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Finances publiques

Emmanuel Macron, de "président des riches" à celui des classes moyennes?

Emmanuel Macron à l'Elysée

Emmanuel Macron à l'Elysée - Thomas Samson / AFP

La dernière évaluation de l'Institut des politiques publiques montre les profonds changements opérés, en l'espace d'un an, par le gouvernement en matière de mesures budgétaires.

Macron, acte 2. En juin dernier, le Premier ministre Edouard Philippe avait annoncé un virage dans le quinquennat pour tenter de clore la crise des gilets jaunes qui a secoué la France pendant plusieurs mois. Et ce nouvel acte se voit particulièrement dans le projet de loi de Finances 2020, actuellement à l'étude à l'Assemblée nationale.

Pour s'en rendre compte, il faut jeter un œil à la traditionnelle évaluation de l'Institut des politiques publiques (IPP), qui examine l'impact du budget sur les ménages. Celui d'octobre 2018 avait fait polémique, affichant clairement, notamment à la faveur de la transformation de l'ISF en impôt sur la fortune immobilière (IFI), une hausse spectaculaire des revenus des 1% des ménages les plus aisés pour 2019. Emmanuel Macron y avait définitivement acquis son surnom de "président des riches". A l'inverse, la diminution des APL, l'augmentation de la CSG pour les retraités et la désindexation des pensions avaient sévèrement grevé les revenus des plus pauvres.

Budgets 2018-2019 – Version "PLF 2019" (octobre 2018)
Budgets 2018-2019 – Version "PLF 2019" (octobre 2018) © IPP

Si le chef d'Etat n'a pas cédé sur la réforme sur l'ISF, il a néanmoins reculé sur celles qui touchaient les ménages les moins aisés pour finalement rééquilibrer un peu la balance, quelques mois plus tard, après des semaines de crise. Dans le cadre des budgets 2019 puis 2020, le gouvernement est notamment revenu sur l'augmentation de la CSG pour une partie des retraités, a décidé de réajuster à la hausse certaines prestations sociales et a pris plusieurs mesures (réduction de 5 milliards de l'impôt sur le revenu, prime défiscalisée "Macron", exonérations de cotisations sociales et défiscalisation des heures supplémentaires...) en faveur des classes moyennes. En avril dernier, Bercy estimait le coût du paquet de mesures pour répondre au mouvement des gilets jaunes à 17 milliards d'euros. Un premier ajustement avait eu lieu dans le Budget 2019, la suite des mesures devant être adoptées pour le Budget 2020.

Budgets 2018-2019 – Version "LF 2019" (janvier 2019)
Budgets 2018-2019 – Version "LF 2019" (janvier 2019) © IPP

L'exécutif tente ainsi de redresser la barre et effacer l'image de "président des riches" qui colle encore à la peau d'Emmanuel Macron, comme le montrait un sondage BFM Business, publié en juillet dernier. Le graphique réalisé par l'IPP sur l'impact du projet de loi de Finances 2020 sur les revenus des foyers depuis 2018, montre bien la différence avec celui de l'année précédente.

Mais si ce budget a souvent été présenté comme celui des classes populaires, il avantage en réalité les classes moyennes (qui peuvent englober les gilets jaunes). Et toujours les 1% les plus aisés… En revanche, le gain pour ces derniers a nettement été revu à la baisse. Ainsi, leur revenu disponible ne progresse plus "que" de 2,1% de 2018 à 2020, contre pratiquement 6% dans l'évaluation réalisée en octobre 2018. C'est notamment lié à des rentrées d'argent plus fortes que prévu avec l'IFI et la "flat tax" à 30% sur les revenus du capital.

A contrario, les classes moyennes, elles, voient leurs revenus disponibles augmenter de façon plus importante (à près de 3% entre 2018 et 2020). Si la situation s'est un peu améliorée pour les classes populaires, les ménages les plus modestes sont toujours ceux qui affichent les gains les moins conséquents. 

L'impact du budget sur les ménages - PLF 2020 (octobre 2019)
L'impact du budget sur les ménages - PLF 2020 (octobre 2019) © IPP

L'impression est d'autant plus forte si on se concentre uniquement sur les actifs, en omettant le cas des retraités.

L'impact du budget sur les ménages entre 2018 et 2020 - PLF 2020 (octobre 2019)
L'impact du budget sur les ménages entre 2018 et 2020 - PLF 2020 (octobre 2019) © IPP

"On est à la fois dans la tenue des promesses du président de la République dans son programme dont nous poursuivons la mise en œuvre et il y a effectivement une réponse à la crise des gilets jaunes et aux marches pour le climat", détaille Bénédicte Peyrol, députée de l'Allier et vice-présidente du groupe LREM à l'Assemblée nationale, sur le plateau de Good Morning Business ce mercredi sur BFM Business. Ce budget fait "aussi écho aux demandes des Français" qui appellent à des réductions de leur fiscalité, selon elle. "Nous, majorité (à l'Assemblée nationale, NDLR) (…), on a souhaité viser cette classe moyenne".

Reste encore à savoir la teneur finale du graphique en janvier prochain, lorsque la loi de Finances aura été amendée et sera pleinement adoptée.

Thomas Leroy