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Dette : la France entame son programme record

AFT Front office, à Bercy, lors d'une émission de dette

AFT Front office, à Bercy, lors d'une émission de dette - ERIC PIERMONT / AFP

Première émission de dette long terme ce jeudi, 8,236 milliards d'euros ont été levés à des taux en baisse

L’année 2019 sera bien l’année de tous les records pour les besoins de financement extérieurs de l’Etat. 2018 établissait un nouveau seuil de prélèvements obligatoires à 1000 milliards d’euros, si l’on en croit les prévisions budgétaires, ce record ne sera pas battu. En revanche sur les financements extérieurs, c’est du jamais vu : 200 milliards d'euros seront collectés sur les marchés internationaux. Les besoins de financement de l'état se montant en 2019 à 236 milliards. 

200 milliards collectés ne veut pas dire 200 milliards de dette nouvelle, car la somme comprend notamment le remboursement de 130,2 milliards d'euros de dette à moyen et long terme venant à échéance. Mais la gestion de la dette française étant une opération de très haute technicité, certaines maturités, certaines échéances vont être modifiées, et l’Agence France Trésor va néanmoins émettre un montant supérieur au déficit budgétaire : 200 milliards d'euros sur moyen et long terme, et des emprunts court terme de 15 milliards pour « améliorer la liquidité des titres dont l’encours a diminué ces dernières années ». En fait il semble que le programme ait été conçu pour ne pas dépasser ce seuil de 200 milliards et éviter de donner l’impression d’une dérive importante. La France sera sans doute le deuxième émetteur de dette de la Zone Euro, derrière l’Italie qui n’a pas donné les chiffres officiels de son programme.

Une année « compliquée »

Ce chiffre symbolique de 200 milliards est en partie le résultat des dernières mesures « pouvoir d’achat » annoncées par le président de la République qui augmentent le déficit budgétaire 2019 de 5 milliards d'euros, et l’Agence France Trésor « procédera à des rachats de titres en fonction des conditions de marché ». Elle doit anticiper notamment des mouvements sur les taux d’intérêts, sachant que la Banque centrale européenne, première détentrice de dette française aujourd’hui, a promis la semaine dernière que la période de taux courts « en dessous de zéro » allait durer « encore longtemps ».

Traditionnellement, quand les investisseurs répondent présents, le programme d’émission de dette est concentré sur le premier semestre afin de limiter les risques d’exposition à un éventuel retournement de marché. Or en ce début d’année, les soubresauts du marché actions sont favorables aux dettes d’Etat. L’Allemagne va émettre pour 148 milliards d'euros pour des remboursement d’échéances, ce qui ne suffira pas à satisfaire l’appétit des marchés. La dette française reste donc très demandée, ce qu'a confirmé cette première adjudication de l'année

Il n’empêche, « l’année 2019 va être compliquée » a reconnu le directeur général de l’AFT, « ce sera plus difficile avec 200 milliards qu’avec 195 milliards. Le montant de la hausse peut paraître faible au regard de la taille du programme, mais il va falloir placer ces 5 milliards supplémentaires ». La France doit d’ailleurs indexer une partie de son programme sur l’inflation (10% des émissions nettes à moyen et long terme), et non pas sur des taux d’intérêts qui restent historiquement bas. 

42 milliards d'euros pour le service de la dette

En 2018, la France s’est financée avec un taux moyen à l’émission de 0,53%, un peu au-dessus du plus bas historique de 2016 à 0,37%. Des conditions qui restent donc très favorables, et néanmoins le service de la dette (l’ensemble des frais financiers) à 41,9 milliards d'euros est le deuxième poste de dépenses du budget de l’Etat, simplement dépassé aujourd’hui par l’Education nationale.

A la fin du troisième trimestre 2018 (derniers chiffres officiels) la dette française se montait à 2.322,3 milliards d'euros, en hausse de 22,5 milliards, soit 99,3% de la richesse produite en France sur une année. Beaucoup d’économistes s’attendent à ce que l’on franchisse le ratio de 100% à l’issue de l’année 2019. Tout dépendra de la réalité de la croissance.