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Economie et Social

CSG : on a sauvé le « bon impôt »

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La ministre de la santé a clairement indiqué ce matin qu’elle allait rejeter l’idée d’une CSG calquée sur l’impôt sur le revenu

Le projet est né dans le cadre de la discussion budgétaire sur le financement de la sécurité sociale. Pour alléger la pression fiscale sur les retraités, l’aile gauche de la République En Marche emmenée par le député du Vaucluse Jean-François Cesarini, a réussi à faire voter un amendement qui créait trois taux différents de CSG pour pouvoir la baisser en dessous de 1600€ de revenus, et l’augmenter au-dessus de 3000€ de revenus. Amendement qui sera donc rejeté lors de la discussion en séance plénière. Agnès Buzyn la ministre de la santé le dit clairement ce matin dans Les Echos : « il faut arrêter de créer des seuils qui génèrent ensuite des débats sans fin et des incompréhensions, les parlementaires sont évidemment très sollicités par leurs électeurs, ce que je peux comprendre, mais nous avons décidé d'orienter différemment notre action »

Une décision capitale

Cette décision est capitale. La CSG coche en effet toutes les cases du bon impôt : il est progressif, c’est-à-dire qu’il est payé en fonction des revenus, mais avec un taux unique, le même pour tout le monde. Il porte sur une assiette très large, tout le monde paye la CSG, mieux encore, la CSG touche absolument tous les revenus, alors que le nombre de ceux qui paient l’impôt sur le revenu se réduit comme peau de chagrin. Résultat : on a un impôt qui rapporte plus de 100 milliards d’euros et que personne ou presque ne conteste. D’ailleurs, il est intéressant de noter qu’il n’a été contesté par les retraités que quand ils ont eu l’impression d’être traité différemment du reste de la population, confirmant que c’est bien la base très large qui rend l’impôt largement acceptable et accepté. 

En face l’impôt sur le revenu coche toutes les mauvaises cases. Payé maintenant par moins de la moitié des foyers, mal vécu par ceux qui le paient car ils ont le sentiment de payer beaucoup et de payer « pour les autres », et rapportant finalement assez peu (l’impôt sur le revenu rapporte en France un peu plus de 3% du PIB contre 9% dans la moyenne de l’OCDE. Attention, on ne parle que de l’impôt sur le revenu, pas de l’ensemble des prélèvements obligatoires où seuls quelques pays scandinaves peuvent nous contester le titre de champion du monde)

La rêve de Thomas Piketty

La séquence aurait pu être très grave. L’économiste Thomas Piketty fait depuis plusieurs années la promotion d’une fusion entre l’impôt sur le revenu et la CSG. Et ne croyez pas que dans ce cas-là le bon impôt chassera le mauvais, évidemment non, c’est le mauvais impôt qui chassera le bon, et on se retrouvera avec une énorme masse de prélèvements avec des taux incompréhensibles qui partent dans tous les sens, tellement ingérable que l’on sera obligé de la trouer de niches diverses et variées qui rendront l’ensemble plus complexe encore, avec comme seul résultat de monter la pression fiscale sur ceux qui payent l'IR et d’affaiblir encore un peu plus le consentement à l'impôt.

Pourquoi dans ces conditions ce type de solutions sont-elles proposées ? A cause d’une croyance erronée que nous aurions en France un problème de redistribution, ce qui est totalement faux puisque la France est le pays au monde qui réduit le plus ce que l’on appelle les inégalités primaires, c’est-à-dire avant les transferts sociaux. La CSG a vu le jour en 91 comme une cotisation avec un taux très bas pour soutenir le financement de la protection sociale et sa dimension solidarité. Avec le temps elle a explosé et muté en impôt pour devenir de facto la 1ère tranche d'IR . A partir de là il sera de plus en plus dur de lutter contre l'idéologie fiscale qui veut aller au bout de ce processus. Processus infernal répétons-le, heureusement bloqué par le gouvernement, mais pour combien de temps ?