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Et si l'assurance-vie finançait la croissance

sur les 1 400 milliards d’assurance-vie, 85% sont investis en emprunts rapportant chaque année un intérêt fixe, sans aucun risque.

sur les 1 400 milliards d’assurance-vie, 85% sont investis en emprunts rapportant chaque année un intérêt fixe, sans aucun risque. - -

Le gouvernement prépare une réforme de l’assurance-vie afin de mieux orienter l'épargne et ainsi financer la croissance, mais sa reculade sur le PEA l'incite à la prudence.

Depuis la reculade gouvernementale concernant les prélèvements sociaux sur les PEA, il est probable qu’il va se montrer très prudent sur la réforme de l'assurance-vie, dans la foulée du rapport remis par Karine Berger et Dominique Lefebvre sur l’épargne en France.
Pourtant, un des enjeux de l’amélioration de notre situation économique est de favoriser l’épargne et de l’orienter vers l’investissement privé. Or, sur les 1 400 milliards d’assurance-vie, 85% sont investis en emprunts rapportant chaque année un intérêt fixe, sans aucun risque.

Une nouvelle réforme de l'assurance-vie se prépare, de quoi retourne-t-il ?

Deux députés – Karine Berger et Dominique Lefebvre - ont remis récemment un rapport sur la situation d’épargne du pays. Le constat est double. D’abord, l’effort d’épargne privé a beau être important, le pays, à cause des dépenses excessives du secteur public, vit à crédit et mange son capital. Ensuite, cette épargne est mal orientée.
Les deux éléments sont liés. Pour se financer, l’Etat, qui vit à crédit, a octroyé des avantages fiscaux multiples à l’assurance-vie car les sommes ainsi mobilisées sont consacrées à acheter la dette publique.
Bilan : une épargne privée absorbée par la dette publique qui ne va pas financer les entreprises et leurs investissements. Pour résumer : une épargne mal employée.
Pour justifier cette situation, les gouvernements successifs ont mis en avant que la population française est naturellement peu disposée à faire prendre des risques à son épargne.

Rien ne prouve que ce soit aussi évident qu'on le dit.

Quoi qu’il en soit, l’idée de la réforme en préparation est de créer parmi les placements possibles pour les gestionnaires d’assurance-vie un fonds de 100 milliards dit « euro-croissance » servant à financer les entreprises et ayant un rendement plus important que la dette publique. Cela devrait avoir d’autant plus de succès qu’en ce moment, les taux d’intérêt sur la dette publique sont bas.

Est-ce que ce sera suffisant pour fournir des financements significatifs aux entreprises ?

Il est probable que non. Ce qu'il faudrait faire, c’est d’abord réduire réellement le déficit budgétaire : si l’Etat cesse d’emprunter, l’épargne cessera d’être détournée vers lui.
Ensuite, il faut rétablir tous les avantages dont bénéficiaient les projets de financement à long terme de l’économie comme les PEA. Quand le PEA a été créé par Pierre Bérégovoy en 1992 il n’y avait ni prélèvement fiscal ni prélèvement au titre de la sécurité sociale. Enfin, pour mobiliser des sommes plus importantes que les 100 milliards annoncés, il faudrait s’orienter vers la mise en place de fonds de pension. Cela résoudrait le problème des retraites et cela remettrait en place un mode de financement plus sain de l’économie : l’épargne financerait la croissance qui permettrait de payer les retraites.
Il y a sur ce dossier de l’épargne beaucoup de blocages liés à des a priori, comme l’idée que l’épargne serait en quelque sorte thésaurisée dans des bas de laine et donc stérilisée ou encore que les placements risqués se terminent toujours mal. C’est le rôle des financiers non pas de spéculer mais d’analyser les placements possibles, de mesurer leurs risques et de les réaliser de façon judicieuse.

Jean-Marc Daniel