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SNCF: avec 1 conducteur sur 3 en grève, vos vacances pourraient bien être gâchées

Parmi les 13.500 conducteurs (soit 9% des cheminots, selon des chiffres de 2017)  le taux de grévistes est rarement descendu en-dessous de 50% depuis le début de la grève le 3 avril 2018.

Parmi les 13.500 conducteurs (soit 9% des cheminots, selon des chiffres de 2017) le taux de grévistes est rarement descendu en-dessous de 50% depuis le début de la grève le 3 avril 2018. - Mehdi Fedouach-AFP

Même si leur taux de grévistes a baissé à son niveau le plus bas ce 22 juin, à 37,9%, les conducteurs SNCF restent les cheminots les plus mobilisés. Accordant majoritairement leurs suffrages à la CGT et à Sud-Rail, syndicats les plus radicaux, ils gardent un pouvoir de nuisance menaçant de perturber les départs en vacances.

Les conducteurs résistent encore et toujours à la réforme ferroviaire adoptée par le Parlement. Depuis le début du mouvement de grève à la SNCF, le 3 avril, contre la réforme ferroviaire, cette catégorie de cheminots affiche les taux de mobilisation les plus élevés.

Parmi les 13.500 conducteurs (soit 9% des cheminots, selon des chiffres de 2017) le taux de grévistes est en 3 mois de mouvement social, rarement descendu en-dessous de 50% au sein de cette catégorie professionnelle.

Ce 22 juin, 37,9% des conducteurs sont en grève, le taux certes le plus bas depuis le début du mouvement, mais il restait plus élevé que celui des contrôleurs (31,6%) et des aiguilleurs (14,2%). Le taux global, tous métiers confondus, est même descendu en-dessous de 10% ce vendredi 22 juin, selon les chiffres communiqués par la SNCF.

"Le succès de la grève repose sur les épaules" des conducteurs, estime Dominique Andolfatto, professeur de science politique et spécialiste des syndicats. "C'est la profession phare de la SNCF, l'équivalent des pilotes d'avion d'Air France. Ils considèrent qu'ils doivent montrer l'exemple et avoir un rôle d'entraînement". "A la SNCF, il suffit que les conducteurs, les aiguilleurs, un certain nombre de métiers stratégiques soient mobilisés et on bloque complètement la circulation des trains", rappelle Eric Dhenin, chargé de l'encadrement des conducteurs et cadre à la CFDT Cheminots.

Plus de 900 TGV roulent les week-end de départs en vacances

Ce pouvoir de "nuisance" ajouté à leur capacité de mobilisation font peser une menace sur la bonne circulation des trains durant les vacances d'été. La CGT et sans doute SUD-Rail, prévoient de poursuivre le mouvement social après le 28 juin, terme de la longue séquence de grève entamée le 3 avril. Or, lors des élections interprofessionnelles de 2015, les conducteurs ont voté majoritairement pour ces deux syndicats, les plus opposés à la réforme ferroviaire. La CGT est arrivée en tête de leurs votes (35% - en dessous de la moyenne de 42% sur l'ensemble des cheminots), devant SUD-Rail (30% - taux le plus haut enregistré sur l'ensemble des cheminots) et la CFDT (20% - également le taux le plus élevé), laquelle n'a pas prévu d'appeler à la grève cet été.

La SNCF précise que durant les grands week-ends de départ en vacances, comme ceux qui se profilent les 7 et 8 et 14 et 15 juillet 2018, plus de 900 TGV sont programmés contre 700 en période normal. Compte tenu ce ces volumes de train au départ, un mouvement de grève éventuel lancé ces jours de pointe conjointement par la CGT et Sud-Rail, pourrait entraîner des annulations. Face à ce type de situation, la SNCF s'est organisée durant le mouvement social de trois mois, ne mettant en vente que des billets pour des trains dont elle est sûre qu'ils pourront circuler. Un dispositif qu’elle pourrait reconduire en cas de grève en juillet.

Une corporation soudée par les luttes sociales du passé

Outre l'opposition à la réforme ferroviaire, la persistance de la mobilisation des conducteurs tient à des facteurs propres à cette corporation très soudée. Pour Eric Dhenin, cadre à la CFDT Cheminots, les conducteurs ont une "capacité de mobilisation ancienne, forte, inscrite". Pour lui, le poids des syndicats s'explique par les avancées sociales gagnées au cours de décennies de "luttes", citant notamment les grandes grèves de 1986 et 1987.

"Il y a eu une évolution tant sur les compensations salariales que la qualité de vie au travail. Maintenant les découchées (nuits passées en dehors du domicile) se font dans des endroits plus confortables", explique-t-il. La rémunération a été au coeur de nombreuses revendications. Aujourd'hui, un conducteur perçoit environ 2.300 euros net en début de carrière. Pour Vincent Schaller, secrétaire régional SUD-Rail à Strasbourg, cette rémunération permet à certains conducteurs de tenir dans la durée du mouvement: "le niveau salarial est un peu plus élevé que sur la moyenne des cheminots, donc ça nous permet de faire plus grève qu'un cheminot sédentaire qui gagne 1.200 euros par mois."

Frédéric Bergé avec AFP