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Vie de bureau

Tout se dire, une forme saine de management?

L'Américaine Kim Scott soutient qu'il faut dire à ses collègues tout ce que l'on n'apprécie pas dans leur travail ou leur comportement. Cette approche, baptisée Radical Candor, vous permettrait de sentir que les autres se soucient de vous et de vous améliorer.

Habituellement, quand vous avez une remarque à faire à l'un de vos collègues, vous prenez des pincettes pour le lui dire. Mais ce n'est peut-être pas la meilleure manière de conserver de bonnes relations et de créer un univers de travail sain. Kim Scott, une sorte de gourou américaine du management qui a fait ses armes chez les plus grands noms de la Silicon Valley, prône une solution plus rentre-dedans: la "Radical Candor", soit littéralement la franchise radicale, sur laquelle elle s'apprête à sortir un livre. Autrement dit, si vous trouvez quelque chose à redire sur le travail ou l'attitude d'un collègue, il faut lui dire ouvertement et rapidement.

Le déclic est venu grâce à Sheryl Sandberg

C'est grâce à son expérience personnelle qu'elle s'est rendue compte des bienfaits de cette communication sans tabou. Du temps où elle travaillait chez Google, à la suite d'une présentation faite auprès des pontes de l'entreprise, elle avait estimé s'en être sortie brillamment. Jusqu'à ce que Sheryl Sandberg, à l'époque vice-présidente des opérations internationales chez Google, lui demande à l'issue de la réunion si elles pouvaient faire quelques pas ensemble. Elle profita de ces quelques instants pour lui dire à quel point elle était impressionnée par le succès de son équipe avant d'ajouter une remarque négative. "Mais tu dis 'euh' un peu trop souvent'", avait lancé celle qui est aujourd'hui directrice des opérations de Facebook. Face aux tentatives de Kim Scott de minimiser l'importance de ce tic de langage dû à la nervosité, Sheryl Sandberg avait fini par lancer: "Quand tu dis 'euh' tous les trois mots, cela te fait paraître stupide". Une telle franchise qui a alors permis à Kim Scott de réaliser que sa patronne se souciait d'elle, et de s'améliorer. Désormais, elle fait la promotion de la franchise radicale pour que les entreprises l'adoptent.

Gérer l'émotionnel

Charlie HR, une start-up londonienne, s'y est convertie. Chaque lundi, les équipes prennent une heure pour faire des retours sur ce qu'il s'est passé la semaine précédente, relate Buzzfeed. C'est aussi bien l'occasion d'évoquer l'attitude jugée sur la défensive d'untel face aux critiques que les mails à rallonge d'un autre. Chacun y va de sa remarque, quelle que soit sa place dans la hiérarchie. Il y a également des rendez-vous mensuels entre chaque employé et son manager où seront abordés la productivité, les objectifs, les tensions au bureau…

Mais ces séances à cœur ouvert ne sont-elles pas trop dures à supporter? Parfois, certains échanges tournent aux crises de larmes. Rien d'alarmant pour Kim Scott, qui trouve que la gestion de l'émotionnel fait partie intégrante du travail des managers.

Tout le monde n'est pas convaincu de l'efficacité de la méthode. Patrick Baert, qui dirige le département de sociologie de l'université de Cambridge, ne croit pas aux relations sociales basées sur la vérité à tout prix. "Le tissu même de l'interaction sociale repose sur des éléments de diplomatie" explique-t-il à Buzzfeed. Autrement dit, pour que la paix règne au bureau et que chacun continue à œuvrer, il faut parfois mieux passer sous silence certaines petites manies de vos collègues.

C.C.