BFM Business
Economie et Social

Centre spatial guyanais : le courroux de la Cour des Comptes

Les premiers exemplaires de la nouvelle génération de fusées européennes voleront entre 2021 et 2023.

Les premiers exemplaires de la nouvelle génération de fusées européennes voleront entre 2021 et 2023. - Handout - European Space Agency - AFP

Dans son rapport annuel, la Cour alerte sur la situation du port spatial de Kourou en Guyane. Missions à recentrer, Infrastructures vieillissantes et manque d'implication des européens.

Le Centre spatial guyanais (CSG) doit se concentrer sur son cœur de métier: lancer des fusées. C'est en substance le message que délivre la Cour des Comptes.

Le centre, en plus de ses missions industrielles, participe en effet activement au développement du territoire guyanais via le CNES, le centre national d'études spatiales. Actions en faveur de la filière pêche, équipements sportifs, ou encore alimentation en eau potable des villages isolés.

Un effort qui à un coût. Ainsi, entre 2007 et 2020, le CSG va débourser environ 100 millions d'euros en subventions diverses et variées. Dans son rapport, la Cour estime que «la gestion de ce fonds obéit à une logique de guichet conduisant à un saupoudrage des crédits [...] L'Etat est l'acteur le mieux placé et le plus légitime pour coordonner cette action».

Or, Le centre spatial est à la croisée des chemins et la question du financement est centrale, toutes les économies sont bonnes à prendre. Il faut déjà assurer les opérations courantes avec les lancements d'Ariane 5, de Véga et de Soyouz tout en préparant le terrain pour la future Ariane 6.

La France supporte 84% des coûts du centre spatial

C'est l'autre point mis en évidence par la Cour des Comptes. La France supporte (quasiment) seule les coûts du centre spatial. Pourtant, les accords de Kourou signés en 2008 font du centre "le port spatial de l'Europe".

Par conséquent, son financement devrait être partagé: un tiers par la France, un tiers par les Etats finançant le programme des lanceurs et un tiers par l'Agence spatiale européenne (ESA). Seulement, souligne la Cour, «cette base de calcul n'englobe pas les coûts d’exploitation ni le fait que la France est le principal contributeur au financement des programme des lanceurs». En clair, la France supporte 84% des coûts du centre spatial. Les magistrats, dans leur rapport, appellent donc à un rééquilibrage et à davantage de coopération entre les Etats européens et les institutions.

Remettre l'infrastructure à flots

Routes détériorées, bâtiments et hangars fatigués, réseau électrique à moderniser... C'est toute l'infrastructure du centre qu'il faut aussi remettre à niveau. Une infrastructure mise à rude épreuve depuis les années 70 en particulier à cause des conditions météo. Un chantier très important puisque le centre s'étend sur plus de 700 km2. Il s'agit aussi de moderniser les équipements liés au bon déroulement des lancements : salle de contrôle Jupiter, changement des équipements informatiques, systèmes de télémétrie... Un chantier qui doit permettre à Kourou de gagner en compétitivité.

Il faut aujourd’hui deux semaines pour configurer le site avant un lancement , l'objectif avec Ariane 6 est de passer à cinq jours expliquait récemment un responsable du centre spatial. Dans son rapport, la Cour recommande donc de «revoir l'organisation du site et de réaliser les investissements pour moderniser les infrastructures. Il est fortement souhaitable, ajoute-t-elle, que ce programme de modernisation soit porté par les acteurs européens». Le Centre national d'Etudes spatiale à déjà chiffré le coût de ces investissements à 180 millions d'euros.

Objectif Séville

Modernisation du centre spatial, mise à plat du financement et renforcement de la coopération, toutes ces questions doivent être étudiées à Séville, au mois de novembre prochain, à l'occasion de la réunion des ministres européens en charge des Affaires spatiales. Un moment important où la France va devoir taper du poing sur la table pour rappeler à ses partenaires qu'elle n'est pas là pour financer seule la porte d’entrée qui permet à ses voisins d’accéder à l'espace.