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Résidence service : est-ce un bon plan ?

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- - PHILIPPE HUGUEN / AFP

Dans un contexte de manque de visibilité et de confiance sur les régimes de retraite classiques, les actifs français sont plus que jamais préoccupés par la création de revenus complémentaires ou d'un capital pour la retraite.

Les placements financiers, dont l'assurance vie, et l'immobilier d'investissement sont les supports plébiscités par les Français pour préserver leur pouvoir d'achat après la vie active. En immobilier locatif, les résidences services apparaissent comme une solution pour les investisseurs qui craignent l'immobilier classique et la gestion d'un locataire, mais est-ce réellement une bonne orientation ?

Une résidence service, définition ...

L'investissement en résidence service consiste à acquérir un bien immobilier dans une résidence proposant des services spécifiques aux locataires (au moins, trois des services suivants : accueil, petit déjeuner, fourniture du linge et ménage). Il est possible de réaliser cet investissement sur les secteurs étudiants, séniors, EHPAD (médicalisé), affaires ou encore tourisme. L'investisseur devient alors propriétaire d’un lot de copropriété et dispose ainsi d'une quote-part de parties communes et privatives de la résidence. On parle plus communément d'immobilier « géré », puisqu’un exploitant professionnel est chargé de gérer la résidence. L'investisseur ne signe pas de bail directement avec le locataire mais il signe un bail commercial avec l'exploitant qui lui réglera ses loyers pendant la durée du bail (souvent 11 ans renouvelable).

Les avantages et les promesses apparaissent nombreux : pas de gestion du locataire, pas de frais d'agence, pas d'assurances ni de risques d'impayés, les loyers étant garantis par le bail commercial, rentabilité supérieure à 4%, peu de charges... Quels sont les points de vigilance à prendre en compte avant de se lancer dans ce type d'investissement ?

Un bien immobilier avant tout...et un exploitant

Souvent commercialisé comme un placement financier avec un rapport et une rentabilité, notons que l'investisseur est avant tout propriétaire d'un actif immobilier dont l'emplacement reste primordial. En effet, dans ce schéma, l’exploitant devient en quelque sorte le locataire de l'investisseur et la garantie de paiement des loyers ne tient que si l'exploitation de la résidence se déroule convenablement. Il est important de valider en amont la cohérence du lieu d'implantation et la pertinence du modèle économique de la résidence. La qualité de l'exploitant, sa capacité à assumer les charges pour préserver les intérêts des investisseurs est fondamentale. Dans la cas d'une défaillance de l'exploitant vos revenus peuvent être mis à mal.

Neuf ou ancien ?

L'achat dans le neuf permet à l'investisseur de récupérer la TVA. Attention en cas de revente avant 20 ans (sauf si le repreneur reprend le bail en l'état), l'investisseur devra rembourser la TVA au prorata des années de détention.

L'achat dans l'ancien permet d'avoir une analyse objective de l'opération et de son exploitation (charges, renégociation éventuelles des loyers, compte rendu d'AG...) et de fixer un prix d'acquisition réaliste en se basant sur la rentabilité réellement constatée sur le placement.

Une grande partie des investissements réalisés sous le dispositifs Censi-Bouvard (crée en 2009) vont arriver au terme des 9 ans en 2018 - 2019, il est fort probable qu'une partie des investisseurs cherche à revendre leur bien et alimenteront le marché de l'immobilier géré ancien. Ces dernières années, des agences se sont développées et spécialisées sur ce créneau.

Choix fiscal LMNP ou Censi-Bouvard, choix déterminant ?

Deux régimes fiscaux sont possibles sur option lors de la réalisation de l'investissement.

Censi-Bouvard

Jusqu'au 31 décembre 2018, les investisseurs qui achètent au sein d'une résidence neuve peuvent opter pour le dispositif Censi-Bouvard. Celui-ci permet de bénéficier d'une réduction d'impôts de 11% sur 9 ans et calculée sur la valeur du bien dans la limite de 300 000 €.

Attention, s'il opte pour le Censi-Bouvard et la réduction d’impôt, l’investisseur renonce pout tout ou partie au système d'amortissement possible en meublé. En effet il ne pourra déduire du résultat imposable que les amortissements pour la valeur de l'immeuble qui n'aura pas été prise en compte pour le calcul de la réduction d'impôt. (Exemple : Investissement à 320 000 €, réduction d'impôt sur 300 000 € et amortissement possible sur 20 000 €).

LMNP (Loueur Meublé Non Professionnel)

L'investisseur renonce dans ce cas à la réduction d'impôt Censi-Bouvard mais pourra pratiquer un amortissement sur la valeur de son bien et se crée ainsi des revenus pas ou peu imposés.

Dans le cadre d'un placement retraite, le choix du statut LMNP et de l'amortissement parait beaucoup plus adapté et en adéquation avec l’objectif premier de l'investisseur : la création de revenus complémentaires retraite idéalement peu fiscalisés.

La rentabilité

Le taux de rentabilité oscille entre 4% et 6% brute et c'est bien la répartition des charges entre l'exploitant et l'investisseur qui permettra de savoir si le placement est judicieux.

En effet la rentabilité nette peut vite se dégrader suivant le contenu du bail. Il faut impérativement étudier les postes mis par convention à la charge de l'investisseur, le renouvellement du mobilier est à prendre en compte (obligatoire dans le cadre d'une location meublé) tout comme les charges d'entretiens de la résidence, la taxe foncière, les mises aux normes, réfections des parties communes etc. Il est également courant qu'une renégociation du montant des loyers puisse avoir lieu lors de la reconduction du bail. 

La liquidité du bien

En immobilier locatif, la notion de liquidité de l'actif est une donnée capitale. L'investisseur qui souhaite sortir son capital à terme doit s'orienter vers un bien liquide. Or la revente d'un bien en résidence service est par définition plus complexe qu'un bien classique puisque le futur acquéreur ne peut être qu'un investisseur et non un primo accédant. La part d'acquéreurs potentiels est donc plus restreinte.

Les logements seniors et étudiants peuvent être transformés facilement en logement classiques sans changement de destinations ce qui n'est pas le cas de l'EHPAD. Cela signifie qu'en cas d'arrêt de la résidence services, l'investisseur dispose d'un bien immobilier beaucoup plus liquide sur le marché.

Les investisseurs en résidence service doivent tenir compte de paramètres clés. L'emplacement, la qualité de l'exploitant, et la liquidité du bien. L'investissement doit répondre à un objectif clairement défini : la création de revenus complémentaires à terme.

Crédric BRACHET