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Yahoo! va devoir lâcher Alibaba

Yahoo! va se séparer des actions Alibaba au quatrième trimestre.

Yahoo! va se séparer des actions Alibaba au quatrième trimestre. - Karen Bleier - AFP

Le géant américain conservait 15,4% d'Alibaba. Cette participation, de 40 milliards de dollars, sera distribuée en actions aux actionnaires.

Yahoo! va devoir lâcher prise. Le groupe internet américain, sous la pression des investisseurs, va complètement couper les ponts avec le géant chinois du commerce en ligne Alibaba.

Yahoo!, qui a conservé 15,4% d'Alibaba après l'entrée à Wall Street du groupe chinois en septembre, a annoncé, mardi 27 janvier, qu'il allait mettre cette participation, évaluée à quelque 40 milliards de dollars, dans une société indépendante dont il distribuera gratuitement les actions à ses actionnaires existants. Ceux-ci se frottaient les mains mardi soir: le titre Yahoo! gagnait presque 7% dans les échanges électroniques suivant la clôture de la Bourse.

L'opération devrait avoir lieu au quatrième trimestre. Au moment de l'entrée en Bourse d'Alibaba, Yahoo! s'est en effet engagé à conserver sa participation restante au moins jusqu'au 21 septembre 2015.

Outre la participation dans Alibaba, qui constituera "presque toute sa valeur", la nouvelle société intègrera une "activité auxiliaire" de Yahoo! non identifiée dans l'immédiat, selon les détails fournis dans un communiqué. Contrairement aux attentes de certains observateurs, le groupe américain conservera en revanche son autre actif asiatique rentable, soit une participation de 35,5% et évaluée à 7 milliards de dollars dans Yahoo Japan, une société commune avec le japonais SoftBank.

"Incapable d'innover"

La monétisation des actifs asiatiques, dont la valeur cumulée dépasse la valorisation boursière totale de Yahoo! (45,5 milliards de dollars mardi en clôture), était depuis plusieurs mois une demande d'investisseurs, et notamment du fonds activiste Starboard Value.

Ils se sont en effet avérés des pépites pour Yahoo!, dont le bénéfice net a plus que quintuplé l'an dernier grâce aux recettes de l'entrée en Bourse d'Alibaba, à 7,5 milliards de dollars, selon des résultats publiés parallèlement mardi. Par comparaison, le quatrième trimestre, qui n'a pas bénéficié d'un tel coup de pouce, fait grise mine avec un bénéfice en baisse de 52% à 166 millions de dollars.

La patronne de Yahoo! Marissa Mayer a indiqué mardi aux analystes avoir pris "la décision délibérée de distribuer 100% de nos actions Alibaba" pour minimiser l'impact fiscal de l'opération, une variable selon elle "importante pour notre rôle de gestionnaire du capital". Et de noter que cela portera au niveau "historique" de 50 milliards de dollars les liquidités reversées aux actionnaires depuis l'arrivée aux commandes de son équipe à l'été 2012.

Trip Chowdhry, analyste chez Global Equities Research, parle lui d'une gestion "administrative" du groupe, qui "a besoin de croître" mais "est incapable d'innover". "A qui faut-il donner du crédit pour la performance de Yahoo? A Jerry Yang", un des co-fondateurs de Yahoo!, estime-t-il, car "c'est lui qui a décidé d'investir dans Alibaba et Yahoo Japan".

Croissance en berne

Si les pressions sur Marissa Mayer s'intensifient, c'est en effet aussi parce qu'après plus de deux ans aux commandes, elle n'a toujours pas relancé la croissance du groupe. Le chiffre d'affaires a encore baissé de 1,3% à 4,6 milliards de dollars l'an passé, et de 1% à 1,3 milliard au dernier trimestre. L'un des pivots de sa stratégie, critiqué par Starboard, ce sont des dizaines d'achats de startups à l'activité parfois éloignée du coeur de métier du groupe, la recherche et la publicité en ligne.

Marissa Mayer a de nouveau défendu mardi ces opérations destinées à récupérer des "talents" et des technologies utiles pour repositionner le groupe, jugeant "important, tandis que nous opérons la transition de l'activité, de continuer à rechercher de bonnes opportunités d'utiliser intelligemment du capital".

Elle a en revanche exclu de grosses acquisitions, à moins qu'elles ne viennent renforcer un de ses quatre axes de développement prioritaire: le mobile, la vidéo, les publicités dites "natives", au format conçu pour se fondre dans les produits du groupe, ou les contenus sociaux.

Si Yahoo! ne cède pas sur les acquisitions, la scission de la participation d'Alibaba pourrait en revanche, en le rendant plus petit et donc plus facile à avaler, faciliter une autre proposition de Starboard, une fusion avec un autre groupe internet comme AOL. "Cela pourrait arriver (...) mais pas depuis une position de force", reconnaît Trip Chowdhry.

D. L. avec AFP