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Sonder l'humeur des salariés, pour quoi faire?

Plusieurs start-up proposent de mettre en place des questionnaires pour sonder l'humeur des salariés.

Plusieurs start-up proposent de mettre en place des questionnaires pour sonder l'humeur des salariés. - evondu - CC

C'est parfois en posant des questions anodines que l'on peut identifier les réelles attentes des salariés, voire identifier des problèmes latents. Plusieurs start-up proposent de sonder les salariés pour évaluer leur bien-être mais aussi aider les entreprises à mieux cibler leurs décisions.

"Bonjour, comment ça va?". Ce n'est pas en posant cette question à la cantonade qu'un manager ou un responsable RH peut réellement savoir si les équipes se sentent bien au sein de leur entreprise. Or connaître le ressenti de ses salariés est essentiel pour détecter les signaux faibles qui peuvent nuire à la qualité de vie au travail, ruiner leur motivation et au final, peser sur le développement de l'entreprise.

Plusieurs start-up proposent aux employeurs de prendre le pouls de leurs salariés au travers de questionnaires. Un rendez-vous régulier quasi absent dans le modèle de management actuel. "Le système de l'entretien individuel annuel n'est pas satisfaisant pour créer du lien et connaître avec précision les besoins, le ressenti des salariés. Souvent le collaborateur n'en voit pas l'utilité et vit cela comme une contrainte", estime Christophe Bergeon, cofondateur de ZestMeUp. Ces questionnaires permettent aux salariés de s'exprimer à cœur ouvert car ils sont anonymes. Le salarié reçoit dans sa boîte mail un lien qui le mène vers la plateforme de questionnaires.

Un taux de réponse élevé

"C'est un outil qui a vocation à transformer le dialogue, on crée des discussions, on fluidifie le échanges", souligne Charles de Fréminville, cofondateur de Bloom at work. Pour sa part, Christophe Bergeon y voit un autre intérêt: "Ce genre de questionnaires permet d'éviter que ce soit celui qui parle le plus fort qui soit entendu".

Preuve que ces questionnaires répondent à un besoin: les salariés adoptent volontiers cette routine, le taux de réponse tournant autour de 70% à 80%, assurent les entrepreneurs. "Les gens sont bienveillants, cela se voit au travers des commentaires qui sont déposés pour enrichir les réponses, ils sont constructifs, ils cherchent à apporter des réponses", souligne Kevin Bourgeois, cofondateur de Supermood.

Identifier les attentes réelles

Mais que recherchent les entreprises qui font appel à ces testeurs d'humeur? Les applications sont multiples puisque les sondages sont élaborés au cas par cas, soit avec des questions tirées de bases de données soit conçues sur mesure. Des groupes ayant des effectifs importants ou qui sont répartis sur plusieurs sites, y voient le moyen de rester en contact avec le "terrain". Il y a aussi des managers qui souhaitent améliorer le bien-être de leurs équipes, et cherchent à évaluer si leur charge de travail est correcte, s'ils sont satisfaits de leurs missions, si sur le plan relationnel tout se passe bien entre collègues et manager…

Ces sondages permettent notamment d'identifier les attentes réelles des collaborateurs et les leviers d'engagement en fonction des services. "Cela permet de décider des orientations budgétaires. S'il s'avère que les salariés ont surtout besoin de reconnaissance, cela ne servira à rien de leur offrir des beaux locaux tout neufs pour favoriser leur engagement", cite en exemple Kevin Bourgeois.

Cela évite aussi aux services RH de faire fausse route. "Un client dans le secteur financier avait le projet de faire passer l'entretien annuel à un rythme mensuel. Au lieu de passer 6 mois à développer le projet et le présenter aux salariés, il a eu l'idée d'interroger les principaux concernés. 100% des salariés ont répondu non", cite en exemple Sophie Morel, cofondatrice de Linkky.

Accompagner lors de plans de transformations

Au travers de questions anodines, la direction peut aussi mettre au jour un problème dont elle ne soupçonnait pas l'existence. Une PME a ainsi demandé à Supermood d'établir un questionnaire sur les fournitures de bureau. La direction voulait savoir lesquelles acheter en priorité. "80% des répondants demandaient une lampe de bureau. Les salariés travaillaient dans la pénombre et jamais personne ne s'en était aperçu", raconte Kevin Bourgeois.

Une bonne partie des entreprises adoptent ces sondages lorsqu'elles mettent en place des plans de transformations, qu'il s'agisse de regrouper des services, d'effectuer des changements de stratégie ou encore d'entrer dans de nouveaux locaux. Ce dernier exemple est souvent cité par les créateurs de ces entreprises de sondage, car cela peut s'avérer un moment critique, surtout quand il s'agit de quitter son bureau confortable, pour passer à l'open space. "La décision est prise, mais il était toujours possible d'améliorer l'organisation imaginée par la direction", met en avant le cofondateur de Zest Me Up. Dans ce cas, il s'agit de faire remonter les idées d'aménagement, les besoins en matériel pour s'isoler du bruit. Autrement dit, trouver des solutions pour "arrondir les angles" et anticiper les conflits, résume Christophe Bergeon.

Augmenter l'engagement des salariés

Pour être efficace, ces questionnaires doivent se faire régulièrement, sur au moins 6 mois lorsqu'il s'agit d'accompagner un changement, le plus souvent sur un an. Il faut également que les entreprises effectuent des retours, soit au travers de baromètres de la bonne humeur, soit en menant des actions concrètes. C'est l'assurance de voir augmenter l'implication des salariés car ils se sentent acteurs de leur entreprise.

Mais surtout la direction doit penser à communiquer sur les actions déployées. Sous peine de voir leurs efforts sans effet. Supermood a une anecdote qui illustre bien cette nécessité. "Suite aux remontées d'un questionnaire faisant état d'un niveau de stress et de fatigue élevé dans ses équipes, une entreprise a investi dans la création d'une salle de sieste. Mais au bout de quelques semaines, ses managers s'étonnaient de sa faible utilisation", relate Kevin Bourgeois. Un nouveau questionnaire a été mis en place pour savoir pourquoi les salariés boudaient cet espace. La réponse? Ils en ignoraient tout simplement l'existence. 

Coralie Cathelinais