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Finances publiques

Les Corses vont-ils perdre leurs avantages fiscaux? 

Assemblée de Corse

Assemblée de Corse - Pascal Pochard-Casabianca-AFP

À l'occasion de la discussion budgétaire, les députés devraient voter plusieurs amendements supprimant certains avantages fiscaux dont profite la Corse. Est-ce la fin du régime fiscal hérité de Napoléon?

Nos parlementaires se sont-ils donnés le mot en cette fin de législature pour en terminer avec le régime fiscal corse hérité du Consulat et de Napoléon? Mardi soir, en tout cas, à l’initiative de plusieurs députés socialistes dont l'ancienne ministre Michèle Delaunay, la commission des affaires sociales de l’Assemblée nationale qui examinait le budget 2017 de la Sécurité sociale a voté l’alignement du niveau des taxes sur le tabac en Corse sur celui en vigueur ailleurs. 

La santé publique en cause

Officiellement, il s’agit d’une mesure de santé publique. En raison des prix des cigarettes inférieurs de 25%, le nombre de cancers du poumon serait supérieur de 26% sur l’île de Beauté, rappelle Michèle Delaunay qui est par ailleurs cancérologue. 

Mais il y a aussi une raison plus prosaïque: Bruxelles a autorisé la France à maintenir un régime fiscal dérogatoire jusqu’à la fin 2015. Ensuite, Paris est censé payer une amende annuelle à l’Europe.

D’où l’amendement socialiste sans doute téléguidé par Bercy après un référé de la Cour des comptes de septembre, réclamant cet alignement. En plus de l'amende, le non-alignement entraîne un manque à gagner fiscal de 27 millions d’euros.

Tabac et gros camions

Mais ce n’est pas le seul amendement concernant la Corse. Dans le cadre du budget de l’État cette fois, les députés devraient voter dans les prochaines heures deux amendements du centriste Charles de Courson.

Le premier supprime l’exonération de la taxe sur la circulation des vins sur l’île. Une exonération datant d’un décret impérial de…1811. Certes, cette taxe n'est que de 3,77 euros par hectolitres sur le continent. Mais si elle existait en Corse, elle rapporterait quand même un million d’euros, selon Charles de Courson. 

Le second amendement du même député centriste supprime une autre exonération: celle de "la taxe à l’essieu" sur les poids lourds qui n’a jamais été appliquée en Corse alors qu’aucun texte ne prévoit cette exonération. 

Si bien que de nombreux transporteurs des Bouches-du-Rhône, mais aussi du Var ou des Alpes-Maritimes immatriculent leurs camions en Corse pour éviter de payer la taxe, affirme Charles de Courson. Il estime que cela fera rentrer 600.000 euros par an dans les caisses de l’État. 

Compenser l'insularité

Toutes ces initiatives signent-elles donc la fin du régime fiscal corse? En partie, seulement. En 2011, un rapport de l’Inspection générale des finances qui avait fait beaucoup de bruit estimait que l’île bénéficiait d’une quinzaine de dérogations fiscales d’un montant total de 400 millions d’euros censées compenser les surcoûts liés à l’insularité. 

C’est toujours le cas par exemple du crédit d’impôt pour investissement des entreprises qui coûte près de 60 millions par an. Ou de la TVA dont les taux sont inférieurs à ceux du continent: 10% par exemple sur les consommations d’alcool contre 20% sur le continent. Ou encore des droits de succession réduits de moitié par rapport au continent jusqu’en 2018. 

Pour en finir avec les polémiques, Gilles Siméoni, le nouveau président indépendantiste du conseil exécutif de Corse, réclame, lui, que l’on transfère toute la fiscalité applicable sur l’île aux élus corses. "Ce qui est imposable localement doit être géré localement", a-t-il lancé voici quelques mois sur BFMTV. Il y a peu de chances qu'il soit entendu....

P.C