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Croissance, chômage: quel impact aurait le programme de Bruno Le Maire?

Bruno Le Maire entend réduire la dépense publique de 85 à 90 milliards d'euros

Bruno Le Maire entend réduire la dépense publique de 85 à 90 milliards d'euros - Sébastien Bozon - AFP

Après François Fillon, l'Observatoire BFM Business a cette fois mis au banc d'essai les mesures économiques du député de l'Eure. Si son programme redresse les comptes publics et réduit le chômage, il aura toutefois un impact globalement négatif sur la croissance à l'horizon de cinq ans.

Après François Fillon vendredi 23 septembre, au tour du programme de Bruno Le Maire d'être passé au crible. L'Observatoire BFM Business a de nouveau utilisé son modèle économétrique, Mac Sim III, pour étudier l'impact sur cinq ans des principales mesures formulées par le député de l'Eure sur les grands agrégats économiques à savoir la croissance, le chômage, le déficit public et le commerce extérieur.

Bruno Le Maire prévoit notamment une importante réduction de la dépense publique de 85 à 90 milliards d'euros sur l'ensemble du quinquennat, alors que le coût de ses promesses de campagne (nouvelles aides et réductions d'impôts) n'est évalué qu'à 55 milliards d'euros.

Coups de pouce équilibrés

Concrètement, sa mesure phare sur le volet des économies est de réduire le nombre de fonctionnaires de 500.000 postes sur cinq ans soit 10% de l'emploi public ou 1,8% par an. Côté fiscalité, Bruno Le Maire équilibre ses coups de pouce. La fiscalité des ménages est réduite avec une baisse de la CSG de 7,5% à 6%. L'ISF est également supprimé. Les entreprises, elles, bénéficient d'un taux d'impôt sur les sociétés ramené à 28%, ainsi que de la transformation du CICE en baisse de charges. En outre, Bruno Le Maire promet aux TPE la suppression de toutes les charges pendant un an pour toute embauche.

Enfin le candidat à la primaire de la droite et du centre compte mettre en œuvre tout un lot de réformes sur le marché du travail, qui consistent notamment à en finir avec les 35h en permettant aux entreprises de fixer elles-mêmes la durée légale du temps de travail. Il compte aussi réformer le droit de la concurrence et le principe de précaution.

À partir de ces éléments, l'Observatoire a construit deux scénarios. 

> 1er scénario: le programme est mis en oeuvre à 100%

Dans ce cas de figure Bruno Le Maire tient toutes ses promesses en mettant en place 100% des mesures de son programme. De plus, il réussit effectivement à flexibiliser le marché du travail et à mettre en oeuvre les réformes structurelles (réglementation, principe de précaution, droit de la concurrence, etc...).

Au final, au bout de cinq ans, son programme économique ampute la croissance d'un peu plus d'un point de PIB. Comme le montre le graphe 1 (voir fin d'article) les premières années de son mandat sont marquées par les forts effets négatifs de la réduction de la dépense publique. Mais dès la fin de la troisième année, le poids du programme de Bruno Le Maire sur la croissance s'atténue, l'essentiel des efforts budgétaires est passé et la réforme du marché du travail commence à produire ses effets. La politique économique du député les Républicains commence à même être positive pour la croissance dès la deuxième partie du mandat.

Si le programme de Bruno Le Maire grève quelque peu la croissance, il redresse clairement les comptes publics. La réduction des dépenses de l'État permet au final de redresser les finances publiques de 4,5 points de PIB entre fin 2017 et fin 2022.

Sur le volet social, si l'effet sur le chômage serait négatif les deux premières années, la croissance s'enrichirait en emplois, notamment grâce aux baisses de charges et aux réformes structurelles. Du coup, entre fin 2017 et fin 2022, le taux de chômage baisserait ainsi de 1%, globalement. Enfin, et non des moindres, la France regagnerait en compétitivité, la balance commerciale s'améliorant énormément (+6,7 points de PIB).

> 2e scénario: les réformes structurelles ne sont pas mises en oeuvre

Ici Bruno Le Maire tient toujours ses promesses fiscales et budgétaires mais, cette fois, les réformes structurelles ne passent pas ou sont abandonnées. Ce qui a un certain poids. En effet, les expériences à l'étranger montrent qu'une plus grande flexibilité du marché du travail permet aux entreprises d'investir d'avantage et améliore la productivité de l'économie, qui peut ainsi générer plus de croissance avec moins de moyens.

Dans ce scénario, ces effets bénéfiques disparaissent. En conséquence, le programme de Bruno Le Maire plombe de plus en plus le PIB au fil du quinquennat avec, au final, un impact en cumulé de 3,2 points. Au lieu de se redresser, le chômage augmente (+0,9% sur 5 ans), ne bénéficiant plus de la flexibilité du marché du travail. Points positifs malgré tout: le déficit public est encore largement réduit (3,4 points de PIB en moins sur cinq ans) et la compétitivité de la France s'améliore (+3 points de PIB).

- Retrouvez aussi l'interview de Bruno Le Maire par Hedwige Chevrillon dans "Le Grand Oral de l'Économie", de 12 à 13h et de 18h à 19h.

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Évolutions par rapport à un scénario où l'économie croît à son rythme de référence

L'impact sur 5 ans du programme de Le Maire (*)

Scénario 1 Scénario 2

Croissance (PIB) -1,1% -3,2%

Solde public (pts de PIB) 4,5 3,4

Chômage (% du taux) -1% +0.8%

Commerce ext. (pts de PIB) +6,7 +3

(*)Évolutions par rapport à un scénario où l'économie croît à son rythme de référence

Emmanuel Lechypre et Julien Marion