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Finances publiques

La "flat tax" est-elle une machine à optimisation fiscale?

Le manque à gagner  issu de la Flat tax est évalué à 1,5 milliard d'euros par an.

Le manque à gagner issu de la Flat tax est évalué à 1,5 milliard d'euros par an. - Thomas Samson - AFP

Dans une tribune publiée par Le Monde, l’économiste Gabriel Zucman estime que la taxe fixe sur les dividendes en cours d’examen à l’Assemblée nationale servira les intérêts des plus hauts revenus. Et selon ses estimations, le manque à gagner pourrait atteindre 10 milliards par an pour l’État.

La "flat tax" d’Emmanuel Macron va-t-elle plomber les comptes publics? Le principe du prélèvement forfaitaire unique, voté en première lecture à l’Assemblée nationale n’est pas la plus polémique des nouveautés prévues dans le projet de budget 2018. Mais selon un économiste français, il pourrait devenir une véritable "bombe à retardement".

Gabriel Zucman, professeur à l’université de Berkeley (Californie), affirme en effet que ce dispositif a de grandes chances de devenir une énorme machine à optimisation fiscale. Et pourrait donc "coûter beaucoup plus d’argent à Bercy que le 1,5 milliard d’euros budgétisés, sans doute de l’ordre de dix fois plus", estime-t-il dans une tribune publiée par Le Monde.

Pour rappel, la "flat Tax", destinée à simplifier la fiscalité du capital, est un impôt forfaitaire annuel de 30% (12,8% d'impôt sur le revenu et 17,2% de prélèvements sociaux) sur les revenus mobiliers, à l’exception du Livret A, du PEA et de certains contrats d’assurance-vie.

L'exemple américain

Selon Gabriel Zucman, ce dispositif aura pour effet de déséquilibrer le rapport entre l’imposition des dividendes et celle des salaires. Et "si les revenus du capital sont moins taxés, alors tous ceux qui sont à la fois salariés et actionnaires de leur entreprise -patrons, entrepreneurs, cadres dirigeants et indépendants- ont intérêt à percevoir le fruit de leur labeur sous forme de dividendes plutôt que de revenus salariaux, siphonnant ainsi les recettes de la Sécurité Sociale et de l’État."

Ainsi, l’écart entre les deux impositions serait de 15 points: 65% sur les revenus salariaux contre 50% sur les dividendes (l’économiste détaille son calcul sur son blog).

Pour appuyer sa théorie, Gabriel Zucman prend l’exemple des États-Unis, où une "Flat tax" existe également. Et cite une étude montrant que "des centaines de milliards de dollars de salaires (…) sont ainsi, chaque année, déguisés en dividendes dans le seul but de payer moins d’impôts".

Outre-Atlantique, "54% des dividendes que les patrons de PME, cadres dirigeants et indépendants se versent correspondent en fait à des revenus qui devraient être taxés comme du travail", écrit-il.

Sa conclusion est sans appel: "si l’on fait des hypothèses prudentes, l’écart de 15 points entre taxation des salaires et des dividendes coûtera à terme 10 milliards par an".

Ce que la flat tax va faire gagner aux 100 plus grandes fortunes

Vincent Eblé, le président PS de la commission des finances du Sénat a présenté ce jeudi à la presse des éléments de réponse d'un courrier qu'il avait adressé aux ministres de l'Économie Bruno Le Maire et des Comptes publics Gérald Darmanin pour obtenir des informations sur les conséquences des réformes. Ainsi, avec la mise en place d'un prélèvement forfaitaire unique (PFU), "les 100 premiers contribuables à l'ISF gagneront chacun, en moyenne 582.380 euros par an", a-t-il souligné.

Y.D.