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L’État prêt à suivre les propositions d'EDF sur le nucléaire

La centrale de Fessenheim pourrait être la seule à fermer jusqu'en 2029.

La centrale de Fessenheim pourrait être la seule à fermer jusqu'en 2029. - ALAIN JOCARD AFP

Les scénarios de politique énergétique sont débattus ce mercredi en conseil des ministres. Le gouvernement semble favorable à ne fermer aucun autre réacteur que Fessenheim avant 2029, comme EDF le préconise.

C’est la dernière ligne droite. Le gouvernement entame mercredi en conseil des ministres le débat sur la politique énergétique jusqu’en 2035. Le ministre de l’Écologie, François de Rugy, présentera les différents scénarios étudiés par le gouvernement. Un moment-clé qui conduira à des arbitrages à la fin du mois. C’est Emmanuel Macron lui-même qui pourrait annoncer les grandes orientations de cette programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) des dix prochaines années. La date du 30 octobre est évoquée, ce que ne confirme pas l’Élysée.

Le ministère de l’Écologie met en avant la fermeture des quatre centrales à charbon ou la fin de l’exploitation d’hydrocarbures en France. Des décisions déjà prises par Nicolas Hulot. Mais l’un des enjeux majeurs de cette politique énergétique est bien l’avenir du nucléaire en France.

Condamné à suivre EDF

Le point sensible reste les fermetures de centrales. EDF prévoit de commencer à arrêter ses 56 réacteurs à partir de 2029 jusqu’en 2060. Le groupe milite pour qu’aucun ne soit arrêté avant cette date de 2029, en dehors des deux de Fessenheim. Cette proposition est totalement soutenue par Bercy. « EDF est aussi très écouté à Matignon et à l’Élysée », ajoute un proche du gouvernement. De son côté, le ministère de l’Écologie souhaite que le mouvement soit lancé en fermant entre 6 et 8 réacteurs d’ici 2029. « C’est mal embarqué », déplore un cadre du ministère. « On est condamnés à faire ce que veut EDF, se résigne un proche de l’Elysée. Il faut écouter leurs contraintes, mais préparer les fermetures de réacteurs au niveau social ».

Le gouvernement est surtout tenté de renvoyer la décision à l'Autorité sûreté nucléaire. L'ASN rendra son avis sur l'exploitation des centrales en 2021 et pourrait imposer à EDF d'en fermer pour des raisons de sûreté. Sont dans le viseur notamment deux des plus anciennes: Tricastin et Bugey. 

Un texte sans rien de concret

La semaine dernière, le PDG d’EDF, Jean-Bernard Lévy, a invité le gouvernement à la « prudence ». Il estime que les scénarios d’une consommation électrique stable, prônés par RTE (Réseau de transport d’électricité) et l’Ademe (Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie) sont insuffisants. Il envisage plutôt qu’elle augmentera d’ici dix ans pour justifier le maintien du parc nucléaire actuel. En privé, il assure avoir été « entendu » par l’État sur ce point. L’électricien milite pour qu’aucune décision irréversible ne soit prise. « En réalité on n’a aucune visibilité sur la consommation électrique, donc il faut rester manœuvrant » explique un dirigeant du groupe. Un scénario qui prend de l’ampleur et qui justifierait d’attendre encore quelques années… « Le risque est qu’il n’y ait rien de concret dans cette « PPE » et que de grands objectifs », conclut un cadre du ministère de l’Écologie.

Dernier argument de taille : l’électricien ne cache pas qu’il demandera une indemnisation en cas de fermeture anticipée de réacteurs. Cette « jurisprudence Fessenheim » pèse lourd. L’État versera à EDF 400 millions d'euros pour l’arrêt de la centrale alsacienne et des indemnités supplémentaires jusqu’en 2041 risque de doubler la facture. L’État n’a pas envie de remettre la main à la poche et de cristalliser des tensions sur les territoires des centrales les plus vieilles comme à Tricastin ou à Bugey.

Une nouvelle loi

Une chose est sûre, le gouvernement devra établir une nouvelle loi pour modifier les objectifs de la loi de transition énergétique. Déjà celui de l’abaissement de la part du nucléaire de 75% à 50% qui passera donc de 2025 à 2035. Mais les industriels craignent que cette loi ne touche aussi aux objectifs de développement des énergies renouvelables. Elles doivent peser 32% de production électrique en 2030. Bercy serait favorable à repousser cette échéance et surtout à modifier les poids de certaines énergies nouvelles comme le biogaz ou les biocarburants.

Reste le dernier sujet sensible : les nouveaux réacteurs EPR. EDF réclame au gouvernement de lancer de nouvelles constructions pour une mise en route en 2030. Fin août, Bruno Le Maire avait déclaré qu’il fallait attendre le lancement de l’EPR de Flamanville qui devrait ouvrir fin 2019, voire début 2020.