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Finances publiques

A quand le grand choc fiscal local ?

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Au 1er janvier 2014, la TVA applicable à la collecte des déchets passera de 7 à 10 %. Une hausse qui froisse les maires, bien obligés de répercuter la taxe sur les contribuables. Et si, finalement, c’était toute la fiscalité locale qui était à revoir ?

La hausse de la TVA sur la collecte des déchets augmentera de fait les montants à la charge des collectivités locales – en l’occurrence les communes ou les syndicats de commune - de 200 millions d’euros. Ce montant s’ajoute aux 100 millions d’euros supplémentaires payés depuis 2012, année où le taux de TVA est passé de 5,5 à 7 %. Au total, l’augmentation de la facture globale de la collecte des « déchets » sur 2 ans aura été de 300 millions d’euros. Les maires se plaignent de cette charge supplémentaire qui va les conduire à augmenter la Taxe d’enlèvement des ordures ménagères.

Les maires accusent l'Etat par ses hausses de TVA de perturber leur gestion municipale. Est-ce vrai ?

Il est évident qu’il est facile pour eux de montrer du doigt l’Etat à propos de l’évolution de la fiscalité locale, surtout à la veille des élections municipales. Mais nous avons là un cas d’école des effets pervers d’une décision mal réfléchie. La taxe d’enlèvement des ordures ménagères (TEOM) rapportent en moyenne 5 milliards d’euros. Les hausses à répétition de TVA sur ce secteur vont coûter 300 millions en 2 ans que les opérateurs vont répercuter sur les communes. Celles-ci auront le choix entre assumer ces 300 millions en trouvant des économies ou augmenter la taxe d’environ 6%.
Ce que l’Etat et le gouvernement voudraient, c’est que les 300 millions se financent sous forme d’économie. Ce que les maires annoncent comme inévitable, c’est la hausse de la TEOM. L’Etat justifie sa position en indiquant que les communes doivent faire un effort d’économie. Il complète son argumentation en précisant que s’il avait maintenu le taux de TVA sur les déchets à 5,5%, il aurait fallu augmenter un autre impôt national.
En fait le bilan économique de l’opération est que le contribuable municipal va payer à la place du contribuable national. On pourrait penser que c’est le même mais il n’en est rien. Le contribuable municipal paie sur la base d’une fiscalité qui a vieilli, dont tout le monde s’accorde à dire qu’elle est obsolète- elle est le fruit du permanent rafistolage de la fiscalité du Directoire, de la fiscalité de 1797… !!- alors que le contribuable national paie sur la base d’une fiscalité du XXe siècle, qui demande à être remaniée, certes, mais moins.

Est-ce que nos dirigeants ont conscience de cela ?

On assiste dans notre politique fiscale à une sorte de jeu mortifère, une dialectique de la brutalité et de l’exonération. On commence par augmenter brutalement un impôt et on s’aperçoit que ceux qui paient en fait ne correspondent à ceux que l’on avait identifiés au départ. Alors, on corrige sur la base de rapports de force, on bricole à la marge tout en espérant qu’une concession n’en entrainera pas une autre. Cette fois-ci, ceux qui n’avaient pas été vus, ce sont les collectivités locales. Ce qui va être difficile à évaluer, c’est le rapport de force. Le gouvernement n’est pas mécontent de croiser le fer avec les collectivités locales car il est convaincu qu’un effort budgétaire est indispensable dans ce secteur et que les élus font tout pour le différer.

C'est la décentralisation qui est en cause ?

En partie. A l’origine de la décentralisation, il y a avait la volonté de François Mitterrand de réduire le pouvoir des préfets. Depuis, les réformes se sont succédé, mais celle de la fiscalité locale n’a jamais vraiment été menée. Ce que cette affaire de la TEOM met en évidence, c’est qu’il va falloir reprendre le problème à la base.

Jean-Marc Daniel