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Les mesures choc du gouvernement pour lutter contre la fraude fiscale

Les principales mesures du plan anti-fraude de l'État

Les principales mesures du plan anti-fraude de l'État - Jacques Demarthon - AFP

Publication des noms des fraudeurs, création d'une brigade d'agents spécialisés, exploitation de données logicielles... Bercy va sortir l'artillerie lourde pour lutter contre la fraude fiscale. Voici les grandes lignes de ce plan drastique.

Le gouvernement a dévoilé ces derniers jours par touches successives les principales mesures de son plan de lutte contre la fraude, destiné à récupérer une partie des 60 à 80 milliards d'euros d'impôts qui échappent chaque année à l'État.

Sanctions contre les sociétés encourageant l'évasion fiscale, publication du nom des plus gros fraudeurs, recours accru aux algorithmes... Bercy a détaillé les principales mesures de ce dispositif, que l'exécutif entend mettre en oeuvre avant l'été, notamment par le biais d'une loi.

Publication du nom des plus gros fraudeurs

C'est l'une des mesures les plus emblématiques du plan annoncé par le gouvernement: la pratique du "name and shame" ("nommer et faire honte"), qui consiste à désigner publiquement le nom des fraudeurs à des fins dissuasives, sera développée pour les cas les plus graves. "Il faut que le peuple français sache qui cherche à s'exonérer des obligations fiscales légitimes qui sont à la charge de chacun", a expliqué mercredi Edouard Philippe face aux parlementaires.

La publication des noms, via les journaux ou internet, sera obligatoire pour les condamnations pénales, sauf décision contraire du juge, et possible pour certaines fraudes sanctionnées par l'administration. "Ca concernerait quelques dizaines de dossiers par an", précise le cabinet du ministre des Comptes publics, Gérald Darmanin.

Création d'une police fiscale

Par ailleurs, "nous allons renforcer les moyens d'enquête judiciaire pour fraude fiscale avec la création d'un service spécialisé à Bercy", a annoncé Gérald Darmanin dans une interview accordée jeudi au Figaro. Il sera doté à terme de 30 à 50 agents, et pourrait être dirigé par un magistrat, a précisé Bercy à l'AFP.

Cette nouvelle structure pourra être saisie par le Parquet national financier (PNF) dans le cas de dossiers nécessitant une "expertise fiscale pointue". Ses agents pourront procéder à des écoutes ou à des perquisitions, comme le fait la police judiciaire.

Recours aux algorithmes

Comme l'avait déjà annoncé Edouard Philippe début décembre, l'exploration de données ("data mining") sera développée afin de cibler les contrôles sur les cas les plus suspicieux.

Cette technique permet de détecter les dossiers à risques grâce à des logiciels permettant de croiser des informations fiscales. Elle est déjà utilisée depuis 2014 pour les entreprises, et testée depuis fin 2017 pour les particuliers.

Une dizaine d'agents seront recrutés d'ici l'été pour accroître le recours à ces techniques, l'objectif étant d'avoir à terme une vingtaine d'agents spécialisés pour épauler les inspecteurs des impôts.

Une quinzaine de millions d'euros, selon Bercy, vont être mobilisés. Cela permettra de développer "l'équipement technique, matériel et juridique de l'administration fiscale", a précisé le Premier ministre.

Mise en place d'un guichet de régularisation

Il s'adressera aux entreprises souhaitant régulariser leur situation. Cela permettra "de faciliter les démarches engagées par les entreprises de bonne foi", précise Bercy à l'AFP.

Selon Le Figaro, cette nouvelle cellule pourra notamment être utile dans le cas d'un nouvel actionnaire qui découvrirait, "après un rachat, un mécanisme litigieux" et qui "sera ainsi assuré d'encourir des pénalités moins sévères".

Instauration du plaider coupable

Une procédure de plaider coupable sera prévue pour les fraudeurs poursuivis au pénal et disposés à reconnaître leurs torts. Ces derniers pourront alors s'éviter un procès, en acceptant la peine proposée par le parquet.

"Il ne s'agit pas d'une transaction", insiste Bercy, qui veut ainsi "accélérer les procédures". Le "plaider coupable" n'empêchera pas, par ailleurs, la publication du nom du fraudeur, précise-t-on.

Possibilité de sanctionner les officines spécialisées

Des sanctions seront créées pour les intermédiaires, comme les cabinets d'avocat ou les sociétés de conseil, à l'origine de montages frauduleux, notamment par le biais de sociétés offshore.

Selon Bercy, ces "officines" pourraient se voir infliger des pénalités administratives allant de 10.000 euros à 50% des honoraires perçus. "L'objectif, c'est de mettre un terme au flou."

Mise en avant plus large des règles fiscales

Les rescrits fiscaux, résumant la position du fisc sur une question soumise par une entreprise, seront désormais "publiés", annonce Gérald Darmanin au Figaro. Une façon selon lui d'"aider les chefs d'entreprise à mieux comprendre les règles fiscales", parfois complexes.

J.Mo. avec AFP