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La concertation sur les retraites commence, FO reste inflexible

La concertation sur la réforme des retraites a commencé lundi avec la rencontre entre Eric Woerth et Force ouvrière, qui a répété son opposition au relèvement de l'âge légal ou de la durée de cotisation. /Photo d'archives/REUTERS/Miro Kuzmanovic

La concertation sur la réforme des retraites a commencé lundi avec la rencontre entre Eric Woerth et Force ouvrière, qui a répété son opposition au relèvement de l'âge légal ou de la durée de cotisation. /Photo d'archives/REUTERS/Miro Kuzmanovic - -

PARIS - La concertation sur la réforme des retraites a commencé lundi avec la rencontre entre Eric Woerth et Force ouvrière, qui a répété son...

par Jean-Baptiste Vey

PARIS (Reuters) - La concertation sur la réforme des retraites en France a montré dès son coup d'envoi lundi les divergences entre gouvernement, syndicats et patronat sur la question de savoir qui subira les mesures visant à juguler les déficits.

Après des rencontres bilatérales avec le ministre du Travail, les syndicats ont rejeté toute réforme qui pèserait uniquement sur les salariés et les fonctionnaires, à travers un relèvement de l'âge légal de la retraite ou de la durée de cotisation nécessaire pour toucher une pension complète.

Ils ont demandé à Eric Woerth de jouer plutôt sur les sources de financement des retraites, en évoquant, entre autres, des hausses générales ou ciblées des cotisations, contre lesquelles se sont élevées les organisations patronales.

Eric Woerth a refusé toute hausse générale des impôts ou des cotisations, sans toutefois écarter des ajustements "ici ou là".

"Il y a un sujet sur lequel le gouvernement n'est pas ouvert, c'est l'augmentation des prélèvements", a-t-il dit à des journalistes. "Nous ne sommes pas favorable à l'augmentation des impôts, nous ne sommes pas favorables à l'augmentation des cotisations d'une manière générale."

Les syndicats ont déploré l'insistance du gouvernement sur l'âge légal, aujourd'hui de 60 ans, et la durée de cotisation pour une retraite complète, qui atteindra 41 ans en 2012.

"On n'a rien sur la question des financements, rien sur l'élargissement de l'assiette", a dit le président de la CFTC, Jacques Voisin. "On a le sentiment que le ministre reste sur ces deux paramètres: l'âge et la durée des cotisations."

APPEL À LA MOBILISATION

Pour le secrétaire général de la CGT, Bernard Thibault, "il est hors de question d'accepter tout ce qui reviendrait à demander aux salariés de nouveaux sacrifices".

"Beaucoup va dépendre du degré de mobilisation", a-t-il ajouté, appelant à participer aux manifestations déjà prévues le 20 avril, et surtout le 1er mai, avant d'autres rendez-vous.

Force ouvrière a confirmé son opposition au relèvement de l'âge légal ou de la durée de cotisation, tandis que la CGT, la CFDT et la CFTC ont défendu le maintien de l'âge légal à 60 ans.

La CFE-CGC n'écarte pas de pouvoir accepter un relèvement un jour, mais seulement quand le taux d'emploi des seniors atteindra 50% contre 38% aujourd'hui.

"Ce n'est pas le début de la concertation, c'est le début de la confrontation", a résumé le secrétaire général de FO, Jean-Claude Mailly, qui plaide pour une hausse des prélèvements.

Le président de la CGPME, Jean-François Roubaud, a jugé au contraire qu'il y avait "au moins une chose à peu près certaine, c'est qu'il faudra augmenter la durée du temps de travail" à travers une hausse de la durée de cotisation.

"Fixer 42 ans en 2020 paraît une mesure qui pourrait être raisonnable", a dit le dirigeant patronal. Quant à l'âge légal, "il faudra sans doute aussi y toucher", a-t-il ajouté.

La présidente du Medef, Laurence Parisot, s'est gardée pour sa part de répéter devant la presse sa demande récurrente de relèvement de l'âge légal et a dit espérer un "consensus".

Cependant, elle s'est à nouveau opposée à une hausse des cotisations, qui pénaliserait selon elle le niveau de vie des Français et la compétitivité du pays. "Nous ne pouvons pas continuer à résoudre la question des retraites par une augmentation régulière des cotisations", a-t-elle déclaré.

"ACCENTUER LES INÉGALITÉS"

Eric Woerth, qui a reçu lundi cinq syndicats et trois organisations patronales, a dit que les premières options précises seraient présentées mi-mai et qu'un projet plus détaillé le serait mi-juin, pour un passage au conseil des ministres début juillet. Le gouvernement espère présenter le texte en septembre au Parlement.

Selon le secrétaire général de la CFDT, François Chérèque, aller aussi vite fait courir le "risque de se contenter de faire évoluer les paramètres que l'on connaît et, de ce fait, accentuer les inégalités qui existent".

Citant ceux qui commencent à travailler jeunes, les métiers pénibles ou précaires, les inégalités hommes-femmes, il a jugé qu'"il ne saurait y avoir de réforme juste si l'on ne voit pas toutes ces inégalités".

Le maintien de l'âge légal à 60 ans est pour la CFDT "un élément central", a-t-il souligné.

Jean-Claude Mailly a déclaré pour sa part que "sur les questions d'âge, il y a un blocage de notre part. Là-dessus, il n'y a rien à négocier".

Selon un sondage TNS Sofres Logica pour Europe 1 publié lundi, 56% des Français sont opposés au report de l'âge légal et 38% se disent prêts à manifester ou à faire grève.

Jean-Claude Mailly s'est dit capable de trouver une vingtaine de milliards d'euros de recettes supplémentaires.

"Nous sommes partisans de mettre une cotisation plus forte sur l'intéressement, la participation, les stocks options et de revoir certains dispositifs fiscaux", a-t-il dit, citant l'exonération des plus-values sur les ventes d'actions, qui représente selon lui 20 milliards d'euros en trois ans.

Pour les sociétés, "on peut aussi très bien prévoir un impôt sur les bénéfices plus fort pour la part distribuée en dividendes que pour la part réinvestie", a-t-il ajouté.

La loi de financement de la Sécurité sociale pour 2010 prévoit que le déficit du régime général, qui concerne la majorité des salariés du privé, atteindra 10,7 milliards d'euros, après 7,0 milliards estimés l'an dernier.

Édité par Sophie Louet