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Atteindre le plein emploi en 2025, un pari tenable ?

Pôle emploi

Pôle emploi - Pôle emploi - PASCAL GUYOT - AFP

Les conditions de démographie et de croissance semblent enfin réunies pour y parvenir, selon un expert.

La décrue du chômage structurel en France semble se confirmer depuis maintenant plusieurs trimestres. Le dernier indicateur connu, le taux de chômage au sens du BIT (Bureau international du travail) est ainsi au plus bas depuis 10 ans à 8,4% de la population active métropolitaine (8,7% en y ajoutant les DOM-TOM).

Une tendance qui a incité Emmanuel Macron, le président de la République, à oser des prévisions datées (un exercice pourtant bien périlleux). Et de viser un taux de chômage à 7% à horizon 2022 et à 5% environ en 2025, un seuil considéré comme le plein emploi.

Si certains doutent de ce plan de marche, d'autres observateurs comme Olivier Passet, Directeur des synthèses chez Xerfi estime que « l’objectif est pourtant beaucoup moins héroïque qu’il n’y paraît. Car deux éléments ont changé en profondeur sur le marché du travail depuis quelques années ».

Et d’expliquer : « Le premier élément de rupture, c’est l’accroissement de la population en âge de travailler. Cette population de 15-65 ou 20-65 ans stagne ou s’érode depuis 2010, quand elle augmentait encore de 200 à 300 000 par an entre 2000 et 2008. Cette tranche d’âge de population joue un rôle décisif dans la formation de l’offre de travail et la tendance à la stagnation va s’inscrire dans la durée. Ainsi aujourd’hui, à taux d’activité constant, la stagnation de l’emploi ne fait plus ou quasiment plus augmenter le chômage en valeur absolue. C’est une rupture considérable du point de vue strictement comptable par rapport aux décennies passées ».

« Les choses ont changé »

« En régime de croisière, il est clair que la hausse de la population active est bien moindre aujourd’hui qu’hier. Et cela pour longtemps compte tenu de l’arrière-plan démographique. In fine, en période de croissance, il faut aujourd’hui moins de 100 000 créations d’emplois pour diminuer le nombre de chômeurs, quand il en fallait 200 à 300 000 dans les années 2000 », détaille l’expert.

L’expert souligne également et évidemment le support de la croissance comme moteur essentiel de la création d’emplois. Mais les paramètres ont là aussi changé, au profit de l’emploi. « La job machine repart en France à partir du seuil de 1% de croissance. Ce seuil était plus proche de 1,5%-2%, il y a 10 ans. Cela, on peut le visualiser de façon fruste à travers le rythme de productivité tendanciel au plan macro, qui indique aussi, le seuil de croissance, à partir duquel doit augmenter le volume de travail pour accompagner le surcroît de croissance. Et c’est bien ce que l’on constate aujourd’hui. La France continue à créer de l’emploi, alors même que la croissance navigue sous un rythme de 1,1% en moyenne depuis 5 trimestres ».

« Cette évolution, on la constate partout dans le monde développé. Le contenu en emploi de la croissance s’est accru, réformes ou non réformes. Avec le numérique, avec le vieillissement et la problématique de la dépendance, on assiste à une explosion des petits emplois de service et de logistique, à faible productivité », souligne Olivier Passet.

« Bref, les choses ont changé. Et annoncer 7% de chômage à horizon 2022, puis de l’ordre de 5% à horizon 2025, c’est simplement parier sur l’absence d’accident conjoncturel majeur à moyen terme. C’est miser finalement sur une croissance moyenne proche de 1,5%. Rien d’exceptionnel. La France est simplement en train de se germaniser. Et pour la première fois, depuis 40 ans, la démographie va finalement faire le job dont les politiques s’attribueront les mérites ».

Olivier CHICHEPORTICHE