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Economie et Social

Fonction publique : les arbitrages de l'exécutif pour assouplir les règles

Présentation de la réforme de la fonction publique

Présentation de la réforme de la fonction publique - ludovic MARIN / AFP

Simplifier le dialogue social, recours accru aux contrats, plus de mobilité : le projet de loi sur la réforme de la fonction publique a été présenté ce mercredi en conseil des ministres. Ce texte braque l’ensemble des syndicats, et prévoit une transformation profonde de l’organisation de l’action publique

Inciter les fonctionnaires à travailler dans le privé, et mieux les accompagner dans leur parcours professionnel : c’est tout l’enjeu de ce texte qui cherche à assouplir le volet RH de la fonction publique. Aujourd’hui, quand un agent doit être muté sur un nouveau poste, il faut attendre que qu’une commission administrative se prononce sur cette mutation. Une attente qui peut prendre 8 à 14 mois. Ce projet de loi modifie les règles : cette Commission deviendra une instance de recours…Il y aurait ainsi moins de pesanteur dès qu’il s’agit de pourvoir un poste.

L’armée : un modèle de suivi des carrières

Le texte prévoit aussi un accompagnement plus fort des fonctionnaires qui décident de passer dans le privé…Mais aussi pour ceux qui acceptent un nouveau poste décentralisé. Il y a un véritable enjeu d’attractivité, en particulier dans les zones rurales, où l’Etat ou les collectivités ont du mal à pourvoir des postes. Que ce soit pour continuer à évoluer au sein des ministères, ou pour quitter la fonction publique, la reconversion est un axe fort de ce projet de loi.

Pour cela, une agence va être créée. Elle s'inspire de Défense Mobilité, la structure au sein de l'armée qui accompagne les militaires dans le retour à la vie civile. En effet, chaque année, 15 000 militaires retournent à la vie civile. L'armée a toujours été attentive à l’avenir de ses soldats. Du fait de la jeunesse des troupes, le turn over est important, et l’accompagnement dans e retour à la vie civile est suivi de très prés. Cette gestion des carrières est ainsi devenu un modèle pour le gouvernement.

De nouveaux outils RH vont ainsi être développés, et l'Etat va consacrer 1 milliard et demi d'euros à la formation des fonctionnaires. Il s'agira de les guider dans leur transition professionnelle, de fluidifier les passerelles entre les différents services et les différents ministères, mais aussi de faciliter le passage dans le secteur privé. Ceux qui décident de quitter leur poste pourront ainsi bénéficier d'une prime de départ très avantageuse. L'enveloppe liée aux frais de mobilité sera aussi plus élevée.

Des recrutements assouplis

Le recours accru aux contractuels est un autre axe fort de la réforme. Aujourd’hui un employé sur 5 dans la fonction publique est un contractuel. Le texte donnera plus de latitudes aux administrations pour embaucher des contractuels. La création d’un contrat de projet, calqué sur les contrats de chantier dans le privé apportera plus de souplesse dans les recrutements. Ce contrat sera d’au moins un an, et au maximum 6 ans. Un outil utile par exemple pour embaucher un manager le temps de gérer une fusion entre des services, ou bien pour employer un ingénieur informatique le temps de déployer un nouveau système d’information dans une administration locale. Ces contrats de mission permettraient aussi de pourvoir des postes dans des zones reculées, où jusqu’ici on ne trouvait pas le profil requis au sein de la fonction publique.

Autre nouveauté : la possibilité d’ouvrir des postes de direction aux contractuels. Les questions très délicates des statuts des hauts-fonctionnaires (dont le manque de transparence sur le niveau de salaire est régulièrement épinglé), ou de la rémunération au mérite, ne figurent pas à ce stade dans le projet de loi. Emmanuel Macron et Edouard Philippe devraient faire des annonces dans le cadre des conclusions du grand débat mi-avril. Les propositions qu’ils formuleront à ce sujet seront alors intégrées au texte par voie d’amendements.

Un dialogue social assoupli

Des accords locaux pourront être signés indépendamment des accords nationaux. Cette nouvelle disposition s’inspire clairement de la réforme du marché du travail qui privilégie un dialogue social dans les entreprises, au plus près du terrain, c’est-à-dire des préoccupations locales des salariés. La transposition de cette approche dans la fonction publique fait grincer des dents l’ensemble des syndicats. Il y a aujourd’hui 22 000 instances de dialogue dans la fonction publique. Le gouvernement aimerait en supprimer la moitié.

120 000 fonctionnaires en moins d’ici 2022 

Alors qu’aujourd’hui, en France, un actif sur cinq est fonctionnaire, le gouvernement maintient son objectif : 120 000 suppressions de postes d’ici la fin du quinquennat (50 000 pour l’Etat, 70 000 pour les collectivités territoriales). Pour y parvenir, il compte sur une vague de départ à la retraite de plus en plus importante de fonctionnaires à la retraite. Mais aussi sur la fin de certaines dérogations qui permettaient aux collectivités territoriales de travailler moins que les 35h. Une durée légale hebdomadaire, qui selon un rapport de l’Inspection Générale des Finances qui a filtré juste avant le projet de loi, n’est pas respectée par 190 000 agents de l’Etat alors que leur poste ne le justifie pas. En recalant la totalité des fonctionnaires sur les 35h, le gouvernement espère ainsi mécaniquement supprimer 60 000 postes, soit la moitié de son objectif sur le quinquennat.