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Investissement: pourquoi la situation est à ce point préoccupante

L'investissement chute en France

L'investissement chute en France - -

L'Insee comme les industriels constatent une baisse des investissements des entreprises dont le niveau du carnet de commandes est au plus bas depuis l'été 2009. La situation est sans précédent. Et entame le potentiel de croissance de la France.

Après la chute de l’investissement au premier trimestre, annoncée mercredi 15 mai par l’Insee, ce sont les industriels qui annoncent, ce jeudi 16 mai, une baisse de 4% de leurs dépenses d’équipement sur l’année.

Ce qui se passe sur l’investissement des entreprises est sans précédent ! Le profil caractéristique de l’investissement dans les récessions, c’est un profil en « V »: une chute de 8 à 10% environ sur 12 à 18 mois, puis une reprise sur la même période qui permet de retrouver en deux voire trois ans le niveau d’investissement d’avant crise : C’est ce scénario qui avait prévalu après les récessions de 1974 et de 1993

Là, on est dans un cas sans précédent : on a perdu presque 25% en 2008 et 2009, et on se maintient depuis 2010 à 10 à 15% en dessous du niveau de 2008.

Il y a plusieurs explications. D’abord, le niveau des carnets de commandes, au plus bas depuis l’été 2009. La situation financière des entreprises françaises, ensuite, qui n’a jamais été aussi dégradée depuis la fin des années 1970. Les incertitudes sur la politique économique et fiscale, enfin, qui incitent à laisser les projets dans les tiroirs. 

Croissance potentielle

Résultat : notre potentiel de croissance est sérieusement amputé : avant la crise de 2008, il était évalué entre 1,5% et 2%. Aujourd’hui, nombre d’experts l’estiment plutôt entre 0,5% et 1%.

Cela change beaucoup de choses ! D’abord, cela signifie que le taux de chômage structurel est plus élevé que prévu : sans doute pas loin de 8% de la population active.

Surtout, cela bouleverse l’approche des nouvelles règles de stabilité budgétaire européenne. Ce qui compte maintenant, ce ne sont plus les déficits totaux, mais les déficits structurels. Or ceux-ci dépendent étroitement de la croissance potentielle : plus elle est élevée, plus la part du déficit structurel dans le déficit est faible, et inversement !

Problème : Bercy surestime bien trop notre croissance potentielle (1,7% environ), et sous-estime donc la part structurelle des déficits publics, ce qui fait tiquer à Bruxelles.

Les discussions seront rudes d’ici au 29 mai, lorsque la Commission publiera ses recommandations de réforme à Paris…

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Emmanuel Lechypre