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Finances publiques

Crise de la dette : faut-il taxer les banques ?

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Inquiets concernant la résistance des banques dans la crise grecque, les marchés européens ont chuté hier lundi. A deux jours du sommet de Bruxelles et alors que l’Allemagne rejette toujours l’idée française d'une taxe sur les banques, des économistes tentent de rassurer les petits épargnants.

La crise de la dette grecque a fait plonger les bourses européennes ce lundi. La Bourse de Paris a clôturé en baisse (-2,04%) pour le troisième jour consécutif et le CAC 40 a atteint son plus bas niveau depuis janvier, pendant que Londres et Francfort lâchaient tous les deux 1,55%, et Milan 3,06%. Et, particulièrement touchées par la baisse, les banques. Hier, BNP Paribas a perdu 3,64%, Crédit Agricole 3,57%, Dexia 4,31%, Natixis 4,63% et Société Générale 5,48%.

8 banques européennes sur 91 jugées trop fragiles

Pourquoi toutes les bourses européennes ont-elles ainsi chuté ? D’abord parce que les investisseurs ont peur que les banques s'écroulent si la Grèce tombe en faillite. Elle ne rembourserait alors plus sa dette et les banques subiraient des pertes sèches. Pour rassurer les investisseurs, ces banques ont pourtant passé haut la main des tests de résistance publiés vendredi : seulement 8 banques européennes sur 91 évaluées ont été jugées trop fragiles pour résister à une crise de 2 ans. Mais ces stress tests, malheureusement, n'ont pas envisagé une faillite de la Grèce...
Deuxième raison majeure : le sommet extraordinaire de la zone euro prévu ce jeudi à Bruxelles. Les dirigeants européens doivent absolument définir un nouveau plan de sauvetage pour la Grèce. Un plan comparable au premier, c'est-à-dire de 110 milliards d'euros. Car le budget voté l'an dernier est déjà insuffisant. Et pour l'instant, personne n'est d'accord sur son financement.
Jean Leonetti, le ministre français des Affaires européennes, a confirmé ce lundi que Paris souhaite la mise en place d'une taxe sur les banques. Une idée pour l'instant rejetée par l'Allemagne.

« Les banques distribueront moins de dividende à leurs actionnaires ! »

Et pour Dominique Plihon, professeur d'économie à l'Université Paris-Nord et président du Conseil scientifique d'Attac, « les banques vont [tout simplement] tailler dans leurs profits, dans leurs résultats, qui ont été exceptionnels ces deux dernières années. Elles distribueront moins de dividende à leurs actionnaires. On distribuera moins de stock options et de revenus absolument scandaleux à un certain nombre de responsables. Et je crois que si les banques font une cure d’amaigrissement, ce sera très bien et que c’est tout à fait compatible avec la protection de l’épargne populaire. De plus, la banque centrale européenne (BCE) peut intervenir pour refinancer les banques qui auraient des difficultés temporaires – s’il y en avait –, en rachetant une partie de la dette que détiennent ces banques ».

« Il ne faut surtout pas paniquer »

Persuadé « qu’il n’y a pas un péril énorme en la demeure », Dominique Plihon, tente de rassurer les petits porteurs qui pourraient avoir peur pour leurs économies et aller retirer leur argent à la banque : « C’est ce qu’il ne faut surtout pas faire, puisque ça créerait une panique bancaire, qui pourrait causer beaucoup de tort au système bancaire et surtout aux épargnants. Donc, il ne faut pas paniquer. Si les autorités sont capables de proposer un plan équilibré, qui fasse payer les banques, tout en ménageant leur survie, ceux qui paieront d’abord – et c’est souhaitable, c’est leur rôle –, ce sont les actionnaires, qui sont là pour absorber les risques ; et c’est pas le rôle des déposants ».

« L’effort demandé aux banques reste minime »

De son côté, Anne-Laure Delatte, professeur d'économie à la Rouen Business School, estime que « dire qu’on va mettre une taxe sur les profits bancaires, pour participer à l’effort de la dette grecque, c’est vraiment pour faire passer la pilule et pour dire aux contribuables : vous voyez, le secteur privé peut aussi y participer. L’effort demandé est assez peu important, poursuit-elle, déçue : sur 340 milliards, on leur demande 30 milliards ; soit un effort d’à peine 10%, alors qu’on demande 110 milliards aux Etats européens. Et tout ça, c’est les contribuables qui le payent ».

« On va trouver une solution, parce que tout le monde y a intérêt »

Confiante sur l’issue de ce sommet bruxellois, Anne-Laure Delatte souligne par ailleurs que « les banques françaises et allemandes détiennent 70% de la dette grecque : la BNP est à 5 milliards, la Société Générale 2,5 milliards, le Crédit Agricole 600 millions. Tout ceci est un jeu de négociation, il va falloir mettre les gens à la même table, avec les Etats européens et l’Etat grec, et trouver une solution. Quand est-ce que vous nous remboursez ? Combien vous nous remboursez ? Et cette solution, on va la trouver, parce que tout le monde a intérêt à la trouver ».

La Rédaction, avec Sophie Delpont