment d'urgence, renforcée par l'arrivée des assistants vocaux. «Demain, dira-t-on Alexa achète-moi des piles ou Alexa achète-moi des Duracell?», s'interroge Raphaël de Andreis. Le président de l'Udecam poursuit : «avec ce nouveau média sans packaging, ni linéaire, ni même site internet visible, comment une marque peut-elle survivre si elle n'a pas su fédérer une communauté de consommateurs, prête à la suivre quel que soit le média ?». L'enjeu est donc de taille.

La puissance des communautés et des réseaux sociaux

Aujourd'hui les trois quarts des Français appartiennent à une communauté, selon Kantar. Et la moitié d'entre eux sont prêts à s'engager dans une communauté créée par une marque. Un sentiment d’appartenance qui s’explique souvent par une passion commune : le sport et les loisirs au premier rang. «Les personnes qui suivent des comptes liés à la nourriture consultent Instagram 18 fois par jour en moyenne!», souligne Gord Ray, responsable d'Instagram pour l'Europe du Nord, et «80 % des instagrameurs suivent au moins un compte business». Cela laisse imaginer la force de frappe potentielle d’une marque qui sait s’adresser à sa communauté.

Et en effet, le digital permet aux marques de communiquer directement avec les consommateurs de façon personnelle tout en en ciblant une communauté affinitaire. Mais comment constituer une communauté quand on part de zéro? C’est le défi qu’a relevé Alpine pour la renaissance de la marque.

L'exemple d'Alpine

«Vous avez déjà observé une nuée d’étourneaux ? Une communauté synchronisée qui évolue ensemble et à l’intérieur de laquelle se trouve des sous-groupes d’une poignée d’individus. Eh bien les communautés humaines fonctionnent exactement de la même façon,» explique Bruno Breton, le fondateur de Bloom, start-up française d’intelligence artificielle spécialisée dans l’analyse stratégique et qualitative des réseaux sociaux. A partir de là, il a identifié avec Alpine et son agence Havas Paris, les différents groupes potentiellement intéressés par la relance de la marque : les fans de voiture, de vintage et de sport automobile. Puis ils ont identifiés des groupes corrélés, autour des montres, de la technologie ou encore des voyages. Des contenus éditoriaux dédiés leur ont été adressés afin d'animer et d'agréger une communauté. Le résultat commercial a été au rendez-vous : 3 000 précommandes en 24 h. Pour une marque disparue depuis plusieurs décennies, ça relève de l'exploit.

«La transformation digitale a profondément modifié la relation entre les marques et le consommateur,» explique le sociologue Stéphane Hugon. «Ce qui fait la connaissance du marché n'est plus la connaissance du consommateur individuel, mais la connaissance de la communauté. La communauté devient alors un événement dont l'organisateur est la marque». Comme le résume Raphaël de Andreis : «les communautés ouvrent un terrain de jeu extraordinaire pour inventer et créer du lien avec les marques». A elles maintenant d'en saisir l'opportunité.

Aurélie Planeix