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Economie et Social

Budget : les arbitrages d'Edouard Philippe

Edouard Philippe dévoile ses arbitrages

Edouard Philippe dévoile ses arbitrages - STEPHANE DE SAKUTIN / AFP

Edouard Philippe a dévoilé ce lundi les grandes lignes du financement des nouvelles mesures en faveur du pouvoir d'achat. Il apporte des précisions sur l'augmentation des bas salaires. Cela ne concernera pas tous les Smicards, mais plus de foyers seront ciblés.

Édouard Philippe fait le choix de raisonner sur les foyers et non sur les individus. Un choix loin d’être neutre, au nom de la justice sociale…Pourquoi ? Parce qu’intégré dans son foyer, un Smicard peut être beaucoup moins dans le besoin qu’un individu seul, qui gagne plus que le Smic. Et donc, pour ce type de coup de pouce au pouvoir d’achat, la cible du foyer parait plus juste que la cible de l’individu.

C’est pour cela que Matignon choisit de s’appuyer sur la Prime d’Activité, qui a l’avantage de prendre en compte le foyer, et qui ne se limite pas au revenu du Smic, mais brasse plus large, de 0.5 à 1.5 Smic. A l’arrivée, la promesse présidentielle ne sera donc pas respectée stricto sensu : puisque 45% des Smicards ne bénéficieront pas de cette hausse.

En revanche, en parallèle, Edouard Philippe annonce qu’il étend la Prime d’Activité à 5 millions de foyers, contre 3,7 aujourd’hui. Bien au-delà que le nombre de salariés au Smic. Et normalement, ces 5 millions de bénéficiaires sont censées être ceux qui en ont le plus besoin.

Après, comment cela va se passer? Dans le détail, tout le monde n’aura pas les 100 euros net d’augmentation. Un mécanisme de dégressivité va être mis en place. La frustration des salariés qui ne la toucheront pas risquerait d’effacer le bénéfice politique d’une telle mesure.

Les entreprises vont passer à la caisse

Édouard Philippe vient aussi de dévoiler ses premiers arbitrages sur le financement des annonces d'Emmanuel Macron. L'ensemble des mesures en faveur du pouvoir d'achat coûtera 10 milliards d'euros. Pour les financer, les entreprises seront bel et bien mises à contribution à hauteur de 2,5 milliards d'euros. Dans le détail, le report en 2020 de la baisse de l'impôt sur les Sociétés (33 à 31%) pour les entreprises dont le chiffre d'affaire est supérieur à 250 millions d'euros rapportera à l État 1,8 milliards d'euros.

Bercy mettra aussi en place une taxe Gafa, sur les géants du numérique, qui devrait rapporter 500 millions d'euros en 2019. Enfin, Édouard Philippe prévoit de limiter un avantage fiscal utilisé par les holdings pour les plus-values de cessions de filiales. Il s'agit de la niche Copé. Les recettes attendues s'élèveront à 200 millions d'euros.

Le danger, en demandant 2,5 milliards d'effort aux entreprises, c'est qu’Emmanuel Macron et Edouard Philippe se contredisent. Ils n’ont rien annoncé de contraignant aux grands groupes reçus à l’Elysée mercredi dernier. Mais ils ont promis de ne pas changer de cap et de préserver l’attractivité et l’environnement fiscal.

De son côté, Édouard Philippe insiste sur le fait qu’il préservera les mesures de compétitivité comme la bascule du CICE (crédit d'impôt compétitivité emploi) en baisse de charges pérenne. Et il l'assure qu'"il n'y a pas de tournant mais un changement de méthode". Matignon annonce aussi des économies sur la dépense publique de 1 à 1,5 milliards de plus en 2019. Un objectif ambitieux quand on sait que Bercy a déjà eu beaucoup de mal à trouver en urgence 500 millions d'euros d'économies pour financer les premières mesures de pouvoir d'achat (prime et bonus automobile) annoncées il y a 3 semaines avant que la situation ne dégénère.