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La voiture électrique, un mode de mobilité à réinventer

Les automobiles purement électriques doivent encore surmonter chez l'usager le blocage psychologique lié à leur autonomie moindre. /Photo d'archives/REUTERS/Thomas Peter

Les automobiles purement électriques doivent encore surmonter chez l'usager le blocage psychologique lié à leur autonomie moindre. /Photo d'archives/REUTERS/Thomas Peter - -

par Helen Massy-Beresford PARIS - A quelques mois de l'arrivée d'une nouvelle gamme de voitures électriques dans les concessions européennes, les...

par Helen Massy-Beresford

PARIS (Reuters) - A quelques mois de l'arrivée d'une nouvelle gamme de voitures électriques dans les concessions européennes, les constructeurs ont fort à faire pour convaincre les usagers que l'avantage environnemental compensera l'abandon d'une certaine idée de liberté associée depuis toujours à l'automobile.

De l'avis des observateurs, la demande pour ces modèles sans moteur thermique devrait rester dans un premier temps relativement confidentielle et les constructeurs comme Renault et PSA Peugeot Citroën ne s'attendent pas non plus à ce que cette nouvelle technologie devienne rapidement un marché de masse.

Premier obstacle à franchir: convaincre l'automobiliste habitué, une fois le plein fait, à sauter dans sa voiture quand bon lui chante alors qu'avec l'électrique, il faudra penser à mettre son véhicule en charge le soir et veiller à connaître les points d'approvisionnement sur son itinéraire.

Stephen Stradling, qui enseigne la psychologie des Transports à l'Université Napier d'Edinbourg, souligne que "la première barrière sera le sentiment de renoncer à une certaine mobilité spontanée attachée au mot même d'automobile". Il faudra aussi convaincre qu'une voiture électrique est d'abord une voiture comme une autre, et non répéter certaines expériences futuristes passées.

"Les gens fonctionnent par catégories", résume Stephen Stradling. "À l'heure actuelle, il y a la catégorie des voitures, et celle distincte des voitures électriques. Pour qu'elles rejoignent les autres, il va falloir qu'elles se normalisent."

"Quand vous posez la question aujourd'hui, vous réalisez que le public n'a pas encore vraiment vu de vraies voitures électriques", ajoute Thierry Koskas, responsable du programme véhicule électrique chez Renault. "Ou alors ils ont en tête des voiturettes de golf."

LE POINT FAIBLE DE L'AUTONOMIE

Les analystes de HSBC estiment que les véhicules électriques représenteront 4,5% des ventes totales de véhicules légers dans le monde d'ici 2020, soit 4,7 millions d'unités sur un total d'environ 100 millions estimé à cet horizon.

Renault et son partenaire Nissan veulent croire de leur côté que la voiture électrique représentera jusqu'à 10% des ventes d'ici dix ans et investissent quatre milliards d'euros dans une gamme complète qui se mettra en ordre de bataille à partir de 2011 et 2012.

PSA, qui commercialisera l'iMiEV de son partenaire Mitsubishi sous les noms Peugeot iOn et Citroën C-Zéro dès la fin de l'année, estime plutôt à 5% la part de marché de cette technologie en 2020.

L'allemand Volkswagen, le premier constructeur européen, veut quant à lui devenir leader du marché électrique d'ici 2018, mais ne lancera pas son premier modèle avant 2013.

Les constructeurs se donnent du temps afin que les infrastructures de charge soient les plus nombreuses possibles, dans les parkings ou sur la voie publique, pour réduire les craintes liées à cette "panne sèche" d'un genre nouveau.

La Leaf de Nissan, que les Européens devraient pouvoir acheter début 2011, affiche une autonomie de 160 kilomètres, et les cousines iOn et C-Zéro, de 130 kilomètres.

Par contraste, une voiture à essence de même gabarit peut rouler au moins 500 kilomètres sans repasser à la pompe. Mais Carlos Ghosn, PDG de Renault-Nissan, souligne que dans les zones urbaines et périurbaines, 80% des déplacements quotidiens font moins de 60 km.

"La première grande étape est de pouvoir renseigner les gens (...) la deuxième sera de leur offrir la possibilité de tester les véhicules pour de vrai", résume Tom Smith, directeur du marketing voiture électrique en Europe chez Nissan.

Les constructeurs automobiles rivalisent d'inventivité et se réjouissent du "buzz" qui entoure les véhicules électriques sur internet. Nissan a créé un site dédié, www.electric-mobilityc.om, tandis que dès le début du mois, 7.500 personnes ou entreprises avaient déjà réservé un test de conduite sur le site Citroën C-Zéro.

La question du prix d'achat sera également déterminante pour le succès de l'électrique, tout comme celui de la valeur résiduelle au moment de la revente.

Grâce aux aides - en France, le bonus écologique de 5.000 euros leur est acquis jusqu'en 2012 - les constructeur entendent proposer des tarifs équivalents aux modèles thermiques et assurent qu'au quotidien, le coût d'utilisation sera bien moindre. Il faut toutefois rajouter le coût de la batterie, qui sera sans doute louée. Le mode d'utilisation change là encore puisque l'automobiliste ne sera pas propriétaire de l'ensemble de son véhicule, et souscrira probablement un forfait batterie-électricité sur le modèle des offres de téléphonie mobile.

Avec la contribution de Gilles Guillaume, édité par Jean-Michel Bélot