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Immobilier : la morosité de 2018va-t-elle perdurer en 2019 ?

La venue des Brexiteurs en 2019 pourrait tendre d'autant plus les marchés parisiens et franciliens.

La venue des Brexiteurs en 2019 pourrait tendre d'autant plus les marchés parisiens et franciliens. - Pixabay

Hausse du prix des logements et suppression de la majorité des aides à l’accession obligent, le marché immobilier n’a pas forcément été des plus dynamiques en 2018. De là à envisager qu’il en soit de même en 2019 ? Pas sûr.

« Oui », en 2018 les taux d’emprunts se sont rapprochés de leurs plus bas niveaux au point d’atteindre 1,40 % sur 15 ans, 1,60 % sur 20 ans et 1,80 % sur 25 ans en décembre. Des conditions de crédit qui se sont donc très nettement améliorées mais qui n’ont pas empêché un ralentissement significatif de la demande. A commencer par une demande de crédit à l’habitat qui n’a cessé de reculer depuis le printemps 2017.

Parallèlement à cela, les prix de l’immobilier, notamment parisien, n’ont clairement pas été propices à l’investissement. Les inquiétudes portant sur le pouvoir d’achat encore moins. Une année en demi-teinte sur laquelle Christian Gillet, associé responsable de l’équipe de conseil financier et immobilier et Olivier Gerarduzzi, directeur real estate advisory au sein de Deloitte, reviennent sans pour autant présager que l’année 2019 s’inscrive dans cette même lignée.

De manière général, notamment à Paris, les prix au mètre carré ont atteint des niveaux sans précédent en 2018 (9 500 euros en moyenne au troisième trimestre). Dans le même temps, les taux d’emprunt ont rarement été aussi bas. Quel regard portez-vous sur ces évolutions ?

Olivier Gerarduzzi : Indéniablement, le phénomène de la baisse des taux alimente la prise de valeur des biens immobiliers. Mais ce qu’il convient également d’observer en point de mire, c’est que cet enchérissement se concentre sur les meilleurs biens. Les Brexiteurs qui rejoignent Paris ou sa proche banlieue en sont la preuve. Leur venue constitue un deuxième élément qui vient tendre le marché parisien et, plus largement, le marché francilien.

Le problème tient au fait que ce marché se révèle déjà tendu compte tenu de la demande en hausse et de la baisse des taux de crédit. Des taux de crédit qui, cette année et selon les cas, ont même pu parfois se situer en dessous de 1%.

Comment se porte le marché de l’investissement locatif en 2018 et plus généralement celui de l’immobilier ? Ancien, neuf, résidence secondaire… Dans quel type de produits les Français ont-ils investi cette année ?

Christian Gillet : Il faut, en réalité, bien prendre la mesure du fait que l’impôt sur la fortune (ISF) n’a pas disparu. Il se concentre simplement désormais sur l’immobilier (IFI). Partant de ce constat, il n’est pas étonnant que de plus en plus de promoteurs nous signalent un ralentissement de l’investissement locatif marqué. Il n’est pas non plus surprenant que ces mêmes promoteurs formulent des inquiétudes si l’on continue de taxer de cette façon, et donc de manière assez déséquilibrée, l’immobilier comparé aux autres modes de placements.

Il est vrai que la fiscalité française s’avère assez instable et les investisseurs se retrouvent souvent surpris des nouvelles taxations dont ils font l’objet. Il est donc logique qu’ils finissent, en partie, par abandonner l’idée de réaliser des investissements locatifs.

Pour ce qui concerne le marché immobilier en général, il convient, en 2018, de bien distinguer son pendant résidentiel, du reste, c’est-à-dire de l’immobilier de bureau, de l’hôtellerie, de l’investissement dans les entrepôts ou encore dans les centres-commerciaux. Ce deuxième segment reste recherché en 2018. Notamment par les investisseurs étrangers qui sont forcément moins sensibles à l’IFI que les investisseurs français.

A quoi les acquéreurs doivent-ils s’attendre en 2019 ?

Olivier Gerarduzzi : Je pense que nous allons assister l’an prochain à une inflation de ce que les Américains appellent le « Flight to quality ». Comprenez : la capacité d’un acteur économique à se concentrer, en premier lieu, sur les meilleurs actifs. Ce que font les Brexiteurs qui disposent de hauts revenus et qui viennent s’installer en France.

Parallèlement à cela, il est intéressant de souligner que les activités de constructions immobilières en cours sont nombreuses. Dans le grand Paris, pas moins de 2 millions de mètres carrés de bureaux sont actuellement en construction. Ce qui constitue un niveau historiquement élevé.

On sait également que ce sont les quartiers où se concentre l’activité qui vont être les plus recherchés par les investisseurs. Tout ceci s’inscrit dans une logique de rentabilité pour ceux qui travaillent et/ou qui rentrent sur le marché du travail. Ils devraient donc être amenés à rechercher des biens à la fois chers et centraux l’an prochain.

Julie COHEN-HEURTON