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Comment les stades engloutissent l'argent des contribuables

Jusqu'en 2013, l'Etat versait 12 millions d'euros à Vinci et Bouygues, en charge de la gestion du Stade de France.

Jusqu'en 2013, l'Etat versait 12 millions d'euros à Vinci et Bouygues, en charge de la gestion du Stade de France. - -

Le modèle du partenariat public-privé s'est développé un peu partout en France pour la construction des grands stades. Mais au final, les pouvoirs publics sont souvent les seuls à payer l'addition.

Au foot, ce sont souvent les contribuables qui perdent. En particulier lorsqu’il s’agit de construire un stade. Samedi 27 juillet, l'Olympique lyonnais a bouclé le financement de son stade sans faire appel aux pouvoirs publics. Pour l'occasion, Pierre Moscovici, le ministre de l'Economie et des Finances, se déplacera à Lyon, mardi 30 juillet, afin de saluer cette initiative. Mais celle-ci reste un exemple largement isolé.

Ailleurs, en vue de l’Euro 2016, les cas de partenariats publics-privés (PPP) ont ainsi fleuri un peu partout en France. A Lille, Nice ou Bordeaux, ce montage, par lequel les collectivités (ou l’Etat) font appel à des prestataires privés pour financer et gérer une infrastructure, a été adopté.C’était aussi le cas du Stade de France, construit spécialement pour la Coupe du Monde 1998, ou encore de la fameuse MMArena du Mans.

Cette dernière illustre parfaitement les effets pervers que peuvent comporter les PPP.

Le Mans, la catastrophe

Initié en 2005, alors que le club du Mans aspirait à une place de choix parmi l’élite du football français, le projet a abouti en 2011, année de la descente du club en Ligue 2. Aujourd’hui, l’équipe a dégringolé jusqu’en national, puis a été reléguée administrativement en DH (6ème division).

Résultat : une ardoise de 49 millions d’euros pour les collectivités locales, dont 31 pour la ville du Mans. Le tout pour un stade qui ne sert plus à grand-chose, en dehors de quelques évènements ponctuels.

De plus, le club ne pouvant plus s’acquitter de son loyer (pourtant réduit de moitié), la municipalité devrait passer une nouvelle fois à la caisse, en vertu d’une clause d’"aléa sportif" contenue dans le PPP.

L'Etat versait 12 millions d'euros par an au Stade de France

Autre cas de figure: l’absence de club résident. Depuis sa sortie de terre en janvier 1998, l’Etat versait ainsi une compensation de 12 millions d’euros par an au consortium gérant le Stade de France Vinci et Bouygues). Mais l'actuelle ministre des Sports, ?Valérie Fourneyron, a mis un terme à ce versement en janvier dernier.

A Marseille, où les travaux de rénovation du Stade Vélodrome touchent à leur fin, c’est la redevance dont s’acquitte la ville qui inquiète : 23,5 millions d’euros par an pendant 31 ans.

Du coup, la municipalité demande un loyer largement revu à la hausse au club, de 8 millions par an. L’Olympique de Marseille, le club résident, a pour l’instant refusé. Mais il ne semble pas avoir vraiment le choix.

A Lille, la facture du Grand Stade devrait se révéler bien plus salée que prévu en raison, notamment, de l’application de taux actuariels élevés (le taux de rentabilité exigé par les investisseurs privés). 

Le partenariat conclu entre la Communauté urbaine de Lille et Elisa (filiale d’Eiffage) prévoit également une clause d’aléa sportif, comme au Mans. Une descente du Losc en Ligue 2 se chiffrerait en dizaines de millions d’euros de surcoût.

Bientôt un droit de regard des collectivités?

Tous ces cas de figure ont fini par interpeller les dirigeants politiques français.

Dans un rapport d’information, paru le 28 juin dernier, quatre parlementaires de toutes sensibilités (UMP, PS, PRG, PC) pointent du doigt les difficultés inhérentes au modèle public-privé.

Ils proposent ainsi de "confier l’exploitation des stades aux clubs par tous moyens juridiques adéquats , et d’engager la réflexion sur la possibilité de conclure, entre les clubs et les collectivités locales, des conventions s’inspirant des baux commerciaux et incluant des clauses-types qui garantiraient un droit de regard des collectivités sur l’utilisation sportive des infrastructures."

L'Olympique lyonnais et l'exemple du "privé-privé"

Une autre solution consiste, pour les clubs, à financer leur stade sans l’aide (ou presque) des autorités publiques.

C’est le cas de l’Olympique lyonnais et de son Stade des Lumières. Ce samedi 27 juillet, le financement a enfin été bouclé, au bout de six ans d’efforts, et les travaux devraient débuter le 1er aout. Le tout pour un coût total de 405 millions d’euros.

Le montage comprend 135 millions d'euros de fonds propres, un financement obligataire de 112 millions d'euros, un total de dettes bancaires et location financière de 144,5 millions, ainsi que des revenus garantis pendant la phase de construction pour environ 13,5 millions.

Avec l’avantage non négligeable pour l’OL d’être propriétaire de son stade. Et d’ainsi éviter au contribuable de faire les frais des "aléas" en tous genres.

Le titre de l'encadré ici

|||Le partenariat public privé en France

Il s'agit d'un modèle selon lequel "l’autorité publique fait appel à des prestataires privés pour financer la production de l’équipement et/ou du service. Le cas échéant, le prestataire privé peut aussi avoir la charge des taches de conception, d’entretien et d’exploitation.

Le partenaire privé reçoit en contrepartie des différentes missions qui lui sont confiées, le droit de percevoir une redevance auprès des utilisateurs de l’équipement ou du service, et/ou des concours publics de la part de l’autorité publique responsable du service public."

Source: Ministère du Développement durable

Yann Duvert