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Transports

Vers la fin des autoroutes A75 et A20 gratuites dans le Massif central?

La protestation enfle contre les projets du gouvernement de financer l'entretien des routes et autoroutes non-concédées par des péages ou des vignettes. Premières visées: les autoroutes A 75 et A 20 du massif central, gratuites pour l'essentiel, qui pourraient devenir payantes.

Des portions entières d'autoroutes gratuites au nom du désenclavement territorial vont-elles devenir payantes pour leurs usagers? En cause, le projet de loi d'orientation sur les mobilités (LOM) qui s'inspire pour partie du rapport du conseil des infrastructures publié début 2018. Le texte de loi que la ministre des transports compte présenter avant l'été 2018 "proposera une stratégie d'ensemble ainsi qu'une programmation sincère de nos infrastructures sur les deux prochaines décennies", a-t-elle promis.

"Cette programmation devra s'appuyer sur des ressources financières solides et pérennes, en privilégiant, chaque fois que c'est possible, le paiement par l'usager ou par le bénéficiaire final des projets", a prévenu Élisabeth Borne.

Le réseau autoroutier non-concédé dans le viseur

Elle a ajouté, "nous devrons engager dès 2019 un plan de sauvegarde des chaussées, des ouvrages d'art et des équipements du réseau routier national non concédé" (NDLR, géré par l'État et non pas exploité par une société privée) qui comprend les routes nationales et les autoroutes gratuites.

Le paiement par l'usager évoqué par la ministre implique la création de péages sur des axes routiers actuellement gratuits. La mise en place d’une vignette poids lourds pourrait aussi être envisagée et contribuer ainsi au financement des travaux d'infrastructures. Ceux-ci seraient réalisés par un établissement public à caractère industriel et commercial (EPIC) nouvellement créé par la loi. Baptisé "Routes nationales de France", il remplacerait les directions interdépartementales des routes (DIR).

L'A75 offre 335 km d'autoroute (presque) gratuite

Premières concernées par ces projets: les autoroutes A20 et A75 traversant le massif central. Elles offrent à l'automobiliste de larges portions gratuites au nom du désenclavement des territoires ruraux qu'elles desservent.

Pour les syndicats, la menace de la fin de la gratuité de l'A75 est bien réelle. Cette autoroute, longue de 335 km, est gratuite de Clermont-Ferrand à Montpellier, à l'exception du viaduc de Millau, concédé à Eiffage. Dans un entretien au quotidien régional Midi Libre, Vincent Malon, secrétaire général du syndicat CGT à la direction Interdépartementale des routes du Massif Central, dénonce: "dans plusieurs documents officiels, il est écrit que les autoroutes non concédées vont être les premières concernées par ces nouveaux péages."

Même inquiétude du côté des usagers qui circulent sur l'autoroute A20. Cet axe relie Vierzon (Cher) à Montauban (Tarn-et-Garonne) sur 428 kilomètres. Mais, seule la potion méridionale de 158 kilomètres est payante, les 270 autres kilomètres reliant le Cher à la Corrèze par Limoges, étant gratuits.

Une opération escargot sur l'A20, le 22 mai dernier

En guise de protestation contre la remise en cause de cette gratuité, une opération escargot a été organisée le 22 mai dernier sur une portion d'A20. La CGT de la direction interdépartementale des routes du Sud-ouest (Dirco) en était l'instigatrice. "La gratuité, ça participe à l'aménagement du territoire", estimait lors de cette journée, à l'antenne de la radio France Bleu, le délégué CGT de la Dirco, "de nombreuses personnes se déplacent depuis l'Indre et la Creuse pour aller travailler à Limoges."

Ces inquiétudes sont relayées par certains élus locaux. Pour le sénateur Les Indépendants de la Vienne, Alain Fouché, s'exprimant sur Public Sénat: "le futur texte semble programmer de rendre payantes certaines portions d’autoroutes qui sont gratuites aujourd’hui, de rendre possible la mise en place de péages sur les routes nationales et départementales".

Pour la ministre Élisabeth Borne, en première ligne dans le conflit social à la SNCF, c'est un nouveau front de contestation que la ministre devra affronter lors de la discussion parlementaire sur son projet de loi sur les mobilités.

Frédéric Bergé