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Finances publiques

Déficit: la Cour des comptes met Sapin sous pression

La Cour des comptes met en doute les prévisions de croissance et d'inflation sur lesquelles reposent le Budget 2015

La Cour des comptes met en doute les prévisions de croissance et d'inflation sur lesquelles reposent le Budget 2015 - Kenzo Tribouillard - AFP

La Cour des comptes a, ce mercredi 11 février, émis d'important doutes sur l'objectif de déficit de l'exécutif, qui vise un chiffre de 4,1% pour cette année.

Comme souvent, la Cour des comptes a du mal à croire aux engagements du gouvernement. Dans son rapport annuel publié ce mercredi 11 février, les Sages de la rue Cambon ont ainsi de nouveau émis d'importants doutes sur les objectifs de l'exécutif.

Ainsi, les 4,1% de déficit visés par le gouvernement représentent "un objectif dont la réalisation est incertaine", estime la Cour.

Selon cette dernière, qui inspecte sur 25 pages la "situation d'ensemble des finances publiques" à fin janvier 2015, la prévision du gouvernement "repose sur une prévision de croissance des recettes qui présente des fragilités et sur un objectif d'évolution des dépenses en valeur qui peut se révéler difficile à atteindre".

En cause également, la prévision d'inflation à 0,9% qu'elle juge trop forte. "Comme en 2014, cette baisse de l'inflation est de nature à entraîner une réduction significative des recettes publiques", estime-t-elle.

Des risques identifiés

Elle critique également la manière dont le gouvernement entend arriver à faire 21 milliards d'euros d'économies dans la dépense publique en 2015, soit une croissance des dépenses de 1,1% en valeur. Rappelant qu'"une croissance en valeur aussi faible n'a pas jamais été réalisée", la Cour identifie néanmoins plusieurs risques de ne pas y arriver.

Parmi eux, entre autres, des dépenses pour les opérations de défense selon elle sous-estimées ou la rupture du contrat Ecomouv' donnant lieu à une indemnisation de 400 millions d'euros en 2015.

Elle relève également que le comité d'alerte de l'Ondam (prévisions de dépenses de l'assurance-maladie) "a souligné dans son avis du 7 octobre 2014, que le respect de l'objectif pour 2015 serait rendu plus difficile que les années précédentes".

La Cour rappelle en outre le rôle que jouerait une moindre inflation dans la maîtrise des dépenses: selon elle "l'estimation des économies aurait dû être réduite de deux milliards d'euros" pour en tenir compte. Elle conteste également la baisse des ressources aux opérateurs de l'Etat annoncée à 1,1 milliard et qui ne sera selon elle que de 600 millions.

"Des éléments de fragilité"

Les magistrats doutent enfin que les baisses de dotations aux collectivités territoriales se traduisent automatiquement en économies. Plus généralement, ils déplorent "approximations" et "imprécisions" dans le programme d'économies de 21 milliards d'euros tel qu'il est décrit dans les documents budgétaires du gouvernement.

Au-delà, la Cour rappelle qu'un nouveau dérapage du déficit public en 2015 pourrait entraîner un décalage pour les années suivantes, alors que le gouvernement a promis de revenir sous la barre des 3% de déficit public en 2017. D'autant plus, insiste-t-elle, que "les prévisions de recettes et de dépenses au-delà de 2015 présentent des éléments de fragilité".

Dans sa réponse à ce rapport, le ministère de Finances renvoie la Cour des comptes dans ses filets: "le rythme de l'assainissement des finances publiques doit être adapté aux conditions économiques actuelles caractérisées par une faible croissance et une inflation basse", assure-t-il, assumant le choix pour 2015 d'"une réduction du déficit public moins marquée que celle constatée les années précédentes".

En conférence de presse, le ministre de l'Agriculture et porte-parole du gouvernement Stéphane Le Foll a lui affirmé qu"'il n'y a rien à changer sur les objectifs qui ont été fixés".

J.M. avec AFP