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L'automobile en pleine forme

Année 2018 finalement au-dessus des prévisions pour l’automobile en France : +5% pour le marché, contre 3% prévus à l'origine, et +4.7% enregistrés sur 2017, avec une bonne dynamique des constructeurs français

La principale menace du moment est-elle en train de devenir un atout pour les constructeurs français? Car le principal enjeu du moment, chez tous les grands groupes automobiles, ce sont les nouvelles normes de contrôle antipollution, WLTP, en place depuis le 1er septembre. Un changement technique d'importance, qui a contraint certains constructeurs à nettoyer leur gamme des modèles, à l'image de Volkswagen, qui connaît à cause de cela d'importants problèmes de production en ce moment.

"Pour les constructeurs français, il faut voir cela comme une simple évolution technique, comme s'il s’agissait de mesurer la température en degrés Farenheit et non plus en Celsius", affirme Christian Peugeot, Président du CCFA (Comité des Constructeurs Français d'Automobiles). Et il estime que les fabricants français s'y sont "préparés de longue date et avec succès".

La fin du "goulot d'étranglement"

L’impact est en effet jugé "négligeable" chez Peugeot. Le PDG France de la marque, Guillaume Couzy, estime que "3 à 5% de la gamme ont été élagués, le reste ayant subi des modifications moteur adéquates pour être parfaitement dans les clous". Renault ne donne pas de détail mais affirme y être préparé après avoir "nettoyé" sa gamme de tous les modèles qui auraient pu être recalés. Ces derniers d'ailleurs, ont fait l'objet d'immatriculations dites "tactiques" de tous les constructeurs sur le mois d'août, afin d'être revendues en concessions comme "occasions zéro kilomètres", ce qui explique en partie le bond des immatriculations sur le marché français en août.

En partie seulement, car l'industrie automobile française bénéficie aussi de l'accélération de sa production de manière générale en cette 2ème partie d'année. "Certains modèles faisaient l'objet d'une forte demande, ce qui a créé un phénomène de goulot d'étranglement depuis quelques mois" constate Christian Peugeot. L'arrêt de production de certains modèles a provoqué un engouement pour de nouveaux, plus récents, et destinés à correspondre aux nouvelles normes WLTP. Accords de compétitivité aidant, les constructeurs ont pu suffisamment rehausser leur cadence de production pour rattraper leur retard d'un coup, ce qui là aussi explique les chiffres remarquables du mois d'août.

Le SUV toujours superstar

Cela dit l'enjeu des nouvelles normes n'est pas que technique, il est aussi fiscal. De ces normes, plus strictes, censés être plus sévères car permettant des tests dans des conditions réelles d'usage quotidien, vont découler le calcul des bonus-malus attribués aux voitures neuves. Et deux phénomènes pourraient provoquer une forte hausse des malus. Tout d'abord la montée en gamme générale de la production automobile française, vers des modèles de plus en plus haut de gamme, mieux équipés, et de fait plus lourds, et aux motorisations à priori plus puissantes et plus gourmandes. C'est entre autres le cas des SUV, ce segment de marché à la croissance fulgurante, qui représente désormais 37% du marché français et 47% des ventes en volumes chez Peugeot.

L'autre paramètre à prendre en compte est la forte baisse de la part du diesel dans le parc automobile français, passé en 5 ans de 67% à 40% au dernier décompte. Le diesel est certes une technologie qui émet plus de microparticules et d'autres gaz dangereux que les moteurs essence classiques, mais il émet malgré tout moins de CO². Ce qui fait que parallèlement, les émissions de dioxyde de carbone automobiles françaises ont légèrement augmenté sur ces dernières années, passant de 110 à 114g/km en moyenne.

Une belle longueur d'avance

Malgré cela, aucun impact sur le calcul des bonus-malus attribué aux automobiles neuves selon le CCFA. Même si les nouveaux barèmes seront à priori plus sévères pour les constructeurs, l'organisation a obtenu du gouvernement des assurances qu'il n'y aurait pas de conséquences néfastes sur les malus... ce qui n'empêche pas le Comité de garder une certaine forme de vigilance, le malus pouvant s'apparenter à une cagnotte toujours plus alléchante, pour l'Etat ou pour les collectivités locales comme les départements, qui pratiquent déjà des surtaxes forfaitaires annuelles sur certains véhicules jugés plus polluants. Tous ces facteurs combinés prouvent que les constructeurs français ont sans doute une longueur d'avance non-négligeable sur la concurrence européenne, notamment Allemande, alors que Volkswagen par exemple accumule d'importants soucis de production à cause de ces nouvelles normes.

Antoine LARIGAUDRIE