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Les start-up françaises sceptiques face au crowdfunding

Les start-up se sont donné rendez-vous au salon LeWeb (ici, le stand PowerOn)

Les start-up se sont donné rendez-vous au salon LeWeb (ici, le stand PowerOn) - -

Au salon LeWeb à Paris, on croise étonnamment peu de défenseurs -encore moins d’adeptes- du crowdfunding. Ce mode de financement alternatif, qui fait appel à la générosité collective des internautes, est pourtant désigné comme la nouvelle plateforme à succès…

Evidemment, le crowdfunding – que l’on prononce comme on peut quand on est francophone !-, tout le monde connaît dans le milieu des start-up et encore plus dans les travées du salon LeWeb dont c’est l’une des thématiques majeures.

Loïc Le Meur, organisateur de cet événement devenu incontournable dans les technos, était venu en parler sur BFM Business la veille de l’ouverture. "Créer une entreprise sur internet est de moins en moins compliqué, car vous avez besoin de moins en moins de fonds", avance-t-il convaincu. La donne a changé aussi grâce au principe du crowdfunding, explique Loïc Lemeur, qui consiste à "pré-vendre" une idée ou un produit en levant des fonds auprès des internautes.

Pour ce "french entrepreneur" parti s’épanouir à San Francisco, le crowdfunding permet de supprimer les intermédiaires dans le financement des entreprises.

Loin de leur réalité

L’exemple par excellence, c’est Kickstarter, la plateforme de collecte de fonds américaine, qui peut s’enorgueillir d’avoir fait émerger des projets palpitants. Comme SmartThings, qui connecte des objets à votre smartphone et vient d'annoncer une nouvelle levée de fonds de trois millions de dollars.

Un exemple génial, mais rare. Et assez loin de la réalité de nos jeunes patrons français installés dans le hall des start-up du salon…

C’est là que nous les avons rencontrés, mardi 4 décembre. C'était leur premier jour derrière leur micro-stand. Fiers de dévoiler leur dernière innovation ou leur projet en croissance, nourrissant l’espoir de signer avec un client, voire de séduire un gros investisseur.

Une blague ?

Le crowdfunding ? "C’est du bullshit", une blague autrement dit, lâche sincère notre premier interlocuteur. Les suivants seront moins directs mais tout aussi circonspects.

Surtout, tous considèrent que ce n’est pas fait pour eux. Pour un projet culture, pourquoi pas. Ou quelqu’un qui se lancerait totalement seul, sans un sou et qui ne connaîtrait personne… Va pour un mini-projet perso, mais pas pour du sérieux!

Lemeur plutôt que Hollande

Plus sérieusement, Sébastien Rousset, co-fondateur de PowerOn, venu présenter LicenceToBill, explique que ce dont a besoin une start-up, ce n’est pas uniquement d’argent mais aussi d’un investisseur d’expérience -celui qui saura vous mettre en contact avec le bon réseau. "Si j’avais le choix entre Lemeur et Hollande, je prendrais Lemeur comme investisseur, par exemple", sourit-il.

Discours proche deux stands plus loin, chez ChooseYourBoss.com. Benoit Guillou confirme que les ressources nécessaires à une start-up ne se limitent pas à l’argent: "On cherche un cadre, un businessman qui va avoir du recul sur le projet, mettre le doigt sur les priorités".

Une concession toutefois: "cela peut être intéressant pour construire sa communauté et sa visibilité, ou pour tester son idée auprès des internautes"...

Les fondateurs plus important que tout

Chez Taxibeat, une start-up européenne déjà bien lancée, même son de cloche: "Au début, ce n’est pas de fonds dont on a besoin. On a d’abord besoin de développer un bon produit avec une équipe de fondateurs solides". "D’ailleurs, le budget au départ, c’est les fondateurs qui l’apporte en général", insiste Nicky Adle, qui chapeaute la France chez Taxibeat. "Quand on en est au stade de monétiser son produit, là on va démarcher les business angels. Et ensuite les VC (venture capital)". Pas de crowdfunding donc.

Joel Bloch de Tag’By estime même que cela peut être gênant le crowdfunding, pour la "confidentialité du projet". "Tout mettre sur la table, alors qu’on ne sait pas qui on a en face", le laisse perplexe.

Pour trouver son premier client

On a toutefois réussi à mettre la main sur un défenseur de cette tendance. Michael Amar, CEO d’iFeelgoods, trouve que c’est "pas mal pour récupérer les 100 ou 200 K pour se lancer". "Cela peut permettre de trouver un partenaire aussi, voire d’attraper ses premiers clients. Et croyez-moi, c’est ce qu’il y a de plus dur!".

Michael Amar se dit que cela peut faire gagner du temps. Lui a passé deux mois non-stop pour rassembler au final 29 business angels et 1,5 million d’euros à coup de 25 ou 50 000 euros. "Dur, dur".

Aucun utilisateur du crowdfunding au final, tous ont préféré payer 6000 euros leur petit stand sur LeWeb, pour aller à la rencontre "physique" des investisseurs. Même monsieur "innovation" du prestigieux stand Paypal le dit: "le crowdfunding, c’est extraordinaire", mais "tout se fait par les rencontres"… Start-up du web ou pas, apparemment rien ne vaut un bon salon et la traditionnelle carte de visite.

Le titre de l'encadré ici

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Le franc-parler des start-up

On pensait recueillir quelques expériences de crowdfunding auprès des jeunes patrons présents sur LeWeb, on est reparti avec des avis bien tranchés, sans langue de bois. Si vous voulez en savoir plus sur ces start-up:

LicenceToBill
une solution de paiement développée par PowerOn

ChooseYourBoss
Une petite structure spécialisée dans le recrutement IT, créée au sein du Groupe Le Figaro

Taxibeat
Une appli pour trouver un taxi

iFeelGoods
Plateforme de promotion

Tag'By
Pour des campagnes de marketing social géolocalisée

Delphine Sabattier