BFM Business
Economie et Social

Faut-il s'inquiéter de la hausse de l'euro?

Selon Arnaud Montebourg, un euro qui s'apprécie de 10% face au dollar élimine 150.000 emplois

Selon Arnaud Montebourg, un euro qui s'apprécie de 10% face au dollar élimine 150.000 emplois - -

La devise européenne évolue actuellement autour des 1,38 dollar, son plus haut niveau depuis la fin 2011.Une hausse qui présente plusieurs risques pour l'économie.

C'est un sujet qui divise l'exécutif. Depuis samedi 26 octobre, l'euro évolue autour des 1,38 dollar, conséquence indirecte de la période marquée par le "shutdown" américain. Jamais la devise n'a été à un niveau aussi élevé depuis le 1er novembre 2011, soit quasiment deux ans. La réunion de la Fed, prévue pour mardi 29 et mercredi 30 octobre, pourrait encore acccélérer le mouvement.

Pour le moment, le ministre de l'Economie et des Finances, Pierre Moscovici, ne s'alarme pas: "nous ne sommes pas encore sortis de la fourchette qui nous permettrait de dire: 'voilà, l'euro est franchement surévalué", a-t-il déclaré, dimanche 27 octobre à Europe 1 et i-Télé.

Un avis que ne partage pas Arnaud Montebourg. Le ministre du Redressement productif affirmait, mercredi 23 octobre, que "l'euro est un peu trop fort, et un peu trop cher", pour permettre à l'industrie européenne d'exporter. Il avait reçu l'appui du Commissaire européen à l'Industrie Antonio Tajani: "l'euro aujourd'hui est trop fort pour la compétitivité de nos entreprises", déclarait ce dernier.

Impacts sur la croissance

Un exemple qui revient souvent dans les paroles du ministre est Airbus, la locomotive des exportations françaises. Arnaud Montebourg aime rappeler qu'une hausse de 10 centimes de l'euro face au dollar "c’est un milliard de chiffre d’affaires en moins pour Airbus". Le 23 octobre dernier, il affirmait que "10% en plus ou moins de l'euro, pour un pays comme la France, c'est 150.000 emplois en plus ou en moins".

Le ministère de l'Economie était un peu moins pessimiste. Dans un document annexé au Budget 2014, Bercy évoquait plusieurs "scénarios catastrophes". L'un d'entre eux tablait sur une hausse de 10% de l'euro face aux autres devises. La monnaie unique se serait alors rapprochée des 1,50 dollar. La croissance française serait alors amputée de 0,6 point de PIB et 30.000 emplois seraient détruits.

La BCE à l'offensive?

Arnaud Montebourg pourrait trouver une improbable alliée: la Banque centrale européenne (BCE), institution que le ministre a pourtant souvent critiquée pour son inaction face au taux de change.

Mais la BCE a actuellement une épine dans le pied: la faiblesse de l'inflation. Les prix ont augmenté de 1,1% en septembre dans la zone euro, un niveau beaucoup trop bas pour la BCE qui vise 2%. Or, le taux de change, en handicapant les exportations, mine l'activité et empêche ainsi l'inflation de repartir.

"Clairement on sent que l'inquiétude monte doucement mais sûrement au sein de la BCE. Pour une raison bien particulière, la reprise est très fragile et l'inflation est trop basse pour la BCE. Il suffirait de peu de choses comme un euro au-dessus de la barre des 1,40 dollar, pour que l'inflation baisse à nouveau", explique ainsi Frederik Ducrozet, économiste du Crédit Agricole CIB, interrogé par BFM Business. Ce dernier estime ainsi que la BCE pourrait injecter un peu plus de liquidités dans l'économie pour diluer la valeur de l'euro.

Julien Marion