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Coronavirus: ces PME qui réorientent leur production pour répondre aux besoins du personnel soignant

Au lieu de fermer, de nombreuses petites entreprises industrielles ont adapté leurs outils de production pour fabriquer des blouses, des écouvillons, des masques alternatifs ou du gel hydro-alcoolique. Tour d'horizon de cette mobilisation générale.

La France est entrée dans une économie de guerre afin de lutter contre l'épidémie de coronavirus. De grands fleurons de notre industrie ont ainsi décidé de produire des équipements pour soutenir les soignants comme LVMH (masques et gel) ou le consortium mené par Air Liquide pour fabriquer des respirateurs.

La mobilisation est la même du côté des PME, notamment celles travaillant initialement dans le textile. Dans le Cantal, la société Piganiol, fabricant historique de parapluies produit désormais des blouses lavables pour les soignants. Tout l'effectif, soit une dizaine de couturières, est mobilisé. C'est une première pour cette entreprise née il y a plus de 130 ans.

"De toute façon, nous avons perdu 95% de nos distributeurs", explique à France Info le directeur, Mathieu Piganiol. "Il fallait réagir. Il n'y a rien de pire pour un entrepreneur de ne pouvoir rien faire. Nous savons découper, piquer et assembler. En 48 heures, nous sommes passés de la production de parapluies aux blouses chirurgicales. L'industrie française est capable de s'adapter."

"Il fallait réagir"

Cette réorientation de la production a été rendue possible grâce à l'expertise des équipes mais aussi à travers une collaboration avec une autre PME, "le tissu blanc lavable est fourni par un fabricant de couette voisin. C'est de la débrouille", ajoute le responsable. Résultat, une production de quinze blouses à l'heure et des demandes qui arrivent de partout, hôpitaux comme Ehpad.

En Normandie, le Groupe Lemoine spécialisé dans la fabrication de produits de soin et d’hygiène à base de coton (disques de démaquillage et cotons-tiges), a créé au cœur d’une de ses usines à Caligny, en Normandie, une ligne de production dédiée à la fabrication d’écouvillons rhino-pharyngés nécessaires pour le dépistage du Covid-19.

"Il a fallu adapter totalement une ligne de production afin de respecter les spécificités d’un exemplaire d’écouvillon rhino-pharyngé de milieu hospitalier. Grâce à la mobilisation et à l’engagement sans faille des ingénieurs et des équipes techniques de Lemoine France, la fabrication des premiers écouvillons a pu avoir lieu en seulement huit jours, dans un cadre de production adapté de manière à garantir la sécurité de chacun", explique le groupe familial fondé en 1978.

Les premiers échantillons ont été déclarés conformes aux écouvillons référents par le médecin chef du service de biologie médicale de l’armée à Percy ce week-end et les essais sont en phase de finalisation à l’AP-HP. Lorsque l'entreprise aura (sûrement ce lundi) obtenu le feu vert des autorités, elle sera en capacité de produire jusqu’à 1,5 million d’écouvillons par semaine.

Des drones aux valves

"C’est une immense fierté pour le Groupe Lemoine et ses équipes d’avoir su déployer leur savoir-faire français pour produire cet écouvillon rhino-pharyngé nécessaire aux tests de dépistage du Covid-19. Nous espérons que la disponibilité de ce matériel important pour tous les personnels médicaux aujourd’hui, à l’hôpital, en pharmacie, ou dans les laboratoires d’analyse biologique, les aidera dans leur travail au quotidien dans cette période si difficile" insiste Jeanne Lemoine, la directrice générale.

En Bretagne, ce sont des PME du textile qui se mettent en ordre de bataille pour participer à l'effort. On peut citer Dolmen à Guingamp, un spécialiste du vêtement de travail, le célèbre Armor Lux à Quimper ou encore Noret ou Outils Océan qui ont réorienté leurs production vers la fabrication de masques barrières.

Toujours en Bretagne, Drone Act qui fabrique habituellement des drones utilise ses imprimantes 3D pour réaliser des valves pour respirateurs. Tandis que Guardtex qui produit des équipements de protection pour le monde du nautisme a adapté ses outils pour fabriquer des visières de protection. Plus de 10.000 sont déjà sorties des lignes et vont alimenter les hôpitaux de la région.

Autre exemple dans la Loire, avec Les Tissages de Charlieu. L'entreprise a reconverti sa production textile pour fabriquer des masques en tissu lavables et réutilisables. La société vise à plein régime 100.000 masques produits par jour. "Notre volonté est de pouvoir fournir rapidement le plus de gens possible afin de répondre à l'urgence sanitaire, et faire en sorte que les stocks de masques homologués profitent prioritairement au personnel soignant", détaille l'entreprise au Parisien. Dans la Loire toujours, le fabricant de bas de contention Sigvaris est devenu en quelques jours fabricant de masques de protection.

Dans le Grand Est, l'entreprise Garnier-Thiebaut confectionne entre 2000 et 3000 masques anti-projections par jour, une douzaine de couturières est mobilisée.

Des parachutes aux masques

Même chose en Occitanie avec la société Nervures qui est passé de la production de voiles de parapente et de parachute à celle de masques de protection.

On le sait, on manque également de gel hydroalcoolique. La brasserie Lancelot a ainsi donné 1300 litres d’alcool pur à 96 degrés tandis que le parfumeur toulousain Berdoues en partenariat avec le CHU de Toulouse, produit chaque jour 4.000 flacons destinés au personnel soignant, avant une montée en puissance progressive.

"Nous avions en stock toutes les matières premières, à savoir la glycérine, l'alcool et un troisième élément très important qui est présent dans notre gamme Bondépil. Nous avons également réquisitionné en interne des flacons qui étaient prévus à une autre utilisation initialement", explique à La Tribune sa directrice Sophie Berdoues.

Et les autres exemples de reconversions industrielles sont très nombreux, partout en France. Une chose est sûre, cette épidémie a véritablement créé un vent de solidarité au sein des PME française qui démontrent ici leur capacité à s'adapter rapidement pour une cause nationale.

Olivier Chicheportiche