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Suez prépare un lourd plan de cessions

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- - DOMINIQUE FAGET / AFP

Le groupe présentera le 2 octobre un plan stratégique visant à redresser son cours de Bourse. Un conseil d’administration s’est tenu mercredi pour décider quelles activités seront vendues. Trois filiales sont ciblées.

C’est l’heure des comptes pour Suez. L’entreprise de gestion d’eau et de déchets va présenter au mois d’octobre un nouveau plan stratégique de quatre ans, la durée du mandat de son nouveau directeur général Bertrand Camus, nommé en mai dernier. L’entreprise vient de passer deux années difficiles, ponctuées de résultats médiocres et de l’acquisition controversée de GE Water, la filiale de General Electric.

Ce mercredi s’est tenu un conseil d’administration décisif qui a entériné les grands axes du nouveau plan stratégique de Suez. Le groupe va orienter sa nouvelle feuille de route sur les clients industriels, désormais préférés aux municipalités, et l’international. Deux choix connus et, en réalité, déjà engagés. Mais le groupe va surtout annoncer une vague de cessions d’actifs sans précédents, poussé par le fonds activiste Amber, qui détient 1,9 % de son capital. L’investisseur estime que Suez est trop endetté et souhaite que sa dette de 9 milliards d’euros soit réduite d’environ 1,5 milliard d’euros. Amber souhaite surtout que le cours de Bourse de Suez progresse, notamment à travers un retour de cash d’environ 1 milliard d’euros aux actionnaires. Contactée, la direction de Suez n’a pas souhaité faire de commentaires.

Les Etats-Unis et l’Espagne en ligne de mire

C’est pour appliquer ce scénario financier que des cessions d’actifs de 2 à 3 milliards d’euros doivent intervenir. Selon plusieurs sources proches du groupe, trois activités sont ciblées par la direction de Suez. La première est la filiale américaine, United Water, qui a déjà vendu 20% de son capital l’an passé pour 600 millions de dollars. Sur cette base, le solde de 80% pourrait ainsi rapporter 2,4 milliards d’euros. En interne, certains s’interrogent sur la capacité de Bertrand Camus à vendre une filiale qu’il a dirigé pendant sept ans entre 2008 et 2015. D’autres assurent en revanche qu’"il n’est pas favorable à céder des petites participations mais préfère assumer des choix tranchés" explique un cadre. La vente de United Water est la plus probable, d’autant qu’elle est aussi poussée, selon plusieurs sources, par Gérard Mestrallet, l’ancien président de Suez et toujours administrateur.

En revanche, le débat est plus tendu sur la filiale espagnol Agbar qui connait des difficultés. Amber souhaiterait qu’elle soit vendue pour dégager du cash. Une décision difficile à prendre alors qu’Agbar a été la grande acquisition de l’ancien directeur général, Jean-Louis Chaussade, qui préside encore aujourd’hui Suez jusqu’en mai prochain. Là aussi, cette vente rapporterait entre 2,5 et 3 milliards d’euros. Pour les Etats-Unis comme pour l’Espagne, des ventes profiteraient de prix tirés vers le haut par les fonds d’investissement spécialisés dans les infrastructures qui regorgent d’argent. La Caisse des Dépôts et des Placements du Québec (CDPQ) est souvent citée comme un investisseur s’intéressant à ces métiers. Elle a déjà participé au rachat de GE Water avec Suez il y a deux ans.

Amber, le porte-voix d’Engie

Enfin, les activités de déchets (collecte et recyclage) en Europe sont aussi dans la ligne de mire, à l’exception de la France qui est le cœur historique du groupe. Les pays ciblés sont les Pays-Bas, la Belgique et l’Allemagne, qui connait des difficultés, pour un total d’un milliard de chiffre d’affaires. Une introduction en Bourse de la filiale australienne avait déjà été étudiée par le passé et pourrait de nouveau l’être dans un avenir plus lointain.

Ce plan de vente d’actifs devrait en tout cas satisfaire Amber. Demandes qui laissent Engie, le premier actionnaire de Suez -de loin avec 32%-, sans voix. Depuis un an, le groupe n’a jamais réagi aux demandes insistantes du fonds activiste. Ce qui commence à faire jaser en interne. "Le silence assourdissant d’Engie est un soutien implicite à Amber" décrypte un cadre de Suez, "laisser faire plutôt que d’impulser leur évite de provoquer une crise avec nous". Son premier actionnaire a souscrit, il y a deux ans, une augmentation de capital à 15 euros par action qu’il n’a toujours pas rentabilisée alors que le cours de Suez oscille autour de 13 euros.

"Ce nouveau plan est bien nécessaire", insiste un proche d’Engie. "Amber pose de bonnes questions et leur pression est utile". A long terme, Amber joue la carte d’un rachat à 100% de Suez par Engie ou, au contraire, d’une vente avec, dans les deux cas, une plus-value à la clé. Et dans les deux cas, Suez doit avant tout passer par une phase de restructuration financière que son actionnaire Engie, soutient de facto.