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Finances publiques

L'État actionnaire, un "mythe" selon celui qui l'a incarné de 2012 à 1014

L'Etat actionnaire ne peut pas exister, selon David Azéma.

L'Etat actionnaire ne peut pas exister, selon David Azéma. - Jacques Demarthon - AFP

Ancien responsable de l'Agence des participations de l'État, David Azéma estime que l'État ne peut pas être actionnaire car il n'en a pas la culture.

L'État ne peut pas être actionnaire. L'auteur de cette affirmation sans appel n'est pas n'importe qui. Il s'agit de David Azéma. Entre 2012 et 214, ce haut fonctionnaire a dirigé l'Agence des participations de l'État. Dans une note pour l'Institut Montaigne, révélée par Le Figaro, l'ex-directeur général de cette entité placée sous la tutelle de Bercy et chargée d'investir dans des entreprises jugées stratégiques, pour "stabiliser leur capital ou les accompagner dans leur développement ou leur transformation" y décrit "l'impossible État actionnaire".

À l'époque, David Azéma croyait possible de lier les deux. Mais, à l'usage, il s'est rendu compte de "la contradiction entre la finalité et les règles de l’action publique et celles du secteur public". Et de préciser sa pensée: "L’État n’a pas la culture de l’actionnaire. Pouvoir de nommer et de révoquer des dirigeants, de fixer les rémunérations, de bloquer ou d’approuver des opérations en capital, de céder sa participation pour manifester une perte de confiance, autant d’actions qui font partie du quotidien des actionnaires et que l’État peut difficilement s’attribuer. A cela s’ajoute son aversion absolue à la prise de risque (...) en totale contradiction avec l’esprit même de l’actionnariat, ainsi qu’une profonde désynchronisation des deux mondes: quand le temps du politique et de l’administration est rythmé par les échéances électorales, celui des entreprises est tourné vers le cycle des résultats financiers."

SNCF, RATP et audiovisuel public, trois cas particuliers

Pour David Azéma, l'État doit revoir en profondeur sa stratégie. Il prône une limitation de "la présence publique directe au capital d’entreprises commerciales à un nombre très limité de situations ou d’objectifs, d’engager un programme massif de désengagement de l’État de ses participations cotées et de mettre en place ou d’utiliser d’autres instruments que la détention de titres pour atteindre les objectifs stratégiques nationaux ou européens". 

"Un programme rapide et massif de cession" serait, à ses yeux, une bonne chose. Avec des exceptions. "Compte tenu de son incapacité ontologique à exercer correctement le métier d’actionnaire de contrôle, l’État doit se limiter à contrôler, de manière permanente, les seules entreprises qui en réalité... ne peuvent pas complètement en être." La liste de ces exceptions n'est pas très longue. La SNCF, mais uniquement "son activité domestique", la RATP, et l’audiovisuel public français. Et éventuellement, "d’autres activités ou entreprises publiques si les contraintes publiques qui leur étaient imposées devenaient telles que leur rentabilité serait très durablement menacée".

D. L.