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Velib', PV... Les casseroles d'Indigo freinent ses ambitions dans la mobilité

Indigo est présent dans 16 pays et gère 5400 parkings et de 3000 km d’espaces de rues.

Indigo est présent dans 16 pays et gère 5400 parkings et de 3000 km d’espaces de rues. - Vinci

Avec Smovengo et Streeteo, Indigo (ex-Vinci Park), déploie ses compétences pour s'imposer comme un acteur de poids dans la mobilité intelligente. Mais ces deux partenaires cumulent les dérapages.

"Nous sommes ici pour combler le fossé entre la voiture et la ville intelligente". La phrase de Serge Clémente, directeur Général du Groupe Indigo (ex-Vinci Park), est explicite, mais pour l’instant, elle laisse la mairie de Paris sur sa faim. Indigo est présent dans plus de 750 villes et 16 pays. L'entreprise gère 5400 parkings et de 3000 km d’espaces de rues et emploie 19.000 salariés. En 2016, Elle a réalisé un chiffre d’affaires de 950 millions d’euros.

Mais ses récentes expériences soulèvent des doutes sur sa capacité à devenir un véritable acteur de la mobilité intelligente. Son partenaire Smovengo est dépassé par sa capacité à prendre la relève des Velib' de JCDecaux. Quant à Streeteo, sa filiale mandatée par la Ville de Paris pour verbaliser ceux qui ne payent pas les parcmètres, les scandales s’accumulent.

La Ville de Paris au secours de Smovengo

Indigo fait partie du consortium de Smovengo aux côtés de trois autres entreprises : Moventia, Mobivia et Smoove (voir encadré). C'est ce "consortium de quatre experts internationaux de la mobilité", comme se présente l'entreprise sur son site internet qui est chargé du déploiement du nouveau Vélib'.

Et ce projet ne se passe pas comme prévu, notamment à cause de la complexité du raccordement électrique des nouvelles bornes. Au 1er janvier 2018, la société aurait dû créer 600 stations et 1400 fin mars pour mettre à la disposition des utilisateurs 20.000 bicyclettes dont 30% électriques. Elle n’en a installé pour le moment que 330 et, en plus des pénalités, elle a déjà décidé de rembourser les abonnés. 

La Ville de Paris a décidé cette semaine de reprendre en main le contrôle des opérations. Dans un entretien au journal L’Opinion, Christophe Najdovski, adjoint EELV aux Transports de la maire PS de Paris Anne Hidalgo, a annoncé début mars qu’il était "urgent de redresser la barre". Pour aider le consortium, des équipes municipales ont été missionnées pour "piloter l'installation des stations".

Malgré une présence dans 26 villes du monde, de Moscou à Clermont-Ferrand en passant pas Chicago, Marrakech et Strasbourg, la startup montpelliéraine créée en 2008 ne gérait jusqu'ici que 715 stations, soit deux fois moins que ce qui était prévu d’installer à Paris en un seul trimestre.

Le co-directeur général de JCDecaux, Jean-Charles Decaux, se délecte de la situation. Ce jeudi, il a déclaré à l'AFP que pour lui, Smovengo n'est pas à hauteur des enjeux technologiques. "Et pourtant c'est le plus simple qu'il y a à faire (l'installation des stations, NDLR) actuellement. Gérer les vélos et abonnés sera bien plus compliqué".

Streeteo oblige la Ville de Paris à hausser le ton

Pour Streeteo, filiale d’Indigo, les choses sont encore plus compliquées. Avec la réforme du stationnement payant sur voirie mise en place le 1er janvier 2018, la filiale d’Indigo a été mandatée par la Ville de Paris pour encaisser les forfaits de post-stationnement, à la place des agents municipaux.

Dès janvier, la société a été pointée du doigt à cause de trois agents au comportement inapproprié avec la mission qu’ils devaient remplir. Depuis deux affaires sont venues alourdir le dossier. Ce mercredi, le Canard Enchaîné a révélé des contrôles de stationnement fictifs. Des agents ont reconnus que pour remplir leurs quotas, ils saisissaient sans quitter leur bureau des immatriculations de véhicules flashés en prétendant les avoir inspectés. Ils entraient ensuite, pour motif de non-verbalisation, des explications type "PMR" (personne à mobilité réduite) ou "autre".

Dans un communiqué publié ce mercredi 7 mars, la mairie de Paris a confirmé avoir constaté "un taux anormalement élevé de véhicules exemptés du paiement du stationnement". Pour éviter que l’affaire ne s’envenime, elle précise que "aucun véhicule n'a été verbalisé à tort".

L'autre problème a été soulevé par RTL qui a révélé que contrairement à la loi, Streeteo emploie des agents non assermentés. La Mairie de Paris a décidé d'infliger à Streeteo une pénalité de 60.000 euros. Elle a aussi annoncé que les FPS (amendes) qui n'auraient pas été apposés par des contrôleurs assermentés seront annulés.

Streeteo a aussitôt réagi dans un communiqué, déplorant "des pratiques internes inappropriées, y compris de la part de certains managers, menées évidemment à son insu". Elle indique aussi veiller "à ce que les automobilistes n'aient à en subir aucun préjudice". En attendant, sur le site de la filiale d'Indigo, aucun formulaire de contact ne permet de poster une réclamation.

Smovengo : quelle distribution des rôles ?

Dans le consortium Smovengo l'espagnol Moventia, s'occupe de "gérer le déploiement des stations, de mettre en place le nouveau dispositif Vélib' et d'assurer la qualité du service". Mobivia, coactionnaire de Smoove, doit s'occuper de la "chaîne de production et d'approvisionnement" des vélos. La mission de Smoove, l'entreprise mère du consortium, est de concevoir les vélos et les bornes. Et à charge pour Indigo apporte son "expertise financière, juridique, commerciale et administrative" dans le but de faire de ses parkings "une base arrière de proximité".

Pascal Samama