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Vivendi: le fisc abandonne son redressement à 1,4 milliard d'euros

Sous Jean-Marie Messier, Vivendi avait investi dans les télécoms à l'étranger, notamment au Maroc

Sous Jean-Marie Messier, Vivendi avait investi dans les télécoms à l'étranger, notamment au Maroc - AFP PIG

Le fisc contestait un montage d'optimisation fiscale réalisé par Vivendi en 2011 en fusionnant SFR et Vivendi Telecom International, holding regroupant les investissements dans les télécoms à l'étranger.

Vivendi, fort de son succès dans les télécoms en France avec SFR, avait décidé, sous la direction de Jean-Marie Messier, de se lancer dans les télécoms à l'étranger: Pologne, Hongrie, Espagne, Maroc, Kenya... Ces investissements étaient regroupées dans une holding baptisée Vivendi Telecom International (VTI).

Las! La plupart de ces investissements se sont avérés déficitaires et ont été vendus. Toutefois, les pertes de VTI (425 millions d'euros cumulés) présentaient un intérêt du point de vue fiscal: elles pouvaient être déduites de l'impôt sur les bénéfices. Cela n'avait pas grand intérêt au niveau de VTI, qui ne faisait pas de bénéfices. Mais les fiscalistes de Vivendi ont eu l'idée de fusionner VTI avec le très rentable SFR. Cela a permis d'imputer les pertes de VTI sur les bénéfices de SFR, et de réduire d'autant l'impôt sur les bénéfices du nouvel ensemble.

Convaincre le fisc

Las! Ce tour de passe passe n'a pas été du goût du fisc. Début 2015, Bercy a contesté cette fusion, notifiant un redressement de 1,37 milliard d'euros: 711 millions d'euros d'impôts non payés, plus 663 millions d'euros de pénalités et de majorations.

Vivendi a contesté ce redressement, et a fini par convaincre le fisc de la légalité du montage. Il y a deux semaines, Bercy a donc indiqué qu'il abandonnait le redressement. 

Coup de pouce du gouvernement Fillon

A noter qu'entretemps, Vivendi avait revendu SFR à Altice (qui détient 49% de BFM Business). Lors de la cession, le vendeur et l'acquéreur s'étaient entendus pour se partager la facture si le redressement allait à son terme: Vivendi prenait à sa charge les 711 millions d'euros d'impôts non payés, tandis qu'Altice assumait le solde.

Rappelons que la fusion de 2011 avait bénéficié de l'aide du gouvernement Fillon et du gendarme des télécoms. En effet, la fusion consistait en pratique en un rachat par VTI de SFR, y compris ses actifs tels que ses fréquences de téléphone mobile. Or à l'époque, la revente de fréquences était interdite. Le gouvernement Fillon a donc fait sauter cette interdiction. Un haut fonctionnaire se souvient: "le gouvernement a autorisé cette revente des fréquences uniquement car SFR le souhaitait. Toutefois, il a fallu passer outre l'opposition du ministère du Budget, qui avait bien compris que c'était pour faire de l'optimisation fiscale". 

Précisément, Eric Besson, alors ministre chargé de l'Industrie, et François Baroin, son collègue à l'Economie, ont signé le 1er décembre 2011 un arrêté ministériel autorisant la revente des fréquences 2G et 3G. L'Arcep a ensuite adopté à la vitesse de l'éclair (en seulement 24 heures) plusieurs décisions nécessaires à la fusion. Finalement, le 12 décembre 2011, la fusion entre SFR et VTI avait lieu, à temps pour être incluses dans les comptes 2011 de Vivendi...

Jamal Henni