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Finances publiques

Allocations familiales: la modulation censurée par le Conseil constitutionnel?

Le Conseil constitutionnel devrait rendre plusieurs décisions avant le 30 décembre

Le Conseil constitutionnel devrait rendre plusieurs décisions avant le 30 décembre - Thomas Samson-AFP

Le Conseil constitutionnel va statuer dans les prochains jours sur le recours de l'UMP contestant le plafonnement des allocations familiales voté par la gauche. L'opposition devrait également le saisir du collectif 2014 et du budget 2015. Elle estime en particulier que la baisse des dotations aux collectivités locales remet en cause l'autonomie de ces dernières.

L'opposition y croit. Elle pense que le Conseil constitutionnel va rejeter dans les prochaines heures le plafonnement des allocations familiales en fonction des revenus prévu dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2015. L'exécutif estime en revanche que la mesure ne risque pas d'être censurée.

Le 3 décembre dernier en tout cas, l'UMP a déposé un recours contre l'ensemble du projet de loi, et en particulier contre cette mesure phare du texte. Elle estime que cette réforme qui instaure des plafonds de revenus à partir desquels les allocations sont divisées par deux puis ensuite par quatre, "porte atteinte au principe d'égalité". 

Rupture d'égalité devant la loi

Le projet gouvernemental voté par le Parlement prévoit qu'à partir de 6.000 euros de revenus mensuels pour un foyer avec deux enfants, les allocations seraient divisées par deux. Et par quatre à partir de 8.000 euros. 

Selon l'UMP, ce plafonnement "ne respecte pas le principe d'égalité devant la loi en ce qu'il ne prévoit pas de moduler le montant des allocations familiales selon qu'un seul membre du couple exerce une activité professionnelle effective, ou selon qu'il s'agit d'une personne seule ou d'un couple dont les deux membres exercent une telle activité".

"A partir du moment où une modulation des allocations familiales en fonction des ressources est introduite, il faut aussi introduire une modulation en fonction du nombre de personnes dans le couple qui exerce une activité", estime l'UMP. Sera-t-elle suivie par les Sages? 

Fin 2013, ces derniers n'avaient cependant rien trouvé à redire au plafonnement (à 1.500 euros) de l'avantage en nature procuré par l’attribution de demi-parts supplémentaires par personne à charge, contenu dans le budget 2013. 

Collectif budgétaire 2014 et budget 2015 en ligne de mire

Ce vendredi, l'opposition devrait également saisir le Conseil constitutionnel du projet de budget rectificatif 2014 et du projet de loi de finances pour 2015 qui seront votés définitivement jeudi. Le Conseil devrait rendre sa décision le 29 ou 30 décembre. 

Fin 2012, il avait censuré la création de la taxe à 75% sur les très hauts revenus, une promesse de campagne présidentielle du candidat Hollande. Et en décembre dernier, il avait rejeté pas moins de 24 dispositions du budget 2014, dont le calcul du plafonnement de l'ISF et la taxation des plus-values immobilières sur les terrains à bâtir. Il avait également censuré la notion d'abus de droit, élargie par la majorité contre l'avis du gouvernement. En revanche, il avait accepté une nouvelle version de la taxe sur les hauts revenus. 

Peu de motifs de censure cette année

Cette année, la moisson de l'opposition devrait être plus modeste, de l'avis même des experts UMP de la Commission des finances de l'Assemblée interrogés par BFMBusiness. "Le gouvernement a compris la leçon des années précédentes et a été prudent dans la rédaction des mesures fiscales", commente l'un d'eux.

Durant la discussion budgétaire, Christian Eckert, le secrétaire d'Etat au Budget, a d'ailleurs mis en avant les risques d'inconstitutionnalité pour calmer les ardeurs des députés "frondeurs" du PS. C'est vrai en particulier des mesures de lutte contre la fraude et l'optimisation fiscale, mieux "bordées" juridiquement que l'an dernier, où le Conseil en avait rejeté certaines. 

De même, le gouvernement a fait rétablir un avantage fiscal (la déductibilité des frais financiers) profitant aux sociétés d'autoroutes et supprimé en première lecture du collectif budgétaire par les députés PS. Cette suppression, qui ne concernait en l'espèce que ces sociétés et non tous les délégataires de services publics, aurait pu être considérée comme une rupture d'égalité devant l'impôt. 

Finalement, l'UMP mise sur une censure de la baisse des dotations aux collectivités locales pour mettre en mauvais posture l'exécutif. L'opposition estime en effet que cette baisse (de 2,5 milliards d'euros en 2015 et 11 milliards d'ici à 2017) remet en cause le principe constitutionnel d'autonomie financière des collectivités locales. Affaire à suivre.

Patrick Coquidé