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Economie et Social

Crise des Gilets Jaunes : les entreprises ont les réponses, pas l’Etat

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- - Anne-Christine Poujoulat - AFP

TRIBUNE - Face à l'appauvrissement de la France, il faut cesser de croire que la solution viendra d’une loi ou d’une taxe d’un Etat providentiel. Faisons confiance à cette autre dimension de la citoyenneté, l’initiative entrepreneuriale des Français.

Notre pays attend fébrilement les suites des quatre mois que nous venons de vivre, apportant leur flot de témoignages d’un peuple refusant de laisser se noyer des pans entiers de sa population, submergés par les carences en besoins élémentaires.

Besoin de désenclavement, là où on est assigné à résidence dans des zones en déshérence ; de lieux de rencontre, là où les habitants se croisent sans avoir nulle part où se retrouver, où se parler, où éprouver ensemble leur appartenance à une même communauté de destin ; de reconstruction, là où les architectures déshumanisées ont figé dans le béton des cités déracinées, sans culture, sans identité ; de vivre dignement de son travail, là où des emplois trop précaires, trop courts, trop rares installent la réalité de travailleurs pauvres…

La rage du désespoir résonne dans nos rues, sur nos écrans, dans les débats locaux, imposant la réalité des ravages d’un appauvrissement général de notre pays que les aides prodiguées par notre Etat-providence ne parviennent plus à endiguer. Mais habitués que nous sommes à considérer que les réponses viendront nécessairement de l’Etat, malgré nos comptes publics exsangues, notre fiscalité hypertrophiée et nos dettes abyssales, chacun recherche la nouvelle taxe et le nouveau mécanisme redistributif aptes à rassurer ces millions de citoyens qui ne veulent plus être orphelins d’une promesse républicaine qui semble les avoir abandonnés.

Pourtant, si l’Etat pouvait tout, les 57% de dépenses publiques dans notre richesse nationale ou nos records de prélèvements obligatoires auraient depuis longtemps fait de la France un jardin d’Eden envié.

Il ne s’agit pas de prétendre, au nom d’un libéralisme caricatural, que l’Etat, les collectivités locales ou les organismes publics n’auraient pas un rôle à jouer dans le redressement national. Il s’agit seulement de souligner ici que pour combattre la pauvreté, il faut créer plus de richesses. Or, la richesse de la Nation ne se décrète pas à coût de taxe ou de nouvelles dépenses publiques. Elle se construit par l’intervention d’entreprises, d’investisseurs, de projets économiques, d’éclosions de nouveaux entrepreneurs prenant à bras le corps la réalisation de réponses concrètes à tous les besoins insatisfaits qui minent notre pays, parce qu’apporter des réponses à des besoins, c’est d’abord et avant tout le rôle des entreprises, des investisseurs et du marché, même si l’Etat peut favoriser les dynamiques vertueuses.

Il est ainsi urgent de revoir intégralement toutes les réglementations encadrant les grandes surfaces, qui ont été instaurées pour protéger le commerce de proximité. Elles n’ont conduit qu’à la désertification des villes moyennes et des villages, précipitant la ruine de tous ceux qu’on prétendait protéger, et à l’éclosion de verrues péri-urbaines qui gâchent tous nos paysages et les entrées de nos villes. Lorsqu’on bannit la richesse économique des villages et villes de France, comment s’étonner que s’y installe la pauvreté ? Il faut rapatrier en centre ville ces activités, les installer dans des bâtiments classiques en échange de leurs rénovations. C’est toute l’activité économique, culturelle et sociale des villes moyennes qui en sera ainsi revitalisée, parce que la richesse économique est le socle du dynamisme social et culturel.

Fort de cette impulsion économique nouvelle, des bistrots vont pouvoir rouvrir, là où ils avaient disparu par milliers, des magasins refleurir, parce que les petits commerces pullulent naturellement autour des pôles commerciaux, des quartiers se réaménager, parce que les investisseurs reviendront…

Élus locaux, groupements d’entrepreneurs, chambres consulaires, réseaux sociaux, médias locaux, associations... tous doivent organiser des appels à projets entrepreneuriaux pour faire émerger des réponses aux défis locaux, en irrigant les territoires des réseaux de financements de proximité pour donner vie à ces projets. Il y a plus de 650.000 nouveaux entrepreneurs qui se lancent dans l’aventure entrepreneuriale tous les ans. C’est là une nouvelle citoyenneté qu’il faut encourager, accompagner et organiser pour qu’elle enrichisse chaque recoin de France.

Ce sont ces milliers de citoyens providentiels qui peuvent utilement s’attaquer aux chantiers capables de transformer la France pour reconstruire les banlieues sans âme, faire émerger des villes en lieu et place de dortoirs, pour casser les rez-de-chaussée d’habitation et faire éclore des commerces, pour organiser des circuits de transport innovants, aptes à assurer un désenclavement efficace… Les besoins sont foisonnants et représentent des dizaines de milliers de projets entrepreneuriaux. S’il faut une impulsion de financements publics, pourquoi pas, mais le réseau de nos banques nationales et locales sont des partenaires naturels pour permettre le ciblage des économies des Français vers cette renaissance économique, seule capable d’enclencher la dynamique vertueuse de l’investissement, des emplois, de la vitalité sociale, du recul du chômage, du recul de la pauvreté, des réponses concrètes et tangibles aux besoins communs ; en somme, de l’enrichissement collectif.

Cessons de croire que la solution viendra d’une loi ou d’une taxe d’un Etat providentiel. Faisons confiance à cette autre dimension de la citoyenneté, l’initiative entrepreneuriale des Français, pour faire naître les dizaines de milliers de projets aptes à porter notre croissance à 5% du PIB, avec une croissance utile, répondant aux besoins, grâce à de l’investissement de proximité, aux antipodes des injections de pouvoir d’achat keynésien saupoudrés sans discernement, qui creusent tous nos déficits sans rien financer de durable. S’attaquer aux besoins qui minent notre pays est largement à même de nous permettre d’atteindre une telle croissance. Alors seulement, tous nos maux reflueront : recul du chômage, augmentation du pouvoir d’achat, retour à l’équilibre de nos comptes sociaux, résorption de nos déficits publics, capacité à baisser notre pression fiscale, reconstitution de la vitalité sociale dans nos zones périphériques…

Plus que des lois, ce sont des entrepreneurs porteurs de réponses concrètes, et plus que des taxes, ce sont des investissements qui sont nécessaires, alors que les Français laissent dormir sur leurs comptes 440 Milliards d’euros. Parvenir à drainer les capacités d’investissement et l’énergie entrepreneuriale de notre pays pour aller s’attaquer aux besoins avérés des Français partout sur le territoire, représente un enjeu d’organisation collective autrement plus important que de débattre des réformes fiscales dans tous les villages de France.

Léonidas Kalogeropoulos, Président du cabinet Médiation et Arguments, Vice-Président du mouvement patronal ETHIC