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William L., cette "start-up" horlogère française qui flambe sur Kickstarter

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- - William L.

Créée il y a quelques mois par un jeune passionné, la marque de montres William L. a déjà levé 150.000 euros sur le site de financement participatif, soit quatre fois plus qu'attendu. Design vintage et prix abordable pour cette marque qui rappelle le suédois Daniel Wellington.

La montre est-elle en train de redevenir un accessoire branché? Alors qu'elles avaient tendance à disparaître des poignets avec l'émergence des smartphones, voilà que de plus en plus de nouvelles marques se lancent sur un marché que l'on pensait en déclin. Car après Daniel Wellington en Suède, MVMT aux Etats-Unis, voilà qu'une jeune pousse française enflamme Kickstarter et les blogs spécialisés. Son nom: William L. Créée il y a quelques mois, elle a déjà recueilli pas moins de 150.000 euros sur la plateforme de financement collaboratif. Générant au passage un début de buzz prometteur qu'on pensait réservé aux gadgets high-tech.

Et pourtant, les montres William L. sont tout ce qu'il y a de plus low-tech. Elles ne sont pas connectées, ne permettent pas de lire ses mails ou d'envoyer des textos et elles n'ont pas d'écran mais un simple cadran. Et à l'heure des appareils couteaux-suisses multifonctions, les montres William L. peuvent paraître anachroniques puisqu'elles ne permettent qu'une seule chose: connaître l'heure.

Derrière William L., on trouve un jeune homme de 30 ans, passionné de tocante, qui a fait ses armes dans le saint des saints en Suisse. Guillaume Laidet a débuté sa carrière au marketing de l'horloger Zénith avant de passer deux ans plus tard chez le concurrent Jaeger-LeCoultre. Sa mission au sein de ses grandes maisons de l'horlogerie helvétique: développer le marketing digital en créant pages Facebook, comptes Instagram et autres applications pour smartphone. 

"La Chine c'est 99% de la production mondiale"

Il aurait pu ainsi faire carrière dans le canton de Vaud, gravir les échelons au sein d'une marque prestigieuse et profiter du grand air des Alpes suisses. Mais Guillaume Laidet a un jour hérité d'un vieux chrono suisse qu'il a transformé en montre. "C'est vraiment une très belle montre, tous mes copains l'adoraient et me demandaient où est-ce qu'ils pouvaient acheter la même, explique-t-il. Le problème c'est que lorsque je leur disais qu'il fallait débourser 1.000 euros pour s'offrir la même, ça les refroidissait pas mal." Pourquoi ne pas leur proposer une montre équivalente pour 150 euros? Voilà comment est née l'idée de William L. Le jeune homme dessine un croquis, s'inspire de son vieux chrono et y ajoute des touches personnelles comme la date située entre le 4 et le 5, un hommage à la mythique El Primero de Zenith. Pour le nom ce sera William (Guillaume en anglais) et L. pour Laidet. Et le 1985 qui termine la signature est l'année de naissance du créateur.

Ses dessins en poche, il ne reste plus qu'à trouver un fabricant. Et évidemment, pas question d'imaginer la faire fabriquer en Suisse. Direction la Chine et la ville de Shenzhen. "Il faut savoir que c'est en Chine qu'on fabrique 99% des montres du monde", explique Guillaume Laidet. Aujourd'hui, pas une montre en dessous de 350 euros ne vient pas de Chine. Et c'est d'ailleurs là-bas que sont fabriquées les fameuses Daniel Wellington dont le jeune français s'est un peu inspiré. "C'est évidemment un modèle mais plus pour le positionnement prix que pour le produit, moi je veux faire des produits plus qualitatifs", assure-t-il. Un exemple avec le verre: les montres William L. sont coiffées d'un verre saphir bombé dont le prix seul coûte 25 euros par montre. A titre de comparaison, une montre Daniel Wellington coûterait aux alentours de 10 euros tout compris. Comment fait Guillaume Laidet pour sortir une montre à 150 euros, soit un prix équivalent de son concurrent suédois? Il accepte de moins "marger" et ne prévoit aucune dépense marketing. 

Les montres William L. dans des mises en scène vintage.
Les montres William L. dans des mises en scène vintage. © -

Une montre donc qui singe les codes du luxe avec des entrailles de produits de grande consommation. Car à l'intérieur, ce n'est évidemment pas un mouvement mécanique mais bien un quartz (de marque Miyota comme les Wellington) qui anime les aiguilles. Mais peu importe en fait au néophyte qui veut se payer un accessoire fashion plus qu'un bijou de précision horlogère. "Il y a un nouveau public qui émerge, assure Guillaume Laidet. Il n'est ni forcément passionné d'horlogerie ni geek prêt à se payer une Apple Watch à 400 euros." 

Pour financer le projet, l'entrepreneur se tourne comme toute start-up qui se respecte vers le financement participatif, et le site Kickstarter en l'occurrence. "Les banques m'auraient ri au nez si j'étais allé les voir", sourit-il. Autre avantage d'internet, ça permet de faire du buzz. Ainsi, à chaque article ou billet de blog qui parle de lui, les dons et les commandes affluent. Et lui qui avait besoin de 39.000 euros pour financer une première commande en Chine, en a déjà réuni 150.000 en à peine trois semaines! Les billets du blogueur spécialisé Hodinkee, une star dans le milieu lui ont rapporté des centaines de commandes. 

Et lui qui ne comptait vendre qu'en direct sur son site internet envisage désormais une distribution chez des détaillants. D'ici quelques semaines, on devrait trouver des William L. dans le magasin parisien branché Colette ou sur l'horloger en ligne Lepage.fr. Des horlogers emballés par le concept de cette montre vintage abordable qui lui ont même commandé des modèles à mouvement mécanique. Des William L. haut de gamme, fabriquées elles aussi en Chine, et qui seront proposées à 349 euros. "La Chine a tout copié en Suisse et commence maintenant à faire du haut de gamme, assure Guillaume Laidet. Ils n'ont simplement pas encore le goût et le savoir-faire pour le design." Pour le moment...

La page Kickstarter de la marque.

Frédéric Bianchi