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Dette à 120% du PIB, pour Jean Pisani-Ferry, "c'est sérieux" mais il "faut le faire"

Invité de BFM Business, l'économiste et professeur à Science Po souligne qu'il faut maintenir les dispositifs de soutien aux entreprises même s'il convient de les resserrer.

Les mesures massives de soutien aux entreprises et aux ménages pour compenser les effets de la crise du coronavirus creusent évidemment les comptes de l'Etat et la dette française. Celle-ci est déjà à fin mars à 101% du PIB et le gouvernement prévoit qu'elle se hissera en 2020 à 120%, un niveau sans précédent.

Pour Jean Pisani-Ferry, économiste, professeur à Science-Po, directeur du programme d'Emmanuel Macron en 2017, la priorité est de ne pas couper la perfusion des aides aux entreprises et notamment le chômage partiel. "Il faut effectivement resserrer, bien sûr (le gouvernement prépare d'ailleurs un nouveau dispositif, NDLR) il s'agit de ne pas faire exactement ce qu'on a fait pendant la période de crise mais il ne faut pas enlever la perfusion", insiste-t-il sur BFM Business.

Syndrome italien

Quant aux conséquences sur la dette, elles doivent être relativisées selon lui. "Tous les pays vont prendre 20 points de dette ou 30 points de dette. C'est sérieux bien sûr mais on a une chance extraordinaire c'est qu'on emprunte toujours à des taux d'intérêt négatifs donc la dette ne coûte pas cher", souligne l'économiste.

"On emprunte à dix ans, dans dix ans on ne sait pas quels seront les taux d'intérêt quand on va devoir la rembourser. Donc c'est pas négligeable de savoir : "est-ce qu'on est en train de se mettre des contraintes pour plus tard qui vont être trop lourdes ?". Mais pour l'instant il faut faire ça, il ne faut pas mégoter son soutien à l'activité", poursuit-il. 

Et de justifier: "le plus grave pour l'économie française, la menace la plus sérieuse, c'est la contraction. C'est le fait que cette crise résulte comme une sorte de tassement du système économique français et qu'on se réveille de ça avec en permanence un niveau d'activité qui est de -5, -10% en-dessous de ce qui était avant parce qu'il y a eu des faillites, parce qu'il y a eu des secteurs qui se seraient contractés. C'est le syndrome italien".

"L'Italie, au cours des 20 dernières années, est un pays qui a mené une politique budgétaire beaucoup plus stricte que la politique budgétaire française. Mais dont l'activité économique s'est contractée et ce pays est pris dans un cercle vicieux de la dette à cause de ça, et c'est ça qu'il faut éviter", conclut Jean Pisani-Ferry.

Olivier Chicheportiche