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Et si la consommation était victime de la foire aux idées fiscales

L'instabilité fiscale est toujours un prétexte pour épargner et pour ne pas consommer.

L'instabilité fiscale est toujours un prétexte pour épargner et pour ne pas consommer. - ERIC PIERMONT / AFP

Le grand débat, et la foire aux idées fiscales... les propositions fusent de toutes parts, créant un sentiment de confusion totale quant à l’évolution de la fiscalité. Rien de pire pour inciter les Français à la prudence, plutôt qu'à la consommation comme l'espérait pourtant l'exécutif.

Le cas de l’ISF est emblématique. Début décembre, le porte-parole du gouvernement Benjamin Grivaux déclarait que l’Etat pourrait renoncer à sa réforme votée fin 2017 si l’évaluation faite à l’automne prochain n’était pas concluante. C’est là toute la difficulté de l’exercice. Car le contribuable a horreur de l’incertitude, et en laissant planer un doute sur un éventuel retour de l’ISF, le risque est de dissuader les bénéficiaires de la réforme de réinvestir leur gain…générant ainsi une prophétie auto-réalisatrice.

Le débat sur l'ISF revient en force

Emmanuel Macron connait pourtant bien la délicatesse de la matière fiscale. Il a d’ailleurs très vite tenté de refermer cette porte, indiquant qu’il était hors de question, dans le cadre du grand débat national, de revenir sur la réforme de l’ISF. Mais comment empêcher le sujet d’émerger de nouveau ? Le principe même du grand débat étant de libérer la parole, l’idée de toucher à l’ISF revient donc en force.

Que ce soit par le biais des réunions locales d’où il ressort une demande de rétablissement de l’Impôt Sur la Fortune, et même d’initiatives parlementaires, tels ces 22 députés En Marche qui soutiennent le principe d’un retour de l’ISF exempté en cas d’investissement dans les PME. A l’arrivée, une véritable incertitude plane en ce moment sur l’avenir de cette réforme de l’ISF, recentré depuis un an et demi sur la fortune immobilière.

Les incertitudes fiscales se multiplient

La même incertitude gagne désormais les biens immobiliers. Alors qu’il participait fin janvier à un grand débat dans la Drôme, Emmanuel Macron a bien accueilli l’idée de taxer les plus-values réalisées lors de la revente d’une résidence principale. Depuis, le secteur se mobilise pour alerter sur les dégâts que pourrait provoquer une telle taxe sur l’activité.

Incertitude aussi sur les niches fiscales. C’est cette fois Gérald Darmanin qui a ouvert le débat. Lundi dernier, il proposait de réduire les avantages accordés aux plus riches, en baissant le plafond global des niches, ou en les conditionnant aux revenus. Depuis, la polémique ne faiblit pas : à partir de quand est-on considéré comme riche ? Que faire de la promesse d’Emmanuel Macron de ne pas augmenter la pression fiscale en France ? Le ministre du Budget a en tous cas précisé depuis qu’il voulait sanctuariser la niche liée aux services à la personne.

"La fiscalité est un sujet complexe et anxiogène"

A Matignon, on indique que tous les ministres sont appelés à faire des propositions. De son côté, Bruno Le Maire, a pris conscience du danger de cette incertitude fiscale. Il a pourtant largement commenté les idées des uns et des autres ces derniers jours. Et lui-même planche par exemple sur l'impact sur l'emploi des taux réduits de TVA, mais il préfère désormais attendre l’issue du grand débat le 15 mars avant de dégainer ses propres propositions.

«La fiscalité est un sujet complexe et anxiogène pour les Français. » rappelait-il au micro de BFM Business depuis le salon des Entrepreneurs.

Le ministre de l’Economie tente ainsi de fixer un cadre au débat fiscal en rappelant trois principes. D'abord l’impôt doit baisser. Ensuite, cette baisse doit être financée par des économies équivalentes. Enfin, il ne faut surtout pas toucher à ce qui marche (les niches liées aux services à la personne, ou le Crédit Impôt Recherche).

Bruno Le Maire tente aussi de rassurer les entreprises, leur assurant que l’Impôt sur les Sociétés sera bien ramené de 33% à 25% d’ici la fin du quinquennat. Un IS dont Bercy vient pourtant de supprimer la baisse en 2019 (pour les entreprises dont le chiffre d’affaires est supérieur à 250 millions d’euros), afin de financer une partie des mesures du pouvoir d’achat votée en urgence fin décembre. Un mini plan de relance qui, ironie de l’histoire, pourrait bien faire les frais de ce sentiment d’instabilité fiscale. Car face à l’incertitude, les ménages ont, par réflexe, bien souvent tendance à épargner plutôt qu’à consommer.